Al-Ahram Hebdo,Monde Arabe | Al-Ahram Hebdo, Monde Arabe | Frédéric Charillon, « L’Europe mène une politique de dialogue critique »
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 Semaine du 18 à 24 avril 2007, numéro 658

 

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Union européenne . Frédéric Charillon, professeur de sciences politiques et directeur du Centre d’études en sciences sociales de la défense (Paris), analyse les défaillances de la politique étrangère de l’UE, notamment au Moyen-Orient.  

« L’Europe mène une politique de dialogue critique » 

Al-Ahram Hebdo : Quelles sont les grandes lignes de la politique étrangère menée par l’Union Européenne (UE) au Moyen-Orient et pourquoi la juge-t-on inefficace ?

Frédéric Charillon : L’hypothèse générale est que l’Union européenne a une politique d’accompagnement, elle se contente de suivre l’actualité, ce qui n’est pas suffisant. Elle n’a pas de politique pour changer structurellement les choses, en cela, elle est opposée aux Etats-Unis qui veulent tout refaire dans la région. Cela est dû à une sorte de fatalisme en UE : la région serait trop compliquée, trop dramatique. L’UE accompagne le processus de paix quand il y en a un. Par exemple, avec le processus de Barcelone qui accompagnait le processus de paix palestinien, l’UE était devenue le premier bailleur de fonds de la Palestine. Mais elle a des difficultés quand il n’y a pas de processus de paix, car elle est incapable d’agir dans un cadre conflictuel.

— Pourquoi ?

— L’UE a un problème de définition d’une politique étrangère commune, ses membres sont toujours d’accord pour des actes positifs tels que participer à la reconstruction de l’Iraq, ou soutenir la police palestinienne, par exemple. Mais ces actions ne sont que financières. Et il lui est plus difficile de trouver un accord pour des actes négatifs tels que des sanctions, des menaces, etc. Les différents membres sont toujours tentés de laisser les autres assumer les décisions difficiles. La solution serait d’améliorer le processus de définition des politiques étrangères communes, peut-être avec un ministre européen de politique étrangère. Il est difficile pour l’UE de mettre en place une politique commune car elle est divisée sur les grands dossiers : Iran, Iraq, Liban. La volonté française de reprendre le dialogue avec l’Iran est rejetée par le reste de l’Europe, pour l’Iraq, elle était très déchirée, et pour le Liban, certains veulent discuter avec la Syrie, d’autres non.

— Quelles différences concrètes existe-t-il donc entre les politiques étrangères européenne et américaine ?

— L’UE n’émet pas de jugements, ni d’arbitrage politique. Elle fait beaucoup d’efforts pour comprendre mais n’émet pas de jugements, ce qui est l’exact contraire de ce que font les Etats-Unis. Ceux-ci ne font plus de politique étrangère, c’est-à-dire avoir des relations et un dialogue avec les pays étrangers, même avec ceux que l’on n’aime pas. L’UE mène une politique de « dialogue critique » : elle parle avec tout le monde, et ne rompt pas ce dialogue.

Les actions de l’UE sont neutres et politiquement correctes, toutes ses actions sur chaque dossier sont banales. Pourtant, à propos du Moyen-Orient, il y a des experts très compétents à Bruxelles, ils rassemblent et étudient toutes les expertises faites : universitaires, ONG, etc. Le problème est qu’il n’en sort rien de politique. Par exemple, la question des conflits entre sunnites et chiites est trop délicate pour que l’UE puisse prendre position. Elle observe avant d’agir, contrairement aux Etats-Unis dont l’UE pense que les actions sans observations sont dangereuses dans cette région si difficile. Le chiisme est un acteur compliqué. De plus, en relations internationales, il n’y a pas de loyautés définitives car les intérêts propres sont plus importants. Il n’y a donc peut-être pas de réel bloc sunnite ni de croissant chiite.

— Quel est le rapport entre la politique étrangère menée par l’Union européenne dans cette région, et celle de la France, notamment celle de Chirac ?

— Il y a une forte influence des experts bruxellois sur les différentes politiques étrangères nationales. L’objectif est de créer une politique étrangère commune, il y a donc une obligation morale de concertation. Tous les Etats membres sont obligés de ne pas prendre des positions trop incompatibles avec celles des autres.

Quant à la politique menée par Chirac dans cette région, la question est : qu’en restera-t-il ? La nouveauté par rapport aux présidents précédents est son ouverture sur le monde non occidental, son attirance pour l’Orient. Il se démarque aussi par son volontarisme politique dans des moments où l’on pensait qu’il n’avait pas de marges de manœuvre. Par exemple pendant la crise sur l’Iraq où il a non seulement refuser la guerre, mais où il a aussi fait campagne contre la volonté américaine de la faire. C’est un homme d’intuition plus que de construction, il a eu les bonnes intuitions aux bons moments, à court et long termes. Mais est-ce que ces bonnes intuitions se sont transformées en vraie politique ? Il est peut-être la plus belle réussite en politique étrangère pour l’opinion française. Il a un sens très fort de l’exception française, il ne voulait pas que la politique étrangère de la France soit celle de la Grande-Bretagne : suivre les Etats-Unis, ni celle de la Suisse : faire de l’humanitaire et du financement seulement. Il est convaincu que la France est attendue dans le monde pour des positions fortes. Il a du bon feeling en politique étrangère, mais à part le Liban, notamment en 2006, et la Côte-d’Ivoire, qu’a-t-il fait concrètement ?.

Julie Durand

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