Palestine. L’absence
d’un agenda clair, les divergences de vues palestiniennes et israéliennes et la
non participation du Hamas jettent le doute sur l’aboutissement de la
conférence de paix prévue aux Etats-Unis en novembre prochain.
Echec annoncé
Le processus
de paix à l’agonie depuis des années pourrait-il être ranimé par la prochaine
conférence de paix censée se tenir aux Etats-Unis en novembre prochain ? Telle
est la question que se posent beaucoup de politologues. Plus les jours passent,
plus les rencontres entre les différents responsables se multiplient pour
s’accorder sur l’ordre du jour de la conférence. Le président de l’Autorité
palestinienne, Mahmoud Abbass, s’est entretenu en début de semaine avec le
président égyptien Hosni Moubarak pour débattre de cette conférence. La semaine
dernière, le président américain, qui s’est entretenu avec le président de
l’Autorité palestinienne, s’est déclaré convaincu que M. Abbass ainsi que le
premier ministre israélien Ehud Olmert entendaient sincèrement parvenir à la
coexistence pacifique de deux Etats palestinien et israélien.
Outre
cette rencontre, M. Bush a envoyé au Proche-Orient sa secrétaire d’Etat
Condoleezza Rice pour préparer le terrain à cette conférence avec les
dirigeants israéliens et palestiniens. Il a aussi prévu d’envoyer son épouse
Laura en octobre au Proche-Orient pour une mission de diplomatie publique
visant à améliorer l’image des Etats-Unis dans la région.
Ces
navettes suffisent-elles à garantir la réussite de la conférence ? Beaucoup en
doutent et prévoient même que la conférence se termine sur un constat d’échec,
si elle se termine. D’autres croient en une possibilité de report de la
conférence. Primo, aucun ordre n’a été arrêté et c’est la divergence des points
de vue palestinien et israélien qui mène les observateurs à cette conclusion. Les
préparations de la conférence sont en effet compliquées par les attentes
différentes des Israéliens et des Palestiniens.
« Nous
souhaitons que cette réunion traite de la substance des principales questions
pour que nous puissions négocier par la suite un traité de paix permanent avec
Israël », avait dit M. Abbass, en allusion aux questions fondamentales des
frontières d’un futur Etat palestinien, du statut de Jérusalem, du sort des
Palestiniens qui ont quitté leurs terres. « Nous devons nous rendre là-bas avec
un document clair et précis, qui permettra d’engager des négociations
détaillées sur ce que nous appelons les questions du statut final », a-t-il
dit. « Je crois qu’aller là-bas avec une déclaration générale ne sera pas
profitable », a ajouté Abbass à l’issue de son entrevue dimanche au Caire avec
le président égyptien Hosni Moubarak. Pour le moment, on ignore dans quelle
mesure Olmert, affaibli politiquement, est prêt à suivre Abbass dans sa volonté
d’aborder ces questions centrales.
Les
attentes palestiniennes sont aussi celles des pays arabes. L’Egypte a ainsi
insisté sur le fait que les résultats de la conférence doivent être clairs et
influents de façon à mener à l’établissement d’un Etat palestinien dans les
territoires palestiniens.
Un
partenaire aussi important que l’Arabie saoudite attend que soient clarifiés
l’ordre du jour et les objectifs, a indiqué un responsable saoudien. Les
analystes estiment que les Saoudiens sont conscients que le principal objectif
des Etats-Unis est de tenir une rencontre publique entre de hauts responsables
du royaume et le premier ministre israélien, Ehud Olmert, en contrepartie d’une
déclaration d’intentions qui ne comporterait aucun engagement clair de la part
de l’Etat hébreu ni un calendrier raisonnable pour le règlement du problème
palestinien. Le chef de la diplomatie saoudienne, Saoud Al-Fayçal, avait
ouvertement exprimé ces griefs et avait fait allusion à la nécessité de
conclure une paix globale.
Les réserves des dirigeants arabes
La
position égyptienne et saoudienne reflète la réserve des dirigeants arabes qui
n’ont pas confirmé leur présence, et craignent que les sujets de fond ne soient
pas abordés.
A cela
s’ajoute la position syrienne. Après sept dures années, souligne le quotidien
officiel Techrine, l’Administration américaine a finalement décidé d’utiliser
le mot paix, et d’appeler à une réunion aux objectifs flous.
En
effet, les craintes arabes ont leur raison d’être, puisqu’Israël a déclaré qu’il
attend de la conférence une déclaration de principes plus générale. Allant dans
la même direction, un haut responsable américain a tenté de contenir les
attentes en disant que la conférence ne serait pas « une négociation sur le
statut final » mais seulement un des « pas menant à terme à la négociation sur
le statut final ».
Ce qui
assure l’opinion de certains observateurs qui voient que la raison essentielle
derrière l’organisation de cette conférence est non pas la situation lamentable
des Palestiniens mais plutôt la volonté américaine de détourner le regard de la
communauté internationale de ce qui se passe en Iraq et de ce qui se passera
éventuellement avec l’Iran.
Il ne
faut pas oublier non plus le rival du Fatah de M. Abbass, le mouvement de la
résistance islamique du Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, et qui a appelé
certains pays arabes à ne pas participer à la réunion et à ne pas faire de
concessions à Israël. A Gaza, les dirigeants du Hamas ont minimisé l’importance
de la conférence. Le Hamas a aussi souligné que tout accord qui pourrait
résulter de la conférence de paix conçue par les Etats-Unis cet automne ne sera
pas contraignant pour les Palestiniens.
Bref,
l’opacité de l’ordre du jour de ladite conférence et les tergiversations
systématiques d’Israël envers ses engagements réduisent tout espoir de voir
aboutir cette conférence. Cette conférence, si elle se tient, sera un énième
leurre alimentant les illusions de progrès en Palestine.
Rania Adel