Ghana.
Après huit ans de pouvoir de John Kufuor, les Ghanéens ont
voté cette semaine dans un double scrutin présidentiel et
législatif. Un nouveau test pour la toute fraîche démocratie
ghanéenne.
La démocratie à l’épreuve
Près
de 13 millions d’électeurs ont voté dimanche dernier pour
désigner leur président et les 230 membres du Parlement,
dans un scrutin dont les résultats seront connus d’ici à la
fin de la semaine. Il s’agit surtout d’un test de maturité
pour ce pays ouest-africain de 23 millions d’habitants qui a
déjà réussi une transition démocratique en 2000 avec le
départ en douceur du capitaine Jerry Rawlings.
Les Ghanéens doivent choisir un successeur à John Kufuor, le
président sortant que la Constitution empêche de se
représenter après deux mandats de quatre ans. Il s’agit de
la 5e consultation électorale depuis l’instauration du
multipartisme en 1992. Les électeurs ont le choix entre huit
candidats à la présidence. Mais selon les analystes, la
course de la présidentielle sera prônée entre trois
candidats. En tête de liste, vient le juriste Nana
Akufo-Addo, du parti au pouvoir, le Nouveau Parti
Patriotique (NPP). Son principal rival est John Atta-Mills,
lui aussi juriste et ancien vice-président du capitaine
Jerry Rawlings, du Congrès démocratique national (NDC). Un
homme d’affaires, Papa Kwesi Nduom, occupe le troisième rang
et représente le Parti de la convention du peuple (CPP).
Le NPP possède un avantage en tant que parti au pouvoir
sortant. Cependant, certains observateurs jugent le NDC en
mesure de rallier des électeurs qui attendent des
changements dans l’hypothèse d’un second tour de scrutin
présidentiel. Même si la vraie bataille est entre le NPP et
le NDC de Jerry Rawlings, le troisième candidat pourrait
toutefois créer la surprise. A cet égard, l’issue du scrutin
présidentiel est incertaine et beaucoup s’attendent à ce
qu’un second tour ait lieu le 28 décembre, comme en 2000, et
que dans ce cas, le NPP en sortira probablement vainqueur.
Exerçant à tour de rôle le pouvoir pendant huit ans, les
deux principaux candidats ont promis l’un et l’autre des
avancées économiques, des créations d’emplois et des progrès
en matière de développement.
Le pétrole, manne ou malédiction ?
Quoi qu’il en soit, le président choisi doit poursuivre les
réformes du président sortant John Kufuor qui sont opérées
sur fond de stabilité politique et qui ont en partie relancé
une économie naguère stagnante. D’autant plus que ces
élections interviennent alors que ce pays d’Afrique
occidentale amorce un essor économique et se prépare à
devenir producteur de pétrole. Beaucoup d’observateurs se
demandent cependant si l’impact de la découverte pétrolière
sera uniquement positif, citant comme contre-exemples le
Nigeria et la République du Congo, où l’exploitation
pétrolière a donné lieu à des violences. « Le Ghana est
différent des autres pays. Il y a 30 quotidiens et 150
stations de radio. Les gens sont éduqués — plus que dans
bien d’autres pays d’Afrique. Il y a la liberté et un
certain niveau de transparence », a expliqué à l’AFP George
Owusu, directeur de Kosmos Energy au Ghana. Certains
craignent aussi qu’un clivage entre riches et pauvres ne se
creuse et que la criminalité n’atteigne des niveaux
comparables au Nigeria.
De son côté, le candidat Nana Akufo-Addo a bon espoir de
voir son pays éviter les pièges du pétrole. « Les Ghanéens
ont la chance que le pétrole arrive alors que les affaires
publiques sont menées de manière plus transparente que
jamais », a-t-il assuré.
Premier pays d’Afrique sub-saharienne à ouvrir le bal des
indépendances en 1957, le Ghana estime devoir montrer
l’exemple, sur un continent si difficile, et le scrutin se
déroule sans violence ni tricherie. Quant à la commission
électorale, elle a essuyé de nombreuses critiques, notamment
pour la façon dont elle a révisé les listes électorales, un
exercice marqué par des violences et des soupçons de fraude.
En effet, la communauté internationale attendait la tenue
des élections ghanéennes, surtout que le continent africain
est affecté par le chaos électoral au Kenya, au Zimbabwe et
au Nigeria voisin. Le Ghana a commué une série de coups d’Etat
dans les années 1970 et 1980. Puis l’homme fort du pays,
Jerry Rawlings, après 11 années au pouvoir, organisa des
élections en 1992, qu’il remporta par 2 fois. Enfin, il
accepta une première transition démocratique lorsque le
candidat de son parti perdit le scrutin suivant face à
Kufuor en 2000.
Maha
Salem