Al-Ahram Hebdo, Opinion |Hassan Abou-Taleb,  Une guerre civile non déclarée en Iraq
  Président Salah Al-Ghamry
 
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 Semaine du 19 à 25 avril 2006, numéro 606

 

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Opinion

 Une guerre civile non déclarée en Iraq
Hassan Abou-Taleb
Directeur de rédaction des Dossiers stratégiques

Jour après jour, la situation en Iraq se détériore de plus en plus. La sécurité dans son sens le plus simple est devenue un rêve lointain pour les Iraqiens. Les hommes politiques restent en discorde à propos de la formation du gouvernement, et les personnalités religieuses éminentes sunnites et chiites appellent au calme, mais en vain. Quant à l’occupation américaine, elle connaît une double impasse : elle ne peut ni imposer un gouvernement ni contrôler la révolte militaire et la violence de la résistance. De plus, il n’y a pas de vision claire pour ce qui est du retrait ou de la poursuite de l’occupation.

Ces indices politiques expliquent en partie les causes de la détérioration sécuritaire croissante et expliquent aussi l’état de paralysie politique qui touche le processus d’entente entre les blocs parlementaires, empêchant la formation d’un gouvernement. Chose qui aurait dû être faite il y a 2 mois. Il semble aussi que le problème de la désignation du premier ministre ne sera pas tranchée avant longtemps. En effet, Ibrahim Al-Jaafari, le candidat de la coalition chiite, n’est pas accepté par les 2 blocs sunnite et kurde. Cependant, il insiste à être chef du nouveau gouvernement. Certains membres importants de son parti font allusion au fait que si Al-Jaafari ne devient pas premier ministre, ils s’opposeront aux candidatures des autres blocs que ce soit à la présidence de l’Etat ou au Parlement. Du côté formel, la question semble être étroitement liée aux équilibres démocratiques et au jeu des chiffres à l’intérieur du Parlement. Mais du côté objectif, il est question de réserves importantes chez les sunnites et les Kurdes concerna la méthode d’Al-Jaafari dans le gouvernement précédent. Et même des membres de la coalition chiite commencent à assimiler le degré de l’impasse que vit l’Iraq. Des voix audacieuses se sont alors fait entendre à l’intérieur de la coalition, appelant à la proposition d’un autre candidat qui serait accepté par tous.

De plus, d’autres voix chiites invitent l’ayatollah Al-Sistani considéré comme une référence chiite à trancher lui-même la question. Mais il semble que ce dernier préfère s’abstenir d’intervenir directement dans les affaires politiques. Et un troisième groupe appelle à laisser la question au vote qui sera effectué par le Parlement élu. Il est vraiment paradoxal qu’amener une entente politique entre les blocs parlementaires iraqiens semble être une mission tellement difficile pour l’occupant malgré son influence et son hégémonie. Exactement comme c’est le cas pour la sécurité, réduisant à néant le rêve de nombreux Iraqiens de voir s’instaurer une démocratie exemplaire.

Il faut ici dire que la crise d’Al-Jaafari, et par conséquent du poste de premier ministre et ses prérogatives, concerne la vision politique quant à l’avenir de l’Iraq et la gestion de l’Etat, de ses appareils et de ses relations étrangères pendant les 4 années à venir. Et pendant qu’Al-Jaafari présidait le gouvernement de transition, il avait des alignements politiques inacceptables sur les autres blocs parlementaires. Et pour ce qui est de sa méthode de travail qui s’est révélée être basée sur des principes de confession et d’ethnie et non des principes nationaux, au lieu de défendre l’idée de former une armée iraqienne unie et des services de sécurité où fusionneraient ensemble toutes les couches du peuple iraqien, Al-Jaafari défend le rôle des milices chiites paramilitaires à l’écart du pouvoir de l’Etat.

Pour ce qui est de la sécurité, Al-Jaafari a totalement échoué. Autre insuccès : aucun progrès positif en ce qui concerne les dossiers des services et de l’économie n’a été réalisé. Les preuves ne sont pas difficiles à détecter. Aucun jour ne passe sans qu’on entende des nouvelles autour de kidnapping, d’assassinat, d’explosion ou de fosses communes dont les uniques victimes sont des citoyens qui n’ont rien à voir avec ce qui se passe entre les hommes politiques.

Tout au long de la période de présidence du gouvernement transitoire, le pouvoir iranien était omniprésent dans de larges régions dans le sud et le centre du pays. Un des chefs de la coalition chiite, Abdel-Aziz Al-Hakim a alors appelé à un dialogue irano-américain pour parvenir à une solution en ce qui concerne la sécurité. Cette invitation qui a été favorablement accueillie par l’occupant prouve que ce sont les Iraniens et non les Iraqiens qui détiennent les clés du dossier de la sécurité, malgré les 130 000 soldats qui possèdent les armes les plus sophistiquées au monde. Et il va de soi que la question de la sécurité n’est pas entre les mains des Iraqiens qui s’entretuent pour des raisons confessionnelles et ethniques.

Les rapports qui parlent d’une influence iranienne en matière de services de renseignements secrets peuvent être exagérés. Mais cette hypothèse peut être partiellement vraie. Une autre information s’est fait entendre selon laquelle la nationalité iraqienne serait octroyée à 700 000 ou plus d’Iraniens ou de personnes nées en Iran. Tout ceci aura une influence majeure sur l’équilibre démographique dans des régions où la plupart des habitants sont sunnites. Par conséquent, l’influence de ces plans sur la sécurité sera très négative.

De nombreuses questions sont suscitées autour de l’identité de ceux qui portent l’uniforme de la police iraqienne formée après l’invasion. Ceux-ci utilisent les armes de la police contre des Iraqiens qui sont tous des sunnites qui sont enlevés, torturés, tués et enterrés dans des fosses communes. Des questions sont aussi posées en ce qui concerne l’identité de ceux qui attaquent les mosquées et les cadres sunnites. Toutes ces questions restent sans réponses officielles ni même une enquête tentant de découvrir l’identité de ces fantômes. Ce scénario noir continue toujours et rien ne prévoit une quelconque détente que le gouvernement soit formé ou non.

Quant à la réaction du côté sunnite et du côté des groupes religieux aux violences anti-chiites, il est prévu qu’elle sera alignée sur les mêmes principes ethniques et confessionnels. Ce qui promet de pousser l’Iraq vers une guerre civile féroce. Des Iraqiens prétendent qu’il est simplement question de règlement de comptes ou d’actes commis par des forces sataniques qui visent à détruire l’Iraq, ou des partisans de Zarqaoui et du réseau d’Al-Qaëda. Or, Iyad Allaoui, le président de la liste iraqienne aux 25 sièges parlementaires, a déclaré : « Si ce qui se passe en Iraq n’est pas une guerre civile, qu’est-ce que vous appelez guerre civile ? ». Cette question semble répondre à elle-même.

Il est ici vrai que le fait d’accuser Ibrahim Al-Jaafari de haute trahison semble être stupide. Il est l’un des symboles de la lutte iraqienne contre la dictature du régime de Saddam. Or, il est aussi vrai que la mauvaise gestion et l’encouragement des conflits ethniques mènent à des conséquences catastrophiques, en particulier dans les moments de grandes mutations, comme c’est le cas maintenant en Iraq. Les bonnes intentions et les précédents sacrifices ne suffisent pas à construire un nouvel Iraq sur des principes nationaux et d’unité.

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