Hebdomadaire égyptien en langue française en ligne chaque mercredi

Patrimoine

La Une
L'événement
Le dossier
L'enquête
Nulle part ailleurs
L'invité
L'Egypte
Affaires
Finances
Le monde en bref
Points de vue
Commentaire
d'Ibrahim Nafie

Carrefour
de Mohamed Salmawy

Portrait
Littérature
Livres
Arts
société
Sport
Environnement
Patrimoine
Loisirs
Echangez, écrivez
La vie mondaine
Port-Saïd. La ville comprend environ 500 édifices datant des XIXe et XXe siècles et qui sont pour la plupart dans un état lamentable. Un projet franco-égyptien pour protéger ce patrimoine est actuellement à la recherche de financement.

Un patrimoine à valoriser

Port-Saïd,
De notre envoyée spéciale —

Fondée en 1859 par Saïd pacha, la ville de Port-Saïd était au départ destinée seulement à héberger les ouvriers qui creusaient le Canal de Suez. A la fin du XIXe siècle, c’était déjà un port important et toutes les puissances maritimes y avaient des consulats. De nos jours, le visiteur de Port-Saïd ne peut s’empêcher de suspendre son regard aux balcons en bois ciselé qui se détachent des façades de certaines maisons. La ville a conservé de la présence des Européens de nombreuses constructions, de la période 1860-1880, mais surtout des années 1920.

Port-Saïd est l’une des rares villes de l’Egypte qui regroupe encore de nos jours un aussi important patrimoine architectural et urbain exceptionnel qui mérite d’être sauvegardé et mis en valeur.

Cependant, le manque d’entretien entraîne la dégradation du cadre bâti, et les rénovations sauvages font disparaître tous les mois une vieille bâtisse possédant différentes valeurs au profit d’une architecture de la plus grande banalité. « C’est tout à fait logique et compréhensible parce qu’en démolissant un bâtiment de quatre étages et en construisant un autre à douze, le propriétaire gagne. C’est un jeu gagnant, sauf qu’après, on n’a plus de bâtiments anciens parce que c’est une ressource non renouvelable, c’est un peu comme le pétrole. Quand on aura démoli ces bâtiments, Port-Saïd ne sera plus Port-Saïd. Elle sera comme toutes les autres villes d’Egypte et n’aura pas de touche personnelle », estime Romeo Carabelli, directeur exécutif du projet Patrimoines Partagés et chercheur associé au Centre National de Recherches Scientifiques (CNRS). De nombreux dangers menacent donc aujourd’hui cette architecture de l’époque moderne, ce qui rend très urgent d’archiver ce qui reste et de tenter en même temps de sauvegarder les caractéristiques originales de cette ville. Patrimoines Partagés, qui est un projet de recherches financé par l’Union européenne, travaille sur l’architecture de Port-Saïd.

Pour lui, l’architecture de la ville de Port-Saïd est un patrimoine partagé puisque ces bâtiments n’appartiennent pas à un côté ou à un autre puisqu’ils étaient construits par les gens qui voyageaient.

Un travail partagé

Il y a plusieurs parties qui sont actuellement en train de travailler sur l’architecture de Port-Saïd. « C’est l’Alliance française de Port-Saïd qui a mis en relief l’intérêt de ce patrimoine intéressant », souligne Romeo Carabelli. Ensuite, à l’intérieur de ce groupe d’institutions, chacun fait un morceau dans lequel il est plus spécialisé. « A la demande du gouvernorat de Port-Saïd et avec l’appui de l’Alliance française de Port-Saïd, on a fait intervenir en particulier des élèves du Centre des hautes études de Chaillot (l’Ecole d’architecture de Paris) pour essayer de réfléchir aux problèmes du patrimoine dans divers contextes politiques, géographiques et sociaux, etc. Le Centre des hautes études de Chaillot prépare en France les architectes des monuments historiques et qui chaque année dans le cadre de leur préparation font un stage à l’étranger », explique Mercedes Volait, chargée de recherches au CNRS et spécialiste en architecture moderne en Méditerranée. Les élèves du Centre des hautes études de Chaillot sont venus deux fois de suite à Port-Saïd où ils ont fait un premier inventaire du sommaire. Ils ont identifié 450 bâtiments intéressants. Pour le moment, on a une piste très avancée. Ils avancent de façon plus rapide. On a commencé toutes les démarches administratives pour avoir un financement pour pouvoir faire aménager au moins un bâtiment. Selon Romeo Carabelli, l’exécution du projet des Patrimoines Partagés ne partira pas avant la fin de l’année 2006.

Pour sa part, l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO) du Caire prépare une publication qui constitue un guide architectural du patrimoine de Port-Saïd. Cette publication est réalisée en coopération entre l’Alliance française de Port-Saïd, le projet de Patrimoines Partagés et l’IFAO.

