Israël ne semble pas avoir tiré les
leçons du passé et s’apprête à commettre une nouvelle erreur
lourde de conséquences au Liban. Incapable d’arrêter les
roquettes du Hezbollah, l’Etat hébreu, qui ne veut pas
sortir les mains vides de son aventure meurtrière au pays du
Cèdre, est décidé à rétablir une « zone de sécurité » de
plusieurs kilomètres au sud de ce pays comme celle qui
existait il y a six ans, avec le déploiement d’une dizaine
de milliers de soldats, en attendant l’arrivée d’une force
internationale dans ce secteur.
La création évoquée par Israël de cette «
zone » et le déploiement envisagé d’une force internationale
rappellent deux initiatives mises en œuvre au Liban dans le
passé, avec des conséquences dramatiques. De 1985 à 2000,
Israël a occupé au Sud-Liban une « zone de sécurité » de 850
km carrés, combattue sans merci par le Hezbollah que l’Etat
hébreu veut éliminer aujourd’hui. L’armée israélienne a été
contrainte de la quitter après une longue guerre d’usure. La
nouvelle « zone » envisagée par Israël ne prévoit pas de
positions fixes, ni la présence d’une milice locale
auxiliaire, comme ce fut le cas avec l’Armée du Sud-Liban (ALS).
Elle conçoit plutôt un « cordon sanitaire », de cinq à six
kilomètres de large, vidé de sa population, où les
Israéliens tireront sur tout intrus. Une idée qui
n’apportera sûrement pas la paix à Israël. Au contraire,
elle renforcera la résistance libanaise contre cette
nouvelle occupation d’une partie du Sud-Liban : des
accrochages quotidiens le long de cette « nouvelle »
frontière sont probables, des tirs de roquettes ou de
missiles sur Israël sont également possibles au-dessus de la
« zone de sécurité ». Pour éviter justement ce genre
d’incidents, les Etats-Unis et Israël veulent que se déploie
dans cette « zone » une force multinationale puissante
capable par les armes de les empêcher. Cette force, si elle
se matérialise, sera ainsi considérée par les Libanais comme
une « force d’occupation » à la solde de l’Etat hébreu. Tout
le monde se souvient de l’expérience tragique de la Force
multinationale de 1982 et 1983, et qui était composée
d’Américains, de Français et d’Italiens. En octobre 1983,
241 militaires américains et 58 légionnaires français
avaient été tués lorsque des camions piégés, conduits par
des kamikazes, ont explosé dans leurs campements à Beyrouth.
C’est pour ces raisons que le gouvernement libanais s’oppose
à cette idée et préfère un renforcement de la Finul, qui
aiderait l’armée libanaise à se déployer jusqu’à la
frontière internationale et à ramener chez eux des dizaines
de milliers de Libanais chassés des villages frontaliers,
qu’il faudra reconstruire.