La médiation
égyptienne pour une trêve à Gaza
Wahid
Abdel-Méguid
La trêve que l’Egypte a réussi à conclure entre Israël et le Hamas a ouvert
la porte à l’arrangement d’un dialogue national palestinien. Ce dernier
pourrait à son tour ouvrir la porte à un changement de l’équation
palestino-israélienne et sauver la cause palestinienne qui, un jour, était la
principale cause des Arabes.
Cette cause était au départ un conflit bilatéral. Par la suite, elle est
devenue un conflit tripartite. En effet, les Palestiniens dont les terres et
les droits ont été violés se sont divisés en deux clans. Chaque clan accuse
l’autre d’avoir violé la légitimité. De l’autre côté, la partie usurpatrice et
colonisatrice, à savoir Israël, est désormais en position de force bien qu’elle
apparaisse plus faible qu’auparavant dans la balance régionale.
Les deux
clans palestiniens en conflit sont depuis plus d’un an dans un match nul bien
que chacun d’eux sache parfaitement qu’il ne peut faire flancher l’autre. De
plus, l’un des deux clans est entré dans des négociations improvisées avec
Israël. Des négociations qui ne sont régies par aucune règle ni ne sont basées
sur les précédentes négociations. Ce clan a prétendu pendant des mois qu’il
négociait sérieusement avant de réaliser, un peu tard, que la promesse de
George Bush sur l’Etat palestinien n’était qu’un leurre. Il n’avait pas besoin
de tout ce temps pour réaliser cela, car l’Administration américaine qui a
présenté l’idée de deux Etats pour deux peuples ne possède aucun crédit lui
permettant d’être prise au sérieux.
Quant à
l’autre clan, à savoir le Hamas, il a continué à adopter son discours
défavorable sans entreprendre d’action de résistance. En fait, cette résistance
se limite au lancement de missiles primitifs sur le sud d’Israël. Par la suite,
il a utilisé cette « résistance » comme moyen de pression pour réaliser la
trêve. Il a ainsi réalisé une première dans l’histoire de la lutte pour la
libération nationale qui peut être simplifiée dans un emblème implicite : «
Nous continuerons la résistance si vous n’acceptez pas la trêve (ou plutôt
l’accalmie) ». C’est ainsi que la résistance est devenue pour la première fois
dans l’histoire palestinienne un moyen de parvenir à la trêve et non seulement
à la libération.
C’est
ainsi que les deux clans palestiniens antagonistes se sont surpassés dans la
fabrication de l’illusion et dans sa propagation. L’un au nom des négociations
et l’autre au nom de la résistance.
Bien que
tous les ponts aient été coupés entre les deux clans, l’Egypte a continué à les
aider. En effet, chacun a campé sur ses positions et s’est abstenu de prendre
un seul pas dans la direction de l’autre, même si c’était pour sauver le peuple
de Gaza étranglé par l’embargo imposé par Israël. Il est vrai que la
réouverture du passage de Rafah ne contribue que peu à alléger cet embargo, car
tous les autres passages se trouvent sous la domination d’Israël. Cependant,
les deux autorités de Gaza et de la Cisjordanie ont adopté une nonchalance
étonnante face à la souffrance de plus d’un million de Palestiniens. Par
conséquent, il a été impossible de parvenir à une entente sur la manière de
gérer ce passage jusqu’à ce qu’il devienne possible de réappliquer l’accord de
2005 et de rouvrir le passage.
Cette
entente n’est devenue possible qu’à la lumière de l’accord d’accalmie qui
encouragera les deux clans à agir de manière plus positive avec le mouvement
égyptien. En effet, l’entente entre les deux est indispensable pour rouvrir le
passage et par conséquent compléter les éléments de l’accord de la trêve.
Les
chances de rétablir les ponts entre les deux clans sont aujourd’hui plus
grandes. Chaque clan est entré, d’une certaine manière, dans l’étape de la
dissipation des illusions. L’autorité de la Cisjordanie est maintenant prête,
pour la première fois depuis la séparation, à trouver une solution qui ne soit
pas précédée par l’annulation du renversement opéré par le Hamas. Il semble
aussi que certaines directions du Hamas ont commencé à réaliser qu’il était
difficile de préserver cette situation sans pertes qui pourraient être énormes
pour leur mouvement.
C’est
ainsi que chaque clan avance ses intérêts personnels aux dépens des intérêts de
la question palestinienne. Ce changement donne une plus grande chance au
mouvement égyptien qui veut se lancer dans l’accord d’accalmie pour réaliser
des résultats palpables sur le plan du dialogue interne que plusieurs
médiations ont échoué à faire bouger.
La
majorité de ces médiations étaient palestiniennes. Elles émanaient d’autres
factions comme le Front populaire ou le Front démocratique, d’un groupe
d’hommes d’affaires ou bien d’éléments modérés du Fatah et du Hamas à
l’étranger. Sur le plan arabe, le Yémen a lancé une initiative autour de
laquelle les deux parties se sont divisées dans l’explicitation de la première
clause. Cette clause invitait à rétablir la situation à Gaza d’avant le 14 juin
2007.
Il semble
que les illusions commencent à se dissiper dans les deux clans. Ce qui prédit
des jours meilleurs où les obstacles seront moins importants. En effet, les
deux clans se sont engagés à mettre un terme à la guerre médiatique entre eux.
Si ce dossier se ferme vraiment et si ce pas est suivi par la permission aux
cadres et aux partisans des deux clans de revenir à l’action conjointe, ceci
permettra peut-être l’amélioration du climat, la dissipation du brouillard et
l’instauration d’un minimum de confiance. Toutes ces mesures sont
indispensables pour fixer l’accalmie à Gaza et l’étendre à la Cisjordanie dans
six mois.
Partant,
il est indispensable que le mouvement égyptien avance dans la période à venir
sur deux lignes parallèles, celle de l’accalmie et celle du dialogue national.
Alors que l’Egypte a réussi à réaliser un progrès important sur la voie de
l’accalmie, le dialogue national demeure encore un projet naissant sur lequel
il faut travailler, car il représente la dernière chance pour sauver ce qui
reste de la cause palestinienne.
L’accalmie
qui est indispensable pour la protection du peuple de Gaza peut ne pas être
stratégiquement rentable si elle n’est pas liée à la reprise du dialogue. Ce
dialogue doit se baser sur une concorde et sur un nouveau projet national.