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 Semaine du 5 au 11 septembre 2007, numéro 678

 

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Egypte Ancienne . Au rythme des crues du fleuve, les Egyptiens de l’Antiquité ont fait de leur vallée un des plus beaux jardins du monde. S’intéresser à la diversité de ces vastes espaces verts finement cultivés et organisés peut être l’occasion d’une belle promenade.

Un éden pharaonique

Les Egyptiens ont été de grands amateurs de jardins et des espaces verts. Les textes et les peintures des tombes nous font connaître ce goût des Egyptiens pour les fleurs et l’ombre des arbres des jardins : les morts souhaitent venir se poser sur les branches des arbres qu’ils ont plantés et ils souhaitent se reposer à l’ombre des sycomores.

Les jardins de l’Egypte ancienne étaient une oasis de fraîcheur et une marque de raffinement. Ils sont assez bien connus grâce aux dessins et inscriptions retrouvés sur les tombes, qui révèlent que même les morts possédaient leurs propres jardins dans lesquels ils venaient goûter les fruits à la fraîcheur de la nuit. Les vivants, eux, cultivaient de somptueux jardins, mais jamais uniquement dévolus au seul agrément : ils produisaient tous des fruits, du vin, des légumes et du papyrus. Les jardins égyptiens étaient souvent des jardins maraîchers destinés à l’approvisionnement des populations des villes ou des habitants des déserts.

Dès le début de l’Ancien Empire, Meten, qui vivait sous Snéfrou, possédait autour de sa demeure un jardin d’un hectare, pourvu d’une pièce d’eau, où l’on trouve déjà mentionnés la vigne et le figuier. Mais c’est surtout au Nouvel Empire que nous connaissons les jardins, qui étaient alors très répandus. Anna, qui vivait au début du Nouvel Empire, s’est fait représenter avec sa femme devant son jardin, qui était son orgueil, car il y avait fait venir vingt-huit espèces de plantes, qui formaient un jardin de près de 500 arbres, parmi lesquels on trouve différentes sortes de palmiers, dont une variété très rare, puisqu’il n’y en avait qu’un des sycomores, des figuiers, des grenadiers, des perséas, des pieds de vigne, des saules, des tamaris, des acacias, des ifs, des balanites, des jujubiers ; les autres espèces restent encore à identifier.

Ainsi en était-il des riches demeures qui se trouvaient au fond des jardins, noyées dans la verdure et les fleurs. Les jardins étaient clos de hauts murs et souvent pourvus de portes monumentales. Les allées étaient tracées parallèlement et se coupaient à angles droits, formant des parterres rectangulaires plantés d’arbres et de fleurs. Des kiosques légers étaient édifiés sous les arbres où les maîtres de logis venaient prendre leurs repas ou se reposer en regardant les oiseaux et les fleurs.

Tous les jardins étaient pourvus d’une pièce d’eau, souvent de grande taille, carrée ou rectangulaire. Des lotus et des papyrus s’épanouissent à la surface et abritent des poissons et des grenouilles, tandis que les canards y nagent avec délice. On y descend par quelques marches et une barque légère est amarrée devant l’escalier, attendant les maîtres pour leur promenade. Ces jardins possédaient aussi des potagers, qui demandaient un grand entretien. C’est pourquoi les propriétaires aisés occupaient une quantité de jardiniers, dont la tâche la plus importante était l’arrosage, les potagers étant pourvus de chadoufs. Les gens moins aisés possédaient aussi des jardins plus exigus, et seuls les pauvres, entassés dans des masures dans les grandes villes, ne jouissaient pas de ce plaisir.

Les rois du Nouvel Empire entouraient leurs palais de jardins plus vastes encore : Aménophis III se fit bâtir un palais pourvu d’un immense parc à l’ouest de Thèbes. A Amarna, Akhenaton fit planter plusieurs jardins. Mais c’est surtout Ramsès III qui se distingue en restaurant les jardins de l’Egypte, renouvelant les plantes, créant des nouveaux jardins et faisant curer les canaux abandonnés qui apportaient aux plantes l’eau vivifiante.

