Confronté
à une crise politique depuis l’assassinat de l’ancien premier
ministre Rafiq Hariri, le Liban tente tant bien que mal d’éviter
que cette crise n’engendre un engrenage qui mettrait à mal la
sécurité du pays. La désignation de l’homme d’affaires pro-syrien
Najib Miqati au poste de premier ministre laisse espérer une
résolution de la crise politique. Toutefois, plusieurs problèmes
demeurent pour la tenue des législatives fin mai. C’est en effet
la tenue de ces élections à la date prévue qui constitue désormais
la nouvelle bataille de l’opposition.
Miqati,
dont la nomination a eu lieu avec l’aval de l’Arabie saoudite
et de la France, a indiqué à la presse qu’il penchait pour la
formation d’un gouvernement restreint capable d’organiser des
élections législatives le plus tôt possible, mais que la forme
du gouvernement dépendait de l’aval des blocs parlementaires.
De son côté, la députée Bahia Hariri, sœur de l’ancien premier
ministre assassiné Rafiq Hariri, a déclaré que l’opposition
« a préféré œuvrer à une solution de compromis pour empêcher
une grave crise constitutionnelle ». Alors que la députée d’opposition
Nayla Moawad a reconnu que « l’opposition a sacrifié une partie
de ses intérêts pour aboutir à une solution dans l’intérêt de
l’ensemble du pays ». Le chef druze Walid Joumblatt, l’une des
principales figures de l’opposition, a de son côté confirmé
que la France et l’Arabie saoudite avaient été sondées et qu’elles
ont donné leur accord au choix de Miqati. M. Joumblatt a expliqué
que jusqu’ici, l’opposition avait refusé de participer à un
gouvernement d’union nationale ou même de nommer un candidat
pour le poste de premier ministre, affirmant qu’elle ne voulait
pas cautionner un pouvoir qu’elle accusait de porter une responsabilité
dans l’assassinat de Hariri. Mais l’opposition a dû changer
de stratégie pour accélérer la formation d’un gouvernement et
permettre la tenue des législatives dans les délais constitutionnels,
soit le 31 mai au plus tard.
Le
premier ministre désigné a entamé cette semaine ses consultations
avec les anciens chefs de gouvernement et avec les parlementaires.
Pour satisfaire l’opposition, il s’est engagé à limoger, avant
les élections, les puissants chefs des services de sécurité.
L’opposition exigeait en effet le limogeage des chefs des six
services de sécurité et du procureur général, Adnane Addoum,
qu’elle accuse d’être les instruments d’une pérennisation de
la tutelle syrienne, même après le retrait militaire des troupes
de Damas.
M.
Miqati, qui entretient des relations cordiales avec la famille
du président syrien Bachar Al-Assad, a souligné qu’il tend la
main à tous « afin que nous puissions coopérer dans l’intérêt
du Liban » et émis l’espoir d’être un symbole de la modération
et de l’unité nationale.
La
décrispation est de mise aussi dans le camp pro-syrien, connu
comme étant celui des « loyalistes » dans le jargon politique
libanais. Le député Ali Hassan Khalil, membre du bloc parlementaire
présidé par le chef du Parlement Nabih Berri, a déclaré que
ce bloc « est prêt à accepter toute forme de gouvernement (...)
les députés de l’opposition ayant fait preuve d’esprit de conciliation
» en participant à la désignation d’un nouveau premier ministre.
Mais
Najib Miqati doit toutefois engager une course contre la montre
pour former rapidement un gouvernement. Ceci requiert un soutien
des puissances étrangères ainsi que des forces politiques internes
toutes tendances confondues.
Après
la déclaration de l’opposition de faciliter la tâche de Miqati
pour la formation du gouvernement, il reste à espérer que les
Libanais réussiront à éviter le pire. Il y a quelques semaines
encore, la crise focalisait sur le retrait syrien. Désormais,
la question qui est toujours posée est de savoir comment le
retrait syrien et les prochaines élections pourront constituer
un premier pas pour l’édification d’un Liban démocratique, souverain
et uni .
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