Guinée .
Les discussions entre le gouvernement et les responsables
syndicaux ont abouti à un accord mettant fin à la grève
générale qui a paralysé le pays pendant 18 jours.
Fin de crise
Après
une semaine de négociations, syndicats et autorités ont
signé un accord répondant à plusieurs revendications des
grévistes, ouvrant la voie à un dénouement de la crise
politique en Guinée. Le pays a, en effet, connu 18 jours de
grève générale paralysant totalement le pays et provoquant
la mort de 59 personnes.
Cette grève a pris fin à la suite de la conclusion d’un
accord entre les principaux dirigeants syndicaux et des
membres du bureau de l’Assemblée nationale, du Conseil
économique et social et de la Cour suprême, plusieurs
ministres ainsi que des responsables religieux y ont pris
part. Cet accord prévoit des mesures sociales et la mise en
place d’un gouvernement de large consensus, dirigé par un
premier ministre chef du gouvernement, fonction jusqu’à
présent dévolue au président. « Nous déclarons la suspension
de la grève générale illimitée lancée le 10 janvier. Les
travailleurs et travailleuses de Guinée des secteurs public,
privé et informel sont priés de reprendre le travail à
partir du samedi 27 janvier », a déclaré Ibrahima Fofana,
secrétaire général de l’Union Syndicale des Travailleurs de
Guinée (USTG), une des deux centrales à l’origine du
mouvement.
Cependant, le futur premier ministre, dont la nomination
interviendra dans les prochains jours, doit être « un haut
cadre civil, compétent, intègre, et qui n’a été impliqué ni
de près ni de loin dans des malversations. Un patriote qui
aime la Guinée et soit prêt à la servir », a précisé Fofana.
Mais aucun détail n’a été déclaré sur le mode de désignation
du chef du gouvernement, qui revient au chef de l’Etat selon
la Constitution. Aucun nom ne semblait faire l’unanimité
parmi les négociateurs.
Avec l’opposition et la société civile
La création d’un poste de premier ministre était l’une des
principales revendications des grévistes qui voulaient la
réduction des pouvoirs du chef de l’Etat Lansané Conté, au
pouvoir depuis 23 ans et atteint par la maladie. « C’est la
troisième grève générale dans ce pays en moins d’un an, mais
cette fois la grève a réalisé ses buts parce qu’elle est
organisée avec l’appui des partis d’opposition et de la
société civile », explique Sayed Feleifal, analyste au
Centre d’études africaines de l’Université du Caire.
Avec ce premier ministre aux pouvoirs élargis, les syndicats
veulent mettre un terme à la mauvaise gouvernance et sortir
enfin de la crise économique et sociale qui accable la
population depuis plusieurs années.
Les syndicats ont aussi obtenu que la procédure visant
Mamadou Sylla et Fodé Soumah, deux proches du président,
inculpés de détournement de fonds publics et libérés sur
ordre de Conté mi-décembre, soit « poursuivie sans aucune
entrave ». En outre, les syndicats ont demandé la libération
de toutes les personnes arrêtées dans le cadre des
manifestations et la mise en place d’une commission
d’enquête pour retrouver et sanctionner les auteurs
d’exactions.
Sur le plan économique, l’accord stipule que les salaires de
janvier des agents de tous les secteurs public, mixte et
privé seront intégralement payés. De plus, il prévoit la
réduction du prix du carburant à la pompe, l’arrêt immédiat
des exportations des denrées alimentaires et des produits
halieutiques et forestiers jusqu’en décembre 2007, le
relèvement des pensions de retraite et la réduction du prix
du riz.
Les syndicats avaient exigé dans leur préavis de grève des
garanties en matière de séparation des pouvoirs, dans le
cadre de la lutte contre la corruption et l’amélioration des
conditions de vie des travailleurs guinéens. Ils ont obtenu
gain de cause, puisque l’accord signé par les parties
contient un volet judiciaire prévoyant le « strict respect »
de la séparation des pouvoirs.
Les grévistes ont également exigé la réparation pour les
dégâts occasionnés par un raid des forces de l’ordre à la
Bourse du travail, qui abrite le siège de la Confédération
Nationale des Travailleurs de Guinée (CNTG). Les deux
parties ont d’autres questions sociales, comme la baisse du
pouvoir d’achat et la stabilisation de la monnaie. « Le
mouvement syndical continuera à jouer son rôle de
surveillance de la bonne gouvernance en Guinée », a expliqué
Fofana.
Les deux centrales syndicales, la CNTG et l’USTG, avaient
initialement lancé le mouvement pour protester contre la
baisse du pouvoir d’achat, la corruption et l’ingérence du
chef de l’Etat dans les affaires judiciaires. Face à
l’intransigeance du pouvoir, la grève s’était
progressivement radicalisée mais la situation s’est apaisée
sur le terrain depuis la répression des manifestations du 22
janvier et le début des pourparlers.
Maha
Salem