 

Pour toutes les classes

La tombe d’Amenemheb comporte une remarquable représentation de jardin : celui-ci est particulièrement vaste et, en dépit du style raide de la décoration, bien détaillé. Le jardin de Nebamon, plus modeste, comprend un bassin en T entouré de quelques arbres et, surtout, une treille soutenue par d’élégantes colonnettes à chapiteau papyriforme. C’est sous le règne de Thoutmosis IV que Nebamon commença sa carrière. Il reçut le titre de porte-étendard du bateau royal. Sans autre action d’éclat, il poursuivit son activité sous le règne d’Aménophis III. La modestie de sa tombe reflète bien la brièveté de sa carrière officielle.

La nature du terrain et le régime de l’inondation désignaient la vallée du Nil pour être avant tout une terre à plantes annuelles : alimentaires, textiles, tinctoriales, médicinales, auxquelles s’ajoutent les plantes d’agrément.

L’orge, « iôt », et le froment amidonnier, « bôti », sont les plus anciennes céréales connues des Egyptiens, car leur nom est écrit selon le procédé idéographique le plus ancien : l’orge avec trois grains et le froment avec un épi. Les autres espèces de céréales connues plus tard sont écrites en caractères phonétiques. La culture du lin est très souvent associée à celle des céréales sur les bas-reliefs de l’Ancien Empire. On reconnaît sur ces mêmes bas-reliefs la laitue, l’oignon, la pastèque et les concombres. Dans des textes égyptiens plus récents, l’ail, le poireau, la fève et la lentille sont cités. L’huile était fournie par le sésame et le ricin. Les médecins savaient que cette huile était purgative, qu’elle faisait pousser les cheveux et calmait certaines maladies de la peau.

Les auteurs classiques mentionnent le coton égyptien, dont le nom indigène n’est pas connu. L’orcanette, la garance, le henné, l’indigo étaient les plantes utilisées par les teinturiers. La vigne était cultivée sous l’Ancien Empire dans le Delta, surtout aux abords du lac Maréotique et du lac Manzala. Cet arbuste est si complaisant qu’il donnait des raisins de différents genres.

 

Le jardin d’Enené

L’Egypte n’est pas un pays de forêts. Cependant, comme on peut le voir sur des peintures thébaines, la campagne égyptienne n’était pas dépourvue d’arbres. Les Egyptiens aimaient les arbres pour leur beauté propre, pour la fraîcheur que procurait leur ombre et pour leurs fruits. Dans chaque nome existait un verger sacré non loin du temple principal. Un propriétaire de la XVIIIe dynastie, Enené, a fait peindre dans son tombeau le jardin où il avait réuni vingt-trois espèces d’arbres. Le sycomore, « nehet », qui vient en tête de liste, est vraiment l’arbre égyptien par excellence. Il pousse dans les villages, dans les carrefours et même sur les bords du désert, du moment que ses racines peuvent atteindre la nappe d’eau souterraine. C’est un arbre vigoureux, presque aussi large que haut, extrêmement touffu. Le palmier dattier, qui lui est fréquemment associé, est au contraire haut et grêle. Il existait, il existe toujours des boqueteaux et même des bois de palmiers d’une grande étendue, comme celui qui recouvre les vestiges de l’ancienne Memphis. Le palmier doum, dont le tronc se ramifie à quelques mètres du sol, ne se rencontrait qu’à partir de Thèbes. Enené devait être particulièrement fier de montrer à ses visiteurs un palmier d’une hauteur inaccoutumée, nommé coucou, sur lequel un scribe quelque peu botaniste donne des renseignements : O palmier doum, grand de 60 coudées, dans lequel sont des noix de coco. Dans ces noix de coco sont des coques. Dans ces coques est de l’eau. L’endroit où l’on recueille cette eau est lointain.

