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Palestine
. Alors que le président
Mahmoud Abbass tente d’infléchir les positions du Hamas sur
le processus de paix, Israël accentue ses contraintes économiques
sur le mouvement islamiste.
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Le
Hamas sous pression |
Le
président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbass, a inauguré
samedi le nouveau Conseil Législatif Palestinien (CLP, Parlement),
dominé pour la première fois par le mouvement de la résistance
islamique, le Hamas. L’entrée en fonction du CLP ouvre une
ère de cohabitation sans précédent entre un président de l’Autorité
palestinienne issu du Fatah (ancien parti au pouvoir) et un
Parlement et un gouvernement du Hamas. Un gouvernement de
« coalition nationale », selon la volonté du Hamas. Mais,
cette coalition n’est pas aussi facile qu’on le croit du fait
de la différence idéologique des deux mouvements.
Une
différence soulignée d’entrée par Abbass dans son discours
inaugural, où il a indiqué que « la présidence de l’Autorité
palestinienne et le gouvernement resteront attachés à la négociation
avec Israël comme option stratégique réaliste. Une gestion
sérieuse et sage de ces négociations nous permettra de réaliser
nos aspirations nationales ». S’exprimant après la prestation
collective de serment des députés du nouveau Parlement, le
président de l’Autorité palestinienne a annoncé qu’il chargerait
le Hamas, qui a obtenu 74 des 132 sièges du Parlement au scrutin
du 25 janvier dernier, de former le prochain gouvernement.
« Notre conflit n’a pas de solution militaire. Seules des
négociations entre partenaires égaux sont susceptibles de
mettre fin au cycle des violences que nous connaissons »,
a-t-il dit en dénonçant « l’approche unilatérale » d’Israël.
M. Abbass a également appelé au respect des accords passés
avec Israël, notamment l’accord dit d’Oslo de 1993 sur l’autonomie
palestinienne et la Feuille de route, le dernier plan de paix
international qui prévoit la création d’un Etat palestinien.
Il
a aussi promis d’œuvrer de concert avec un gouvernement Hamas
pour mettre fin au chaos des armes et à l’anarchie sécuritaire
en Cisjordanie et à Gaza. Il a souligné que les services de
sécurité doivent avoir le monopole des armes, appelant implicitement
les groupes armés, comme le Hamas, à désarmer.
Le
chef de file du Hamas que le mouvement a choisi comme premier
ministre, Ismaïl Haniyeh, a réagi au discours de M. Abbass
en faisant état de « divergences politiques qui seront résolues
par le dialogue » entre son mouvement et le leader palestinien.
Le Hamas prône pour sa part la lutte armée pour libérer les
territoires palestiniens occupés par Israël, dont il ne reconnaît
pas l’existence.
Un
autre chef du Hamas, Mahmoud Zahar, a estimé que la position
exprimée par M. Abbass ne pouvait être appliquée. « Il voit
la partie israélienne comme un partenaire, alors qu’Israël
dit ne pas avoir de partenaire chez les Palestiniens. Par
conséquent, je ne pense pas que la position exprimée par Abou-Mazen
puisse être appliquée », a-t-il dit. Il a affirmé que les
accords déjà signés, dont a parlé M. Abbass, n’avaient « aucune
chance d’être appliqués puisque l’ennemi israélien ne les
respecte pas ». Néanmoins, il a insisté sur le fait que le
programme du Hamas soit en accord avec Abou-Mazen.
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Mesures répressives
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Réagissant
à la prochaine formation d’un gouvernement dominé par le Hamas,
Israël a pris dimanche une série de sanctions contre l’Autorité
palestinienne. Il a décidé de geler dès début mars le transfert
mensuel d’environ 50 millions de dollars de fonds correspondant
au remboursement des droits de douane et de TVA qu’il prélève
sur les produits destinés aux territoires palestiniens. Ces
fonds représentent environ 30 % du budget de l’Autorité palestinienne
et assurent notamment la paye de 140 000 fonctionnaires, dont
environ 60 000 policiers et membres des services de sécurité.
En
outre, Israël a appelé la communauté internationale à stopper
toute aide à l’Autorité palestinienne, hormis l’assistance humanitaire
à la population dont il est possible de vérifier qu’elle n’est
pas détournée au profit d’organisations qu’il qualifie de «
terroristes ».
Le
cabinet n’a en revanche pas décidé pour le moment d’interdire
aux Palestiniens de venir travailler en Israël. Mais les contrôles
de sécurité qui seront exercés seront beaucoup plus serrés,
ce qui devrait réduire le nombre de Palestiniens qui pourront
venir gagner leur vie en Israël, a poursuivi la radio. Actuellement,
15 000 Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza disposent
d’un permis de travail pour venir gagner leur vie en territoire
israélien. Sur ce total, 5 000 venaient travailler ces derniers
mois en raison notamment de bouclages imposés par intermittence.
Auparavant,
le premier ministre par intérim, Ehud Olmert, avait proclamé
que l’Autorité palestinienne dirigée par le Hamas était de facto
devenue une « Autorité terroriste » et qu’Israël ne l’accepterait
pas. « Israël ne mènera pas de contacts avec un pouvoir dont
le Hamas est partie prenante, que se soit de façon limitée ou
déterminante », a prévenu le premier ministre par intérim.
Outre
Israël, les Etats-Unis exercent eux aussi des pressions sur
les Palestiniens et ce en demandant à l’Autorité palestinienne
de leur rendre une somme d’un montant de 50 millions de dollars
de crainte qu’elle ne soit exploitée pour financer des activités
terroristes. L’Autorité palestinienne affronte une grave crise
financière après la réduction des transferts d’argent après
la victoire du Hamas.
La
décision de sanctionner l’Autorité palestinienne a été critiquée
par un porte-parole palestinien aussi bien que par le Hamas.
De son côté, Nabil Abou-Roudeina, le porte-parole du président
de l’Autorité palestinienne, a déclaré que la décision du gouvernement
israélien nuirait aux efforts pour maintenir la trêve (des attaques
anti-israéliennes de la part des groupes armés palestiniens),
et dit qu’elle était prématurée, le nouveau gouvernement n’ayant
pas été mis en place. « La décision prise aujourd’hui est destinée
à faire plier le peuple palestinien et soumettre sa volonté
en pervertissant son choix démocratique », a déclaré Ismaïl
Haniyeh. « Cette décision ne nous intimidera pas. Nous avons
fait face à tous les défis par le passé et nous y ferons face
à l’avenir », a-t-il ajouté.
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Rania
Adel |
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