Lutte contre le terrorisme.
Les annonces de démantèlement de réseaux terroristes se
multiplient, alors que le projet de loi antiterroriste est à
l’étude. Le manque d’informations sur ces coups de filet
alimente les interprétations les plus diverses.
Quels aboutissements ?
«
Démantèlement d’une cellule terroriste ». L’information se
lit de plus en plus dans la presse. Mais les communiqués du
ministère de l’Intérieur, relatifs à ce genre d’affaires,
apportent généralement plus de questions que de réponses. La
dernière opération date de la semaine dernière. « Les
services de sécurité ont démantelé une cellule terroriste
formée de membres de différentes nationalités arabes.
Ceux-ci sont entrés en Egypte comme touristes puis ils s’y
sont établis d’une façon illégale après l’expiration de leur
séjour ». Rien n’est révélé sur la nature de ce réseau ni
sur l’appartenance ou les circonstances de l’arrestation de
ses membres.
Il y a quelques semaines, l’arrestation des membres d’un
autre réseau « fondamentaliste » a été annoncée, toujours
sans plus de détails. Alors qu’en décembre 2006, un groupe
d’islamistes égyptiens et étrangers, parmi lesquels
figuraient neuf Français, deux Belges, un Américain ainsi
que des Syriens et des Tunisiens, qui recrutait, selon les
autorités, des combattants djihadistes pour l’Iraq, a été
également démantelé. Ces islamistes étrangers résidaient en
Egypte, se servant de visas d’études. D’après le ministère
de l’Intérieur, ils étaient venus recruter des Egyptiens
pour les envoyer combattre en Iraq. Les documents saisis en
leur possession prouvaient leur appartenance à des
organisations établies à l’étranger.
Des informations qui laissent la porte ouverte à maintes
spéculations et interprétations. Diaa Rachwan, spécialiste
des mouvements islamistes, prévient que cette imprécision
sert à propager un état d’inquiétude et de peur chez les
citoyens. « Conscient de la campagne menée par la société
civile et les organisations des droits de l’homme contre le
projet de loi antiterroriste en phase d’élaboration, l’Etat
veut mobiliser l’opinion publique pour appuyer ce projet de
loi en faisant passer l’idée que le pays est face à un
danger terroriste. Alors que toutes les données montrent que
ces groupes sont illusoires », estime Rachwan. « La loi sur
le terrorisme, qui sera prochainement promulguée, permettra
à l’appareil sécuritaire, dont le rôle reste primordial, la
protection du régime et l’oppression de ses opposants avec
la même violence adoptée sous l’état actuel d’urgence en
vigueur depuis 1981 », ajoute-t-il. Avis partagé par Hafez
Abou-Seada, secrétaire général de l’Organisation égyptienne
des droits de l’homme. Selon lui, ces « préludes médiatiques
» visent à justifier les abus et les atteintes aux droits
civils qu’apportera la nouvelle loi sur le terrorisme. « Le
régime veut revêtir ce scandale législatif qu’on appelle loi
antiterroriste d’une légitimité populaire en propageant un
état de terreur et en brandissant le sceptre du terrorisme
organisé », lance-t-il. Et de se demander : « Pourquoi le
ministère de l’Intérieur n’a-t-il fourni aucune information
sur ces cellules démantelées et sur les résultats des
enquêtes ? Et pourquoi cette liaison injustifiée entre
l’arrestation de leurs membres et celle des Frères musulmans
alors que la nature de la confrérie et de ses activités est
d’ordre politico-religieux ? Sous cette confusion et en
l’absence d’informations, il n’est pas difficile de mettre
au jour les vraies intentions de l’Etat ».
Quant à l’appréciation de ce risque qui planerait à
l’horizon, Rachwan avance que l’Egypte peut difficilement
être envahie par une organisation terroriste telle Al-Qaëda
ou d’autres organisations extrémistes étrangères. Il
rappelle que les seules organisations égyptiennes qui
prônaient la violence étaient la Gamaa islamiya et le Djihad
et les deux ont renoncé à la violence en 1997. « Malgré les
événements du 11 septembre, l’invasion de l’Iraq et la
multiplication des appels d’Al-Qaëda à la lutte armée, la
Gamaa islamiya et le Djihad ont tenu leurs positions
pacifiques », note le chercheur .
May
Al-Maghrabi