Comment
promouvoir la paix entre Israël et les pays arabes
? C’est la question qui préoccupe souvent les Etats-Unis.
Une réponse a été de promouvoir les rapports économiques
entre la Jordanie, l’Egypte d’une part et Israël,
d’autre part, en signant des accords de zones de
libre-échange (QIZ). Grâce à ces accords, certaines
industries jordaniennes depuis 2001 et égyptiennes
depuis 2005 ont eu accès sans douanes au marché
américain. Condition : que la production contienne
à peu près 11 % de composants israéliens.
«
Il s’agit de la plus importante percée économique
depuis la signature du traité de paix entre Israël
et l’Egypte à la fin des années 1970 », ainsi a
affirmé une source israélienne lors de la signature
du QIZ en décembre 2004. Mais le résultat pour l’Egypte
jusqu’à lors est toujours modeste. Les exportations
égyptiennes vers les Etats-Unis ont enregistré un
taux de croissance de 5,9 % seulement en 2005, passant
de 463 millions de dollars en 2004 à 491 millions
de dollars en 2006. En plus, les nouveaux investissements
installés en Egypte grâce au QIZ n’ont pas dépassé
les 27,9 millions de dollars selon des sources au
ministre de l’Industrie et du Commerce extérieur.
L’accord
a, toutefois, eu un effet sur les échanges commerciaux
entre l’Egypte et Israël. Les exportations israéliennes
vers l’Egypte sont passées de 22,6 en 2004 à 64,7
millions de dollars en 2005. Quant aux exportations
égyptiennes, elles n’ont fait qu’un petit bond de
27,9 millions de dollars à 35 millions de dollars
durant la même période. Il est clair que la partie
Israélienne a tiré le plus de profits de cet accord
par rapport à l’Egypte. De toute façon, le QIZ n’a
pas réussi à créer une coopération significative
entre les deux pays. L’objectif américain est ainsi
loin d’être atteint.
L’expérience
jordanienne du QIZ largement citée en exemple par
le camp des supporters du QIZ est entré dans la
phase de démystification. Selon Marawan Kadoush,
chercheur au Centre jordanien des études des politiques
publiques, l’industrie développée en Jordanie grâce
au QIZ se limite à l’assemblage. Sa valeur ajoutée
est maigre. Marawan maintient que le QIZ n’a pas
réussi à enrichir l’industrie jordanienne.
L’expérience
en Egypte connaîtra-t-elle le même sort ? Ali Aouni,
responsable du dossier du QIZ au ministère du Commerce
extérieur n’en est sûr. Selon lui, l’Egypte fonctionnera
mieux que la Jordanie sous le QIZ. Le coût de production
en Egypte est beaucoup plus inférieur à celui de
la Jordanie et même de l’Inde. L’Egypte par conséquent
attirera plus d’investissements étrangers que la
Jordanie. En plus, l’industrie égyptienne du textile
et du prêt-à-porter a des capacités et un potentiel
plus important que la Jordanie. A cela il ajoute
le fait qu’il ne faut pas oublier que sans le QIZ,
les exportations égyptiennes de prêt-à-porter vont
chuter de par l’abolition des quotas imposés aux
exportations chinoises pour les Etats-Unis. Autrement
dit, les exportations égyptiennes du prêt-à-porter
ne jouissent plus des la protection américaine par
le biais des quotas. Maintenant, les produits égyptiens
doivent concurrencer les chinois sur le marché américain.
Exempter les exportations égyptiennes de tarifs
douaniers est la seule issue pour les exportations
égyptiennes. En bref, Aouni maintient que si le
QIZ n’a pas réussi à promouvoir l’industrie égyptienne
du prêt-à-porter, il l’a au moins sauvé du désastre.
Ce dossier reste toujours un sujet hautement politisé.
Les courants nationalistes et de gauche déclenchent
toujours des campagnes politiques contre l’accord.
Mais Gouda Abdel-Khaleq, du parti du Rassemblement
de gauche, a qualifié l’expérience de « montagne
qui a accouché d’une souris ». Il insiste en outre
sur le fait que cet accord est en contradiction
avec la Constitution, puisqu’il n’a pas été ratifié
par le Parlement. D’autant plus que la condition
imposée à l’Egypte d’importer 11 % des composants
israéliens est une atteinte au principe de libre-échange
cher aux Libéraux. Et sur ce point, il a tout à
fait raison. L’accord n’a pas été construit selon
la logique économique, mais selon une logique voulant
concrétiser des objectifs politiques par des mécanismes
économiques. Quelque chose que l’économie rejette
souvent.