Hebdomadaire égyptien en langue française en ligne chaque mercredi

L'invité

La Une
L'événement
Le dossier
L'enquête
Nulle part ailleurs
L'invité
L'Egypte
Affaires
Finances
Le monde en bref
Points de vue
Commentaire
d'Ibrahim Nafie

Carrefour
de Mohamed Salmawy

Portrait
Littérature
Livres
Arts
Femmes
Société
Sport
Environnement
Escapades
Patrimoine
Loisirs
Echangez, écrivez
La vie mondaine
Homme politique et président de l’Institut éthiopien international pour la paix et le développement (EIIPD), Kinfe Abraham évalue les relations égypto-éthiopiennes et évoque les moyens de relancer l’Initiative des pays du Bassin du Nil (IBN).
« Il est indispensable de réévaluer les anciens accords internationaux sur le Nil »

Addis-Abeba,De nos envoyés spéciaux —
Al-Ahram Hebdo : Des divergences apparaissent de temps à autre entre l’Egypte et l’Ethiopie concernant le partage des eaux du Nil. Qu’en est-il réellement ?

Kinfe Abraham : Ce sont des polémiques médiatiques qui ne sont pas nouvelles. Elles surgissent de temps en temps délibérément, mais elles ne peuvent pas nuire aux relations bilatérales. Car il existe des relations assez anciennes et profondes entre les deux peuples égyptien et éthiopien depuis l’époque de l’empereur éthiopien Hailé Sélassié et le président égyptien Gamal Abdel-Nasser. Des relations qui ont continué également sous le règne du président Moubarak.

Mais je trouve indispensable d’ouvrir des négociations et des concertations entre les pays du bassin du Nil et de réévaluer les anciens accords internationaux, afin de discuter des possibilités de coopération et de développement pour le profit et l’intérêt de tous. En ce qui concerne l’Ethiopie, on ne peut pas nier notre besoin d’avoir plus d’eau, vu les conditions environnementales que subit notre pays ainsi que la croissance démographique qui donne lieu à de nouveaux besoins. Nous respectons tous le fait que les eaux du Nil est une question d’une importance vitale pour l’Egypte, mais si l’Egypte et le Soudan parviennent à un accord avec l’Ethiopie et l’aident à réaliser son développement dans le domaine de l’agriculture en optimisant la gestion de l’eau, ceci sera bénéfique. Il faut encourager les nouveaux projets qui cherchent à profiter de chaque goutte d’eau du Nil.

— Mais l’IBN, qui regroupe les dix pays riverains, a justement pour but de relancer la coopération entre ses pays membres pour mieux gérer et développer les ressources du fleuve, tout en maintenant les accords existants sur le partage de ses eaux. Comment jugez-vous l’action de cette initiative ?

— L’Initiative du bassin du Nil n’est, à mon avis, que le début, et nous devons nous en servir pour rouvrir tous les dossiers et pour participer à de nouveaux projets de nature à activer cette initiative. Or, on aspire à voir une coopération entre l’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie, à titre d’exemple, pour construire des barrages qui servent à produire de l’énergie et de l’électricité pour ces pays. C’est seulement à travers ce genre de projets que se réaliseront la coopération et l’intégration entre les pays du bassin. Il ne faut pas travailler tout seul. C’est une richesse qu’on doit conserver et gérer ensemble afin d’en profiter au maximum.

— Qu’en est-il de la coopération économique entre l’Egypte et l’Ethiopie, d’autant plus que les deux pays sont membres du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA) ?

— A vrai dire, nombreux sont les domaines d’investissement possible entre l’Egypte et l’Ethiopie : économie, commerce, agriculture, métallurgie. Car l’Ethiopie est riche en ressources naturelles. Pour sa part, le gouvernement éthiopien fait de son mieux pour encourager les investisseurs, surtout égyptiens, en leur fournissant des conditions et un cadre légal adéquats. Sans oublier l’accueil d’experts égyptiens dans les domaines de l’irrigation et de la santé. Cependant, je trouve nécessaire de consolider les liens médiatiques et sociaux entre les deux peuples, afin de renforcer les relations diplomatiques entre les deux pays.

— Plusieurs pays africains, dont l’Egypte, aspirent à occuper l’un des deux sièges permanents, dans le cadre de la réforme et de l’élargissement du Conseil de sécurité de l’Onu. Comment évaluez-vous les chances de l’Egypte d’avoir un siège permanent ? Et quelle est la position de l’Ethiopie ?

