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 Semaine du 15 au 22 octobre 2008, numéro 736

 

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Enquête

Presse. La grâce présidentielle accordée à Ibrahim Eissa, accusé de diffusion de fausses nouvelles, alimente un débat entre ceux qui revendiquent une liberté sans limites et ceux qui mettent en question la crédibilité des « pseudo-journalistes ».

Les ondes de l’affaire Eissa

Une grande satisfaction a régné dans les milieux journalistiques suite à la décision du président Hosni Moubarak d’accorder une grâce au journaliste Ibrahim Eissa, rédacteur en chef du journal Al-Dostour. Eissa a été condamné à deux mois de prison ferme pour avoir publié, l’été dernier, dans son quotidien Al-Dostour, « des rumeurs sur la santé du chef de l’Etat ». D’après le tribunal, ses écrits avaient nui à l’économie du pays en amenant plusieurs hommes d’affaires à retirer leurs investissements. Selon les déclarations de la présidence, M. Moubarak a refusé d’avoir des différends personnels avec un citoyen.

« Je suis sans doute ravi de cette décision, mais le problème de fond reste à régler : aucun journaliste ne doit être emprisonné pour avoir écrit un article, cela doit être la règle et non pas l’exception », affirme Ibrahim Eissa dans une première réaction. « La décision du président doit être un message à tous ceux qui tentent d’entraver le rôle de la presse en poursuivant les journalistes devant la justice », ajoute-t-il.

Malgré une promesse présidentielle datant de 2005 d’annuler les peines de prison dans les délits de publication, aujourd’hui un arsenal d’une vingtaine de clauses, dans la loi sur la publication et le Code pénal, permet toutefois l’emprisonnement des journalistes. Samedi, cinq journalistes dont quatre rédacteurs en chef ont comparu devant les tribunaux dans des affaires de diffamation, et l’un est poursuivi par le grand imam d’Al-Azhar, cheikh Sayed Tantawi.

Dans le même contexte, le Syndicat des journalistes, après avoir exprimé ses remerciements au président Moubarak pour sa prise de position en faveur de la liberté de la presse, a indiqué dans un communiqué qu’il devrait y avoir un débat sérieux avec le Conseil suprême de la presse pour parvenir à annuler tous les textes portant atteinte à la liberté de la presse. Le communiqué a souligné par ailleurs l’importance d’actionner le code de déontologie, de quoi permettre au syndicat de sanctionner les journalistes fautifs.

En fait, le débat sur la liberté d’expression s’est accompagné d’un autre débat sur les abus commis par la presse, qu’elle soit officielle, d’opposition ou indépendante. « Ce n’est pas sûr, ce n’est que paroles de journaux », des propos que répètent souvent les gens et qui trahissent un manque de confiance vis-à-vis de la presse. Si quelques-uns qualifient la presse gouvernementale de porte-parole de l’Etat, pour d’autres, la presse d’opposition est trop tendancieuse et ne cherche qu’à faire du sensationnel, souvent aux dépens de la vérité.

Ayant juste pour mission de faire la propagande du régime, les médias sous Nasser avaient le monopole de l’information et pas de concurrents. Sous Sadate, la situation a un peu changé avec l’introduction du multipartisme en 1976. Les partis de l’opposition ont obtenu le droit de publier chacun un journal. Mais le vrai « boom » médiatique s’est fait sentir seulement depuis une décennie, notamment avec les chaînes satellites et les journaux privés. Ces derniers essayent de se frayer un chemin entre les deux tendances, officielle et opposée. Mais cette tentative n’a pas complètement réussi. La concurrence féroce favorise le recours au sensationnel, et la recherche à tout prix d’un scoop, sans trop se fatiguer à faire le travail nécessaire de recherche. Sans parler, bien entendu, du piège de l’opposition pour l’opposition dans lequel ont succombé certains de ces médias.

Mais les journalistes trouvent une justification à ces dits « abus ». Pour eux, l’atmosphère générale dans laquelle ils travaillent est très restrictive. L’affaire de Eissa est un cas qui illustre leur « dilemme », à savoir une information qui n’est pas toujours disponible et que tout le monde se dispute. « Au lieu d’accuser les journaux, il faut d’abord parler du manque de transparence de la part du gouvernement et de la souffrance qu’endurent les journalistes pour obtenir les informations », commente Eissa.

Sur la même longueur d’onde, Gamal Fahmi, membre du conseil du Syndicat des journalistes, estime : « Dans un pays d’Europe ou aux Etats-Unis, il aurait été impossible de publier des rumeurs comme celles publiées par Ibrahim Eissa, car il existe tout un mécanisme pour démentir ce genre d’informations. En Egypte, la communication est perdue entre les médias et le gouvernement, on est passé du dialogue au monologue ».

Quant à Abdallah Al-Sénnawi, rédacteur en chef de l’hebdomadaire nassérien Al-Arabi, il affirme : « En dépit des bévues que commettent parfois les médias indépendants et ceux de l’opposition, ceux-ci restent les plus crédibles vu qu’ils traitent les problèmes des gens avec sincérité et sans ce souci d’embellir ». Il rend la monnaie en accusant les médias officiels de manque de crédibilité. « On diffuse des déclarations officielles niant la hausse des prix alors que ceux-ci ne cessent de grimper, on nous annonce des hausses salariales et la création de nouveaux emplois alors que la pauvreté et le chômage ne cessent de s’accroître », contre-attaque Al-Sénnawi.

Mais Abdallah Kamal, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Rose Al-Youssef, ne voit pas l’affaire du même œil. Il aime plutôt parler de presse « nationale » et non pas « gouvernementale ». Pour lui, ce genre de médias est une « nécessité » pour préserver les principes du métier et conserver la stabilité de la société « face à cette anarchie des médias à sensation qui ne cherchent que leurs petits intérêts ». Kamal estime que ce sont les journalistes de la presse « nationale » qui se proposent pour faire la propagande du gouvernement. « Il faut profiter de la marge de liberté actuelle pour assurer une couverture médiatique objective, ce n’est pas notre rôle de défendre le gouvernement à tort et à travers », affirme-t-il.

May Al-Maghrabi

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