Palestine . Après le dégel des droits de douane palestiniens par Israël, ce dernier décide la prochaine libération de prisonniers palestiniens exclusivement membres du Fatah. Autant de mesures pour isoler davantage le Hamas.

 

Les manœuvres d’Olmert

 

Certes, il ne s’agit pas d’un geste de bonne volonté à l’égard des Palestiniens, mais d’une nouvelle tentative qui vient s’inscrire dans le cadre de l’évincement du mouvement de résistance islamique du Hamas au profit du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbass. Le gouvernement israélien d’Ehud Olmert a approuvé la libération de 250 prisonniers palestiniens en vue de renforcer le président Mahmoud Abbass et son cabinet de crise formé après la prise de contrôle de la bande de Gaza par le Hamas. Le premier ministre l’a même reconnu. « Je pense que c’est un geste qui mérite d’être effectué (...) car nous souhaitons utiliser tous les moyens susceptibles de renforcer les éléments modérés au sein de l’Autorité palestinienne », a-t-il déclaré en allusion au radicalisme du Hamas. Olmert s’était engagé à libérer des prisonniers membres du Fatah lors d’un sommet avec Abbass le 25 juin, 11 jours après la défaite du mouvement nationaliste du président palestinien dans la bande de Gaza.

D’après un responsable gouvernemental, le cabinet israélien a approuvé à une large majorité la libération de prisonniers palestiniens.

Néanmoins, si le principe de la libération a été accepté, il ne faut pas s’attendre à une libération imminente. Les autorités israéliennes doivent désormais établir la liste des membres du Fatah concernés par cette mesure.

Une fois cette liste établie, un nouveau délai de quelques jours devrait être nécessaire avant la libération effective de ces prisonniers, en raison de recours possibles pendant 48 heures devant la Cour suprême. De précédentes libérations de ce type ont été contestées par des organisations représentant les familles des victimes d’attaques palestiniennes.

Saëb Eraqat, collaborateur de Abbass, a salué la décision israélienne tout en invitant le gouvernement d’Olmert à établir la liste des prisonniers concernés en collaboration avec les Palestiniens. « La question des prisonniers nécessite plus que des gestes afin d’être résolue, cependant, nous saluons toujours la libération de prisonniers », a-t-il dit.

D’après les statistiques officielles, au moins 10 000 Palestiniens sont détenus dans des prisons israéliennes.

Faouzi Barhoum, porte-parole du Hamas, a pour sa part déclaré que « tous les détenus palestiniens, hommes et femmes, ont le droit d’être libérés ». Selon lui, la libération exclusive de membres du Fatah entre dans le cadre des efforts de Abbass pour « renforcer le principe de la séparation » d’avec le Hamas.

Le Hamas accuse Abbass d’être proche d’Israël et des Etats-Unis plus qu’il ne le faut. Les Etats-Unis, l’Union européenne et Israël ont apporté leur soutien à Mahmoud Abbass dans sa lutte contre les islamistes du Hamas, vainqueurs des élections législatives en janvier 2006. Les tensions permanentes entre le Fatah et le Hamas ont débouché début juin sur de nouveaux affrontements entre les deux camps dans la bande de Gaza, qui se sont soldés par la victoire des islamistes.

En réaction, le président palestinien a limogé le gouvernement d’union formé en mars par le Hamas et le Fatah et a nommé un cabinet de crise soutenu par les Occidentaux et siégeant en Cisjordanie.

Tout en renforçant la position de Abbass, Israël continue ses incursions dans la bande de Gaza contrôlée par le Hamas. Les troupes israéliennes se sont retirées de la bande de Gaza tôt vendredi après une incursion militaire qui s’est soldée par la mort de onze militants palestiniens. Selon Tsahal, ses soldats se trouvaient à environ un kilomètre à l’intérieur de la bande de Gaza pour une opération de routine quand ils ont identifié des activistes et ouvert le feu sur eux depuis les airs et au sol.

L’accrochage s’est produit près du camp de réfugiés de Bureïj, théâtre fréquent d’affrontements entre militants armés et l’armée israélienne. Neuf militants ont été tués, dont six appartenant au Hamas, selon le mouvement de la résistance islamique.

Par la suite, l’aviation israélienne a largué des missiles sur des cibles dans le secteur, selon l’armée. D’après des sources hospitalières, deux militants ont été tués, et le Hamas a précisé qu’ils appartenaient également à ses rangs.

 

La Ligue arabe soutient Abbass

Israël n’est pas le seul à être déterminé à soutenir Abbass au détriment du Hamas. L’Etat hébreu a confirmé dimanche qu’il allait recevoir cette semaine, pour la première fois de son histoire, une délégation de la Ligue arabe. Les ministres jordanien et égyptien des Affaires étrangères, Abdul-Ilah Al-Khatib et Ahmad Aboul-Gheit, arriveront jeudi à Jérusalem pour y rencontrer leur homologue israélienne, Tzipi Livni, et le chef du gouvernement Ehud Olmert, a annoncé le ministère jordanien des Affaires étrangères. Il s’agira d’un pas diplomatique important pour Israël. Historiquement, la Ligue arabe a entretenu des rapports conflictuels avec l’Etat hébreu, mais ses 22 membres semblent désormais se tourner vers une ligne plus pragmatique, alors que la région connaît l’ascension de l’islamisme radical.

Il s’agit maintenant de soutenir le président palestinien Mahmoud Abbass et son parti, le Fatah, affaibli après le coup de force du Hamas dans la bande de Gaza.

Les deux hommes conduiront la délégation de la Ligue arabe, qui doit discuter en Israël de l’initiative de paix arabe, a confirmé Mark Regev, porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères. Ce plan prévoit notamment la reconnaissance de l’Etat d’Israël par tous les pays arabes, la création d’un Etat palestinien, le retrait israélien de tous les territoires conquis en 1967.

Le secrétaire de la Ligue arabe, Amr Moussa, a expliqué dimanche que les ministres égyptien et jordanien allaient prendre « les contacts nécessaires avec Israël », au nom de la commission arabe pour l’initiative de paix.

L’initiative de paix arabe, d’origine saoudienne, date de 2002 et a été ravivée récemment. Outre la pleine reconnaissance d’Israël en échange d’un retrait de tous les territoires palestiniens, elle propose une « solution juste » au problème des réfugiés palestiniens. Israël n’a pas rejeté ce projet, mais a exprimé des réserves sur le retrait total des territoires et le retour des réfugiés en Israël .

Rania Adel