Kosovo .
Les dirigeants serbes et kosovars n’ont pas réussi à
s’entendre sur le plan de l’émissaire onusien, Martti
Ahtisaari, concernant la province séparatiste, lors d’un
ultime sommet à Vienne.
L’entente
impossible
Une
fois de plus, le dossier du Kosovo, cette province
séparatiste qui constitue 15 % des territoires serbes, a
pris le devant de la scène internationale, avec la tenue
samedi, à Vienne, du dernier sommet sur l’avenir de la
province entre les dirigeants serbes et kosovars, avant que
le médiateur des Nations-Unies, Martti Ahtisaari, ne
soumette son plan pour l’avenir du Kosovo au Conseil de
sécurité, à la fin de ce mois-ci.
Sans
surprise, ces ultimes discussions, qui mettent fin à 13 mois
de négociations, sous l’égide de l’émissaire onusien, ont
échoué, les deux parties campant fermement sur des positions
complètement inconciliables. « J’ai le regret de dire qu’il
n’y avait pas de volonté de la part des parties d’abandonner
leurs positions antérieures. Il n’y avait aucun terrain
d’entente commun aux positions des deux parties », a déploré,
samedi soir, M. Ahtisaari, indiquant qu’il allait maintenant
transmettre le dossier au Conseil de sécurité qui est maître
de ses procédures.
Le plan
Ahtisaari consiste à octroyer une large souveraineté au
Kosovo sous surveillance internationale. Il préconise aussi
que le Kosovo puisse adhérer aux organisations
internationales, se doter d’une Constitution et d’un hymne
national. Certaines des municipalités serbes auraient droit
à un certain degré d’autonomie et les lieux d’héritage
culturel et religieux serbes jouiraient d’une protection
particulière. Le nouveau Kosovo, toujours selon le projet de
M. Ahtisaari, devrait être pourvu d’un département de
sécurité professionnel, multiethnique et démocratique, avec
une police unifiée et une petite armée de 2500 hommes.
Cependant, le maintien du droit et de l’ordre serait
toujours confié à une force internationale et les 17 000
soldats de l’Otan, présents depuis l’établissement de
l’administration de l’Onu en 1999, resteraient en place, au
moins dans un premier temps.
Violation brutale
Voyant
dans ce plan un pas sûr vers l’indépendance du Kosovo,
Belgrade l’a catégoriquement rejeté et l’a dénoncé comme une
« violation brutale de la charte des Nations-Unies ». « Ce
document est fondamentalement inacceptable car il ne
réaffirme pas la souveraineté de la Serbie sur le Kosovo. Il
offre à la province une large autonomie garantie
internationalement », s’est insurgé le président serbe Boris
Tadic, ajoutant que ce plan risque de conduire à une large
période d’instabilité dans la province que Belgrade
considère comme le berceau historique de la nation serbe.
Selon M.
Tadic, si ce plan était accepté, ce serait la première fois
dans l’histoire contemporaine que l’on amputerait le
territoire d’un pays démocratique pour satisfaire les
aspirations d’un groupe ethnique particulier.
En
revanche, le plan Ahtisaari constitue une bouée de sauvetage
pour les leaders albanais du Kosovo qui y voient un pas très
important vers l’indépendance. Samedi, le premier ministre
kosovar albanais, Agim Ceku, a réaffirmé, à l’issue du
sommet, que le plan Ahtisaari apporterait sûrement
l’indépendance au Kosovo. De son côté, le président kosovar,
Fatmir Sejdiu, a insisté sur le désir de Pristina de voir le
Kosovo respecté dans ses frontières actuelles. Jugeant ce
plan insuffisant, plusieurs milliers d’albanophones ont
manifesté, samedi, dans les rues de Pristina contre le plan,
mécontents qu’il ne prévoie pas l’indépendance pure et
rapide de la province.
Or dans
une tentative de calmer les manifestants, le premier
ministre de Pristina, Agim Ceku, avait exhorté les Kosovars
à faire confiance à un processus qui débouchera sur
l’indépendance, appelant les manifestants à éviter toute
violence. En effet, de violents affrontements ont eu lieu le
mois passé entre la police et les militants du mouvement
Autodétermination, deux manifestants y trouvant la mort
lorsque la police de l’Onu avait tiré des balles en
direction de la foule. A Bruxelles, le commissaire européen
à l’Elargissement, Olli Rehn, a déclaré qu’il continuait à
soutenir le plan Ahtisaari malgré son rejet par Belgrade. «
La proposition Ahtisaari de règlement constitue un compromis
réaliste, étant donné les positions irréconciliables des
parties », a déclaré M. Rehn. « Ce plan définit le cadre
d’un Kosovo stable, démocratique et multiethnique », a-t-il
estimé. Pour Belgrade, le sommet de samedi n’est pas le
dernier épisode du processus. Les Serbes comptent encore sur
un veto de la Russie, leur allié traditionnel, lors de
l’examen du texte par le Conseil de sécurité de l’Onu, la
dernière instance à décider de l’avenir du Kosovo.
Maha Al-Cherbini