Al-Ahram
Hebdo : Depuis sa fondation en 1992, le CEDARE a joué un rôle
important au niveau arabe et européen. Aujourd’hui, avec l’importance
croissante du développement durable, votre mission devient
de plus en plus difficile ...
Nadia Makram
Ebeid : Forcément oui, ce n’est pas notre mission à nous seuls,
mais la mission de toute la communauté internationale. Le
monde change, les problèmes de l’environnement deviennent
de plus en plus graves et par conséquent, l’application des
principes du développement durable devient difficile. Pour
mieux arriver à nos objectifs, nous devons observer tout ce
qui se passe autour de nous sur le plan international. Par
exemple, lors du Sommet de la terre à Rio de Janeiro, en 1992,
il y a eu plusieurs changements et nouveautés comme la fondation
de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) puis l’apparition
du Comité du commerce et de l’environnement. Par ailleurs,
il y a eu une révolution au niveau de la communication. Cette
dernière a aidé à propager une sorte de sensibilisation générale
en ce qui concerne les problèmes de l’environnement. En effet,
la gestion environnementale de nos jours s’oriente vers la
non centralisation et vers l’approfondissement du partenariat
et de la discussion entre toutes les parties de la société.
Après le Sommet de la terre à Johannesburg en 2002, la communauté
internationale fut obