Suite
à de nombreuses tractations infructueuses, à des réunions sans
résultats et à des échanges d’accusations, les deux principales
factions palestiniennes ont pu enfin décider de mettre un terme
à leurs désaccords. Le Fatah, mouvement du président palestinien
Mahmoud Abbass, a annoncé dimanche qu’il honorerait un accord
conclu avec le Hamas, mouvement au pouvoir, en vue de mettre fin
à leurs conflits dans la bande de Gaza. « L’unité est la langue
de salut et le titre de combat (...). Elle doit être mise en
application entre tous les Palestiniens », a indiqué le Fatah
dans un tract.
Vendredi soir, les dirigeants des deux
parties rivales avaient convenu de mettre fin aux combats de rue
opposant leurs partisans dans la bande de Gaza.
Le Fatah s’est déclaré satisfait de l’accord
de trêve, qui exige notamment la protection des bâtiments
publics et le renforcement des forces de sécurité afin de
rétablir l’ordre.
Le Fatah et le Hamas étaient en conflit
depuis l’arrivée au pouvoir du groupe radical après une large
victoire aux élections législatives palestiniennes du 25 janvier
dernier. Les deux clans, réunis à Gaza, avaient décidé
d’interdire à leurs hommes de sortir armés dans les rues samedi
et de laisser à la police le soin d’organiser des patrouilles.
La lutte d’influence entre le Hamas et le
Fatah s’était intensifiée ces dernières semaines après l’échec
des deux groupes à s’entendre sur un gouvernement de coalition.
Plus de 20 Palestiniens ont été tués et des dizaines d’autres
blessés dans les conflits entre les deux camps depuis la
formation et le déploiement d’une nouvelle force dans la bande
de Gaza sur l’ordre du Hamas en avril dernier.
Selon les analystes, cette « trêve » si l’on
se permet d’employer ce mot, pourrait être de bon augure pour
une entente sur le plan politique. Conformément à un haut
responsable palestinien, le président palestinien Mahmoud Abbass
et le premier ministre du gouvernement du Hamas, Ismaïl Haniyeh,
annonceront d’ici quelques jours un accord sur la formation d’un
gouvernement d’unité nationale. S’exprimant sous le couvert de
l’anonymat, le responsable a précisé que MM. Abbass et Haniyeh
étaient parvenus à un accord au cours d’une conversation
téléphonique jeudi et qu’ils l’annonceraient d’ici quelques
jours. « Le nouvel accord soulignera l’établissement d’un
gouvernement d’unité nationale comprenant tous les partis
politiques », a révélé le responsable, ajoutant qu’une réunion
aurait bientôt lieu pour la signature du nouvel accord. « La
formation d’un gouvernement de coalition est la seule option
possible pour les Palestiniens s’ils ne veulent pas sombrer dans
une guerre civile. Personnellement, je crois qu’ils parviendront
à un compromis : qu’il y ait des pressions sur Israël pour qu’il
cesse ses actes provocateurs en échange d’une coopération entre
le Fatah et le Hamas avec le Quartette », souligne Moustapha Al-Gammal,
du Centre des études arabes et africaines.
Dans un tel cas, l’éventualité de dissoudre
le gouvernement dirigé par le Hamas et de nommer un gouvernement
de technocrates serait écartée. Mahmoud Abbass avait déjà évoqué
cette éventualité, mais avait promis de ne pas forcer la main du
Hamas en ce sens. La formation du gouvernement de coalition
était évoquée par le haut représentant de la politique étrangère
de l’Union européenne, Javier Solana, qui avait appelé les
dirigeants palestiniens à former un nouveau gouvernement afin
d’éviter une crise humanitaire, sur fond de mises en garde
contre une détérioration des conditions de vie de la population.
Les discussions sur la création d’un cabinet d’union achoppaient
sur le refus du mouvement islamiste d’accepter une plate-forme
politique modérée comprenant la reconnaissance d’Israël. Les
discussions entre le Fatah et le Hamas se heurtaient aussi au
refus du mouvement islamiste de reconnaître les accords
israélo-palestiniens passés et de renoncer à la violence.
Si un gouvernement de coalition est formé,
ceci mettra fin au boycottage politique et surtout financier
imposé au cabinet actuel depuis l’arrivée du Hamas au pouvoir.
L’Autorité palestinienne est en effet en état de cessation de
paiements.
Brin d’optimisme
La création d’un tel gouvernement pourrait
également contribuer à débloquer la situation sur d’autres
fronts, et à avancer sur la voie de la libération du soldat
israélien enlevé fin juin par des groupes armés palestiniens.
Des responsables palestiniens ont affirmé dimanche que les
négociations s’accélèrent en vue de la libération du soldat
israélien retenu à Gaza en échange de Palestiniens détenus en
Israël. « Nous sommes proches d’un accord mais il est lié à la
réponse israélienne » aux conditions posées par le Hamas, a
déclaré Oussama Hamdane, porte-parole du mouvement islamiste à
Beyrouth, joint par téléphone depuis Le Caire.
« Il y a eu des signaux positifs de la part
des Israéliens mais pas de réponse définitive. S’ils acceptent
nos conditions, l’accord sera conclu. Sinon, nous retournerons à
la case départ », a-t-il dit, sans donner de détails.
Les négociations ont jusqu’à présent achoppé
sur les modalités de la libération et sur le nombre de
Palestiniens qui seraient relâchés par Israël. Le Hamas, qui
détient depuis fin juin le soldat Gilad Shalit capturé par des
activistes palestiniens dont ceux du mouvement à la lisière de
la bande de Gaza, exige l’élargissement de 1 000 prisonniers
contre celui du soldat.
La radio militaire israélienne, citant de
hauts responsables, avait mentionné de son côté une solution
consistant à libérer le soldat Shalit, Israël s’engageant à
relâcher dans les deux mois suivants un millier de détenus. Mais
selon un haut responsable palestinien, l’Egypte, médiateur dans
cette affaire, attend actuellement une réponse du Hamas à une
autre mouture de l’accord qui prévoit la libération de 500
Palestiniens lors de la remise du soldat aux autorités
égyptiennes, suivie d’un autre groupe après son retour en Israël.
Samedi, le ministre israélien des
Infrastructures, Binyamin ben Eliezer, proche du dossier et
rentré récemment d’Egypte, où il a rencontré le président Hosni
Moubarak, s’était également montré optimiste. « Etant au fait de
tous les détails concernant cette affaire, je préfère me taire.
Je suis revenu optimiste de ma récente visite au Caire et je le
reste », avait-il déclaré à la radio militaire israélienne, tout
en notant le rôle joué par Omar Souleimane, chef des
Renseignements égyptiens.
Rania Adel