En effet, sur les 481 arbres du jardin ne figure qu’un seul cocotier. Les figuiers étaient très abondants et, lorsque les figues étaient mûres, singes et enfants participaient à leur manière à la récolte. Les saules, les tamaris, les jujubiers, les balanites, les moringas, les caroubiers, les grenadiers, les chaouabou et d’autres espèces d’identification incertaine complétaient la collection. Le grenadier semble avoir été introduit en Egypte au début de la XVIIIe dynastie. On le reconnaît dans le jardin créé par Thoutmosis III et reproduit dans le grand temple d’Amon à Karnak. Le moringa fournissait une huile appréciée des parfumeurs et des médecins. L’olivier, « djede », qui ne se trouve pas chez Enené, n’est pas mentionné avant le Nouvel Empire. Il s’est facilement acclimaté en Egypte, et Théophraste signale une forêt d’oliviers dans la région thébaine. D’après Strabon, c’étaient les oliviers du Fayoum qui donnaient les meilleurs fruits. L’acacia seyal fournissait un bois de bonne qualité aux charpentiers et aux constructeurs de barques. Le térébinthe, dont la résine, « sonté », servait à encenser les dieux et les morts, poussait dans les oasis et dans le désert, à l’est de Memphis. L’Egypte antique n’a pas connu l’oranger, ni le citronnier, ni le rosier, ni d’autres arbres qui sont de nos jours l’ornement des places et des jardins.

 

La reine des fleurs

Pour les Egyptiens, qui n’ont pas respiré la rose avant l’époque romaine, la reine des fleurs était la fleur de lotus blanche ou bleue. On en faisait d’immenses bouquets pour décorer les salles de festin. Les femmes à la maison ou en visite tenaient des lotus à la main ou en fixaient sur leurs cheveux. Les hommes ne les dédaignaient pas et se couronnaient de lotus au cours des réjouissances champêtres. La souche tubéreuse de cette plante se mangeait grillée ou bouillie et l’on faisait une sorte de pâtisserie avec les graines pilées. Le lotus, (seshen), est la plante emblématique de la Haute-Egypte. C’est une fleur qui se referme la nuit et s’enfonce sous l’eau. Pour cette raison, elle est devenue le symbole du soleil et de la création, et les Egyptiens pensaient que le dieu Atoum était né d’une fleur de lotus. Symbole de la renaissance, elle était associée à Osiris et au culte funéraire.

Le papyrus (mehyt), plante mystique et emblématique de la Basse-Egypte. Il symbolisait la vie elle-même et le marais dont toute vie était issue. Les Egyptiens pensaient que des piliers de papyrus soutenaient la voûte céleste. Le papyrus servait à toutes sortes d’emplois. On mâchait, comme on le fait aujourd’hui de la canne à sucre, la partie inférieure de la tige. Le reste servait à faire des paniers, des corbeilles, des cages et des bateaux légers. Malgré tout, son principal emploi était la fabrication d’un papier aussi approprié pour l’écriture que pour l’illustration et qui se conserve indéfiniment. Les papyrus formaient au nord de l’Egypte d’épais fourrés. Les tiges, dont la hauteur était cinq ou six fois la stature humaine, abritaient dans leurs ombelles les nids des martins-pêcheurs et d’autres oiseaux aquatiques qu’assiégeaient les genettes, les ichneumons, les chats sauvages, tandis que poissons, loutres, hippopotames et crocodiles se cherchaient et se fuyaient entre les pieds.

En Haute-Egypte, si l’on se fie aux peintures du Moyen et du Nouvel Empire, les fourrés de papyrus ne sont ni aussi hauts ni aussi vastes que dans le Delta. Actuellement, cette plante aurait complètement disparu si l’on n’en cultivait quelques spécimens dans les jardins du Caire. Par contre, elle vient spontanément dans la haute vallée du Jourdain et sur les bords du lac de Houlé qui a conservé son nom ancien : « hely », attesté dans quelques textes et surtout par le signe « hl » de l’écriture hiéroglyphique.

Amira Samir

 

Pour en savoir plus : An Ancient Egyptian Herbal, par Lise Manniche, AUC Press, 2006 


 

Arbres cultivés
dans les jardins de l’Egypte ancienne

Dans un pays aussi aride que l’Egypte, les végétaux étaient essentiels à la survie. De nombreuses plantes, parmi lesquelles la fleur de lotus, les roseaux de papyrus et plusieurs espèces d’arbres, revêtaient tant d’importance pour les Egyptiens qu’elles étaient associées à des événements mythologiques.

