Zimbabwe.
Seul en lice, le président sortant Robert Mugabe a été
proclamé vainqueur d’un scrutin largement dénoncé. Alors que
l’Union africaine semble pencher pour un compromis avec
l’opposition, la communauté internationale, elle, prône une
politique de sanctions.
La victoire à l’arraché de Mugabe
Après
trois mois de violences électorales et de soubresauts, le
président Robert Mugabe, qui était sur le point d’être
évincé du pouvoir, a finalement été réélu suite au retrait
du candidat de l’opposition. Or, le Zimbabwe n’est près de
retrouver la paix et la stabilité à la suite de ces
élections. En effet, le retrait à la dernière minute du seul
opposant de M. Mugabe, Morgan Tsvangirai, quelques jours à
peine avant le second tour, a remis en cause la légitimité
de ce scrutin. Ce dernier a mis en avant l’ampleur de la
répression et de la violence. Le régime avait en effet
déchaîné les violences contre les partisans de l’opposition,
ou supposés tels, après sa déroute aux élections générales
du 29 mars, lors desquelles il avait perdu sa mainmise sur
le Parlement et vu M. Mugabe s’incliner devant le chef de
l’opposition, qui a raté de peu la majorité absolue. Selon
M. Tsvangirai, 200 000 personnes ont été déplacées, 10 000
blessées et 90 membres du parti d’opposition tués depuis le
29 mars. Face à cet état des lieux, le second tour a attiré
moins de la moitié des électeurs inscrits, avec un taux de
participation de 42,37 %.
Malgré cela, M. Mugabe, 84 ans dont 28 au pouvoir, a réitéré
lors de son discours d’investiture une proposition de
négociations avec l’opposition. « J’ai l’espoir que,
bientôt, nous mènerons des consultations entre partis
politiques de différentes opinions afin d’instaurer un
dialogue sérieux qui débouche sur une ère d’unité et de
coopération », a-t-il affirmé.
Mais le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) de
M. Tsvangirai a rejeté les résultats du scrutin, évoquant «
une farce complète et un acte de désespoir de la part du
régime ». Sans exclure totalement des discussions,
Tsvangirai a mis l’accent sur des négociations qu’il
souhaite mener pour une période de transition. « Il n’est
pas inconcevable qu’un arrangement puisse voir le jour »,
a-t-il exprimé. Partageant le même avis, le porte-parole du
parti MDC, Nelson Chamisa a aussi estimé « très difficile de
faire confiance » au président. A cet égard, Tsvangirai
avait appelé la communauté internationale à déclarer
illégitime l’issue du scrutin.
Répondant à son secours, les observateurs de la Communauté
de développement de l’Afrique australe (SADC) ont dénoncé un
résultat qui « ne reflète pas la volonté du peuple ».
Auparavant, la mission d’observateurs du Parlement
panafricain (PAP) avait condamné un scrutin « ni libre ni
équitable », estimant « difficile de nier les allégations de
violences orchestrées par l’Etat ».
Washington plaide pour des sanctions
Essayant de faire des pressions sur l’Afrique, le secrétaire
général de l’Onu Ban Ki-moon a annoncé dans un communiqué :
« Le résultat de l’élection au Zimbabwe n’a pas reflété la
réelle volonté du peuple zimbabwéen ni produit un résultat
légitime ». Et Londres a pressé les pays africains de « tout
faire » pour évincer M. Mugabe du pouvoir. La réaction la
plus violente a été celle des Etats-Unis. Washington a
appelé « la communauté internationale à agir avec fermeté à
l’égard du Zimbabwe ». En visite en Chine, la secrétaire
d’Etat américaine Condoleezza Rice a souligné lundi auprès
des dirigeants chinois que la crise au Zimbabwe
n’intéressait pas seulement l’Union africaine, mais relevait
du Conseil de sécurité de l’Onu, en soulignant qu’elle
attendait « autre chose qu’une simple déclaration » de la
part de l’Onu. Washington veut en effet proposer au Conseil
un nouveau projet de résolution, comprenant un embargo sur
les armes et une interdiction de quitter le territoire pour
les dirigeants zimbabwéens. Mais la Chine, un des cinq
membres permanents du Conseil, s’est dite opposée à de
telles sanctions.
Le chef de l’opposition, de son côté, a essayé de trouver
une nouvelle issue à la crise de son pays en appelant lundi
dernier l’Union Africaine (UA), réunie en sommet en Egypte,
à nommer un envoyé permanent pour subvenir les efforts de
médiation du président sud-africain Thabo Mbeki au Zimbabwe.
En mars 2007, la Communauté de développement d’Afrique
australe (SADC) avait chargé le président Mbeki, qui a
toujours prôné une « diplomatie discrète » chez son voisin,
d’une mission de médiation au Zimbabwe. Le MDC l’a souvent
accusé de complaisance et a demandé à plusieurs reprises sa
révocation.
Maha
Salem