— Je pense que ces deux sièges au sein du Conseil de sécurité de l’Onu peuvent sans doute renforcer la présence africaine sur la scène internationale et son droit à participer à la politique internationale, et nous inviter certes à renforcer notre Union africaine. Quant à la chance de l’Egypte, je pense qu’elle peut avoir un grand appui africain et surtout éthiopien en tant que l’un des quatre Etats africains prétendants, avec la Libye, le Nigeria et l’Afrique du Sud. Mais, je crois que l’Egypte a de grandes chances d’obtenir l’un de ces deux sièges, vu sa position stratégique qui l’aide à être le lien entre les pays africains et le Moyen-Orient, en plus de son rôle politique bien important sur les deux plans arabe et africain, ce qui double sa force régionale et internationale.

— La tension persiste entre l’Ethiopie et l’Erythrée. Ce qui risque de créer une instabilité dans la région stratégique de la Corne de l’Afrique. Comment y mettre fin ?

— Le conflit actuel entre l’Ethiopie et l’Erythrée est un conflit frontalier. Le comité frontalier, qui était responsable de trancher ce problème, a négligé les documents officiels que l’Ethiopie lui a avancés et a commis beaucoup d’erreurs, ce qui a accentué la tension entre les deux pays, et nous a poussés en tant qu’Ethiopiens à refuser ses décisions. De son côté, l’Erythrée, qui a accepté les décisions de ce comité, ne les a pas respectées et n’a pas quitté les territoires éthiopiens qu’elle occupe toujours.

Nous souhaitons mettre fin à ce litige tout en conservant nos droits. Il y a trois principes qui nous sont indispensables pour poursuivre les négociations avec le côté érythréen : respecter la gestion éthiopienne des régions contestées, respecter les accords et les traités internationaux portant sur ce litige et régler l’affaire dans le cadre de la loi internationale. Le premier ministre éthiopien, Mélès Zenawi, a lancé en novembre 2004 une initiative de paix visant à mettre fin à ce conflit, prouvant que l’Ethiopie tient toujours à une solution pacifique, surtout avec l’aide et la médiation de l’Union africaine et de plusieurs pays européens.

— Dans le cadre de ces médiations, quel rôle préconisez-vous pour l’Egypte ?

— Vu ses bonnes relations bien équilibrées avec les deux parties en conflit, l’Egypte peut avoir sans doute un rôle assez important. Nous respectons toute médiation et nous insistons toujours à dire que nos troupes sur les frontières sont seulement là pour assurer la sécurité et non pas pour faire la guerre. Le peuple éthiopien ne veut plus de violence et souhaite vivre en paix.

— L’Ethiopie s’apprête à tenir ses élections législatives le mois prochain. Comment voyez-vous les enjeux de ce scrutin ?

— La campagne des élections a commencé en Ethiopie, et tous les partis vont y participer. Il y a plus de 60 partis politiques qui cherchent à avoir une place dans le nouveau gouvernement. La campagne électorale était une occasion pour soulever plusieurs problèmes, tels que le développement, l’enseignement, la santé, l’explosion démographique et la propriété des terres arables. Le gouvernement possède encore les terres, alors que beaucoup de citoyens réclament leur droit à posséder les terrains qu’ils cultivent. Toutefois, ce système de la propriété de l’Etat ne vise pas le maintien d’un état d’hégémonie, mais l’expansion des terres agricoles, vu que le gouvernement éthiopien essaie d’éviter un exode rural probable au cas où les citoyens auraient le droit de vendre les terres. Une telle éventualité aura un impact négatif sur l’agriculture, qui représente le secteur économique le plus important de l’Ethiopie. Partant, le gouvernement veille à maintenir ce système afin d’obliger les gens à être plus liés à leurs terres. Une situation refusée et critiquée par certains partis de l’opposition .

Propos recueillis par
Achraf Aboul-Hol
Mokhtar Choëb
Yasser Moheb
 

Pour les problèmes techniques contactez le webmaster

Adresse postale: Journal Al-Ahram Hebdo
Rue Al-Gaala, Le Caire - Egypte
Tél: (+202) 57 86 100
Fax: (+202) 57 82 631