A l’heure où la diplomatie américaine, le
président George W. Bush en tête, tente de reprendre
l’initiative au Proche-Orient, la crise au Liban vient
rappeler que ce pays reste plus que jamais un théâtre de
conflit entre les camps pro et anti-occidentaux.
Washington, qui accumule les revers en
Iraq et sur le processus de paix israélo-palestinien,
cherche désormais à éviter une déstabilisation du Liban, un
pays sur lequel misent les Etats-Unis depuis le retrait en
avril 2005 des forces syriennes. Considéré comme devant
devenir un « modèle de démocratie » au Proche-Orient par
l’Administration Bush, le Liban — un Etat traditionnellement
faible, qui repose sur l’équilibre fragile entre ses
communautés religieuses — est aujourd’hui tiraillé entre des
forces contraires, pro et anti-occidentales. L’assassinat,
le 21 novembre dernier, du ministre chrétien de l’Industrie,
Pierre Gemayel, a exacerbé ces tensions au point que chaque
tendance politique dénonce les allégeances étrangères de son
adversaire. Les partis de la majorité — une coalition de
druzes, sunnites et chrétiens — ont accusé la Syrie de
l’assassinat. Le parti chiite Hezbollah, proche de Damas et
de Téhéran, a, pour sa part, relevé la proximité des points
de vue de cette majorité et des responsables israéliens.
Depuis plus d’un siècle, les conflits au
Liban ont été supervisés par des puissances étrangères et la
crise actuelle, avec son cortège d’assassinats, pousse à
nouveau les protagonistes dans les bras de leurs protecteurs
respectifs. Dans ce contexte, le Liban apparaît une fois de
plus comme le baromètre des tensions dans la région. Paris
et Washington font tout leur possible pour l’éloigner de
l’influence de Damas et Téhéran, alors que l’Iran et la
Syrie voient le Liban comme un allié. Vu de Téhéran, le pays
du Cèdre offre un relais aux ambitions régionales de l’Iran,
notamment en raison de l’importance de sa communauté chiite,
un tiers de la population. Le guide suprême iranien,
l’ayatollah Ali Khamenei, a tout récemment déclaré que le
Liban sera le « lieu de la défaite » des Etats-Unis et
d’Israël. La Syrie et l’Iran accusent la France et les
Etats-Unis d’ingérence au Liban et de vouloir y aggraver la
situation. Washington et Paris avaient, pour leur part,
accusé Téhéran, Damas et le Hezbollah de chercher à
déstabiliser le gouvernement de Fouad Siniora.
Cette bataille diplomatique trouve des
relais naturels à l’intérieur du pays entre majorité et
opposition. Elle risque surtout de faire dégénérer la crise
interne, déclenchée par la démission, le 11 novembre, de
cinq ministres chiites du Hezbollah et du mouvement Amal l