D’ailleurs, dans ce même cadre, un colloque franco-égyptien qui a pour thème « Protection et valorisation du patrimoine urbain des XIXe-XXe siècles : dispositifs, méthodes, partenariats », a été organisé à Port-Saïd. Celui-ci a réuni un grand nombre de chercheurs et de spécialistes en architecture qui ont discuté des projets et des propositions de la protection et de la valorisation du patrimoine urbain des XIXe et XXe siècles de Port-Saïd. Une expérience française en matière de protection et de valorisation du patrimoine de ces époques a été aussi présentée. « On a essayé de voir de façon plus concrète ce qui est possible de faire pour aménager et formuler une représentation des enjeux patrimoniaux de la ville de Port-Saïd et autres villes du canal », souligne Alain Roussillon, directeur du Centre d’Etudes et de Documentation Economiques, Juridiques et Sociales (CEDEJ). « On essaye actuellement de passer à la phase suivante qui est de savoir ce qu’on pourrait faire pour protéger et puis surtout valoriser le patrimoine de Port-Saïd dans les différentes hypothèses. C’est un peu l’idée de ce colloque », ajoute Mercedes Volait. Ils s’intéressent surtout à travailler sur l’architecture des XIXe et XXe siècles tout autour de la Méditerranée, aussi bien en Algérie, au Maroc, en Tunisie, au Liban, en Turquie, etc. En Egypte, ils ont déjà travaillé pendant cinq ans à l’architecture d’Héliopolis et son centenaire.


A la recherche de financement

Le projet de valorisation du patrimoine de Port-Saïd a été instauré il y a trois ans. « Ce programme a été instauré par mon prédécesseur, Valérie Nicolas. Il y a maintenant trois ans qu’on parle de Port-Saïd au cours desquels on a eu des liens avec le gouvernorat de Port-Saïd et toutes les organisations qui travaillent dessus : Patrimoines Partagés, Euromed, le laboratoire CTRS, l’Ecole de Chaillot », indique Bernard Chaumont Gaillard, directeur de l’Alliance française de Port-Saïd. Et d’ajouter : « C’est un projet très important parce que Port-Saïd est une ville extraordinaire avec un passé extraordinaire. C’est dommage de laisser tomber ces bâtiments qui sont maintenant en train de tomber en ruine. On essaye actuellement de trouver le financement et d’essayer de préciser les endroits qui peuvent être rénovés ou valorisés. L’étape suivante sera de faire une étude, des calculs, les prix, les tarifs, etc. Par ce colloque on essaye de mettre toutes nos relations et de trouver un financement que ce soit égyptien ou étranger pour pouvoir réaliser ce projet. Ce colloque peut donc être considéré comme le point de départ de cette phase. On va cibler des endroits à protéger, s’il est possible de les protéger, parce qu’il y en a beaucoup qui sont dans un tel état qu’il est mieux de les raser. La partie la plus difficile est justement de parler de ce projet à beaucoup de monde parce qu’au départ il y avait seulement l’Ecole de Chaillot, l’Alliance française, le Centre Français de Culture et de Coopération (CFCC), l’ambassade de France et le gouvernorat de Port-Saïd », souligne Bernard Chaumont Gaillard.

La documentation du patrimoine architectural de la ville de Port-Saïd est également réalisée sous la direction d’un consortium IRD (responsable scientifique), CultNat (National Center for Documentation of Cultural and Natural Heritage) dépendant du ministère de la Communication et des Technologies de l’Information), CultNat est associé à la Bibliotheca Alexandrina, le département d’architecture de la faculté polytechnique de l’Université du Caire.

Ces bâtiments chargés d’Histoire et de symboles méritent aujourd’hui de la part de l’Egypte un regard nouveau pour une reconnaissance de leur valeur patrimoniale .

Amira Samir
Retour au sommaire

Les belles villas de Port-Fouad

Ce quartier résidentiel situé sur la rive Est du Canal de Suez était le lieu de résidence des employés du Canal.

Dans les années 1920, la Compagnie universelle du Canal de Suez avait décidé la construction de logements pour ses employés. Cadres et ouvriers sont ainsi tous logés, dès le 21 décembre 1926, date de l’inauguration de la ville, avec un standing proportionnel au niveau de responsabilité.

Des villas de style colonial, bâties dans les années 1920 et où logent les fonctionnaires de l’Organisme du Canal de Suez jusqu’à présent, il s’agit en effet d’un style architectural à la française, mais toute la ville de Port-Saïd porte encore des traces d’une empreinte européenne. Les façades ocre ou beige des grandes demeures à l’abri de jardins tantôt luxuriants ou délabrés, restent réservées aux cadres. Tandis que les rangées régulières de petites maisons en briques blanches, accueillent les ouvriers. Dans ces demeures d’un étage, chacune dotée d’un jardin particulier, les premiers occupants ont été italiens, grecs ou arméniens.

Le visiteur de la ville peut observer à quel point Port-Fouad préserve jusqu’aujourd’hui son identité architecturale bien qu’aucun plan de protection de ce patrimoine architectural ne soit en vigueur, cela est en fait dû à ce que l’Autorité du Canal prend soin de ses petites propriétés. « Port-Fouad a en fait une situation assez intéressante parce qu’il y a beaucoup moins de danger. Ses bâtiments sont bien préservés puisqu’ils sont restés longtemps propriétés de la Compagnie du Canal de Suez », explique Claudine Piaton, architecte et urbaniste de l’Etat centre des hautes études de Chaillot. Ajoutant : « On est moins inquiet pour ce quartier ». Les façades sont repeintes tous les deux ans. Plomberie, électricité, tout est pris en charge par l’Autorité du Canal .

A. S.

 

Pour les problèmes techniques contactez le webmaster

Adresse postale: Journal Al-Ahram Hebdo
Rue Al-Gaala, Le Caire - Egypte
Tél: (+202) 57 86 100
Fax: (+202) 57 82 631