Nuage noir.
Avec de nouveaux compresseurs de paille de riz et des usines
d’incinération de déchets agricoles fournis cette année aux
agriculteurs, la lutte contre ce phénomène automnale
au-dessus du Caire fait de légers progrès.
Du mieux à la campagne
mais l’air reste chargé
Depuis
sa prise de fonction, en 2004, le ministre de
l’Environnement, Magued Georges, se montre déterminé à
éradiquer le phénomène du nuage noir, qui apparaît chaque
automne au-dessus du Caire, à cause de l’incinération en
plein air des déchets agricoles. L’affaire est sérieuse.
N’est-ce pas ce même nuage noir qui a coûté à Mme Nadia
Makram Ebeid son poste de première femme ministre de
l’Environnement ?
Force est de constater que Magued Georges ne ménage pas ses
efforts tout en se montrant réaliste puisqu’en 2005, il a
déclaré que la disparition quasi totale du phénomène
n’interviendrait pas avant 2010.
Ainsi, durant le mois de septembre, le ministre a-t-il fait
plusieurs déplacements dans les gouvernorats cultivateurs de
riz (Charqiya, Qalioubiya, Daqahliya et Gharbiya) pour y
inaugurer des usines de recyclage de déchets agricoles et
livrer des compresseurs de paille de riz à des jeunes
porteurs de projets de recyclage de ces déchets.
Dans le gouvernorat de Charqiya, le ministre a visité les
deux usines de recyclage créées par l’Organisme arabe de
l’industrialisation afin de transformer les déchets
agricoles en engrais biologiques. Ces deux unités ont une
capacité de recyclage de 300 000 tonnes de paille par an et
permettront la création de 300 emplois. « Avec
l’installation des usines d’Al-Khattara et d’Al-Qorein,
l’Organisme arabe de l’industrialisation vise à soutenir le
plan du ministère de l’Environnement et à faire d’une pierre
deux coups : résoudre le problème de l’incinération en plein
air des déchets agricoles qui conduit à une dégradation
sanitaire et environnementale, et profiter des 30 millions
de tonnes de déchets agricoles (dont 3,5 millions de tonnes
de paille de riz), produites chaque année en les recyclant
et réalisant des bénéfices », explique Nabil Anouar, PDG de
l’usine d’Al-Qorein.
Pour sa part, Magued Georges a indiqué que ces deux usines
de recyclage répondent aux critères internationaux les plus
modernes. Elles occupent une superficie de 60 feddans et le
coût de leur installation a dépassé les 15 millions de L.E.
« Ces usines peuvent produire 160 000 tonnes d’engrais
organiques par an, et ce en transformant la paille qui
alimente le phénomène du smog quand elle est incinérée en
plein air, en une production utile à rendements économiques
importants », affirme Georges.
Le gouvernorat de Qalioubiya a également témoigné d’une
visite du ministre pour fournir aux jeunes du gouvernorat 50
nouveaux compresseurs. Enfin, dans le gouvernorat de
Daqahliya, toujours au mois de septembre, le ministre a
inauguré deux nouvelles usines de recyclage d’une capacité
annuelle de 300 000 tonnes de paille et ce toujours pour
produire des engrais organiques. Les usines de Daqahliya
s’étendent sur 100 feddans et elles ont coûté 20 millions de
L.E. Une étude est, par ailleurs, en cours de réalisation
pour installer d’autres usines similaires au sud du
gouvernorat, à Mit Ghamr et Sinbellawin. Dans le gouvernorat
de Gharbiya, et en coopération avec le Conseil national des
jeunes, ce sont 100 compresseurs qui ont été livrés.
Respect des législations
Malgré cette action importante de Magued Georges, les
chiffres démontrent que beaucoup reste encore à faire. Selon
une étude du ministère de l’Environnement lui-même, les 4
nouvelles usines ne peuvent traiter que 600 000 tonnes de
paille par an. Ajoutées à une cinquième usine déjà existante
d’une capacité de 150 000 tonnes de paille de riz par an, la
quantité recyclée chaque année ne peut dépasser le million
de tonnes sur un total de 3,5 de tonnes de paille produite
par an. C’est-à-dire que moins d’un tiers de la production
sera incinéré. Pour un coût très important. Selon le Dr
Essam Al-Hennawi, expert au Centre national des recherches,
« l’Etat dépense chaque année 5 milliards de L.E. à cause de
la pollution de l’air ». Magued Georges avait, de son côté,
annoncé en 2005 que sa politique d’amélioration de la
qualité de l’air coûterait sur 5 ans la bagatelle de 30
milliards de L.E.
C’est pourquoi, malgré les efforts sur le terrain, un
important travail reste à faire sur le respect des
législations pour réduire davantage les nuisances. Car la
responsabilité de la pollution de l’air se partage entre
plusieurs ministères : Industrie, Pétrole, Intérieur. Et le
Dr Hennawi estime qu’une application stricte et sévère des
législations pourra aboutir à des résultats satisfaisants et
immédiats. « Les législations existantes sont bafouées. Je
me demande ce qui est le plus important : vérifier que les
automobilistes portent bien leur ceinture de sécurité, ou se
montrer très sévère en ce qui concerne les émissions de gaz
d’échappement ? Je crois qu’on s’intéresse surtout à la
première question », déplore le Dr Hennawi. Mais l’absence
d’application stricte des législations concerne tous les
domaines en Egypte. Et c’est à ce niveau-là qu’il faut agir
pour obtenir d’amples et concrètes améliorations, au-delà de
la pollution de l’air.
Dalia
Abdel-Salam