Réserve Naturelle .
Riche d’un écosystème diversifié et de vestiges
préhistoriques, Gilf al-kébir est désormais un site protégé.
Cependant, des doutes sont émis sur la capacité des
autorités à gérer cette nouvelle entité.
Plateau sous les projecteurs
Gilf
al-kébir (le grand plateau noir). Tel est le nom donné à la
nouvelle et 26e réserve naturelle d’Egypte, relevant du
gouvernorat de la Nouvelle Vallée (environ 750 kilomètres au
sud-ouest du Caire). L’arrêté du premier ministre égyptien
Ahmad Nazif (numéro 10 pour l’année 2007) a été pris le 4
janvier. Gilf al-kébir est située dans l’extrême
partie sud-ouest de la Nouvelle Vallée, aux frontières de la
Libye et du Soudan. D’une superficie de 44 kilomètres
carrés, cette nouvelle réserve est la plus grande du pays. «
Cette nouvelle réserve naturelle est d’une grande importance
car la région doit être exploitée raisonnablement afin de
protéger ses ressources. Or, les touristes en abusent,
jetant de l’eau sur les peintures préhistoriques pour
qu’elles apparaissent mieux sur leurs photos. Maintenant des
sanctions pourront êtres prises », assure Samer Al-Moufti,
ancien directeur général du Centre de Recherches du Désert (CRD)
et actuel vice-président de l’association égyptienne
Amoureux des réserves naturelles.
Cependant, on s’interroge sur la capacité de l’Agence
Egyptienne pour les Affaires de l’Environnement (AEAE) de
gérer cette nouvelle entité. Et cela pour plusieurs raisons.
« Les réserves naturelles éloignées du Caire souffrent de
mauvaise gestion à cause d’un manque critique d’équipements
et de personnel expérimenté sur le terrain », déplore
Al-Moufti. D’autant plus que le plan de protection et de
conservation n’a pas encore été déclaré. « Nous avons juste
établi les grandes lignes d’une gestion à venir pour cette
réserve. Nous proposons de considérer Gilf al-Kébir en tant
que parc national, conformément aux critères de l’Union
mondiale de la nature. Cela veut dire créer un musée et un
centre environnemental pour sensibiliser les habitants des
oasis de la région (Dakhla, Kharga et Farafra). Il s’agit
aussi de surveiller les safaris et de faire participer les
habitants à la gestion de la réserve », explique Ahmad
Salama, géologue au sein de l’AEAE. Salama est également
l’auteur du rapport soumis au Conseil des ministres
exhortant le premier ministre à créer cette réserve
naturelle, le lieu abritant des richesses culturelles et
archéologiques ainsi qu’une diversité biologique.
Peintures rupestres
S’il vient d’être déclaré réserve naturelle, le site de Gilf
al-kébir est en fait bien connu des touristes avisés.
Précisément, depuis qu’il a été découvert au début du siècle
dernier par le voyageur égyptien Ahmad Hassanein pacha.
C’est d’ailleurs ce dernier qui lui a donné son nom. « Il
s’agit d’une région de volcans qui remonte à des millions
d’années. C’est la raison pour laquelle le plateau et ses
reliefs géographiques ont une couleur sombre », explique
Salama. On y trouve le mont Owaynat, formé de rochers
graniteux (rochers magmatiques durs, formés de cristaux de
feldspath, de quartz, et de mica), partie d’une chaîne de
montagnes qui va de la Lybie au Soudan. En Egypte, cette
chaîne atteint jusqu’à 1 943 mètres. Gilf al-kébir
possède aussi la vallée Sourra, riche de peintures rupestres
de girafes et d’autres animaux ressemblant à des lions sans
tête, et des vestiges datés du néolithique. C’est une
immense vallée fluviale qui contient également la fameuse
grotte des nageurs.
Plus récemment, en 2002, un voyageur et chercheur a
découvert une nouvelle grotte et lui a donné son nom, «
Mestikawi ». De 16 mètres de long et 7 de hauteur, elle
contient près de 2 000 peintures des premiers hommes ayant
habité ce désert. « Cette région possède aussi une des plus
importantes vallées, à savoir, la vallée Abdel-Malek, dotée
d’une riche diversité biologique, géologique et naturelle »,
indique Salama. Les études des géologues de l’AEAE en
coopération avec leurs homologues allemands ont prouvé la
présence de silice vitreuse de couleur blanche, noire et
verte, remontant à près de 28 millions d’années, à 50
kilomètres de la frontière égypto-lybienne.
L’AEAE a donc un défi de taille à relever. « Et les bases de
la stratégie doivent être scientifiques pour la protection
de l’environnement », assure Tareq Qanawaty, directeur du
Désert blanc, réserve naturelle située également dans la
Nouvelle Vallée .
Racha
Hanafi