Les espèces d’arbres suivantes semblent avoir été les principales cultivées dans les jardins de l’Egypte antique.

Sycomore - Ficus sycomorus (Moraceae), Figuier commun - Ficus carica (Moraceae), Palmier dattier - Phœnix dactylifera (Palmaceae),

Palmier doum - Hyphæne thebaica (Palmaceae), Palmier argoun - Medemia argun (Palmaceae), Dattier du désert - Balanites ægyptiaca (Zygophyllacées), Jujubier épine-du-Christ – Ziziphus spina-christi (Rhamnaceae), Moringa - Moringa peregrina (Moringaceae), Olivier – Olea europaea (Oleaceae), Pistachier – Pistacia sp. (Anacardiaceae), Ricin – Ricinus communis (Euphorbiaceae),

Acacia du Nil – Acacia nilotica (Fabaceae).

L’histoire naturelle de l’Egypte

Un livre célèbre de Prosper Alpin du XVIe siècle que l’IFAO vient de publier

et qui est l’un des premiers à parler de l’environnement égyptien.

La redécouverte de l’Egypte, a été, pour les hommes d’Occident, une passionnante aventure. Jusqu’à l’an 1700, c’est-à-dire avant que ne s’ouvre avec le XVIIIe siècle, l’ère des grands voyageurs, plus de deux cent cinquante auteurs occidentaux ont publié une relation de leurs aventures égyptiennes. Bon nombre de ces récits sont d’accès difficile, en raison de leur rareté ; certains sont encore manuscrits, les autres sont rédigés dans les langues les plus diverses : anglais, allemand, espagnol, italien, flamand, tchèque ou latin. C’est dire que leur utilisation, même lorsque le livre est accessible, n’est pas toujours à la portée immédiate de ceux qui s’occupent d’histoire orientale.

Pour mieux dégager les étapes de cette lente redécouverte, l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO) du Caire a entrepris de republier, de ces multiples récits, la part qui concerne l’Egypte, et de la traduire, quand il y a lieu, en langue française. Documents d’histoire et de civilisation, ces voyages constituent ainsi les premiers pas d’un échange au niveau des hommes. Et c’est dans ce cadre que vient la deuxième édition de Histoire Naturelle de l’Egypte, par Prosper Alpin, 1581–1584, qui vient d’être publiée par l’IFAO. Cette œuvre, traduite du latin, est la vingtième publiée de la collection des Voyageurs Occidentaux en Egypte. Ce livre, qui a été déjà imprimé en 1979, vient d’être réimprimé à l’occasion de la célébration du centenaire de l’IFAO au palais de Mounira.

L’auteur de cet ouvrage de deux volumes, Prosper Alpin, né en 1553 à Marostica (petite ville proche de Vicence), dans l’Etat de Venise, a choisi d’abord le métier des armes, puis, sur les instances de son père médecin, il étudie la médecine à Padoue et fut docteur en 1578.

En 1580, Prosper Alpin est arrivé en Egypte pour un séjour qui a duré trois ans et demi. Pendant le temps qu’il y a passé en pratiquant officiellement la médecine, il s’est appliqué à apprendre les méthodes médicales propres à ces populations. Fasciné par la vie naturelle de l’Egypte, il écrit un grand ouvrage sur l’histoire naturelle du pays dans lequel il a parlé de la beauté de la vallée du Nil, de la crue du fleuve et de ses eaux, du climat du pays, des khamassin et des animaux qui y vivent. « Nous considérons d’abord ce qui semble rendre l’Egypte célèbre et admirable : le climat agréable et sain pour les habitants, le Nil, les villes, les palais, les lacs, les parcs, les richesses, les marchandises apportées des régions voisines, les pyramides, les colonnes, les obélisques, les bains, les tombeaux antiques, les bibliothèques, les sciences, la religion, les plantes communes dans ce pays, les terrains, les pierres et autres éléments du sous-sol connus des habitants, et enfin les animaux domestiques de cette province. Tout cela, avons-nous pensé, ne manquera pas d’intérêt pour ceux qui aiment connaître des régions variées et les différentes façons de vivre des hommes », estime Prosper Alpin dans le chapitre V du premier volume de son ouvrage.

A. S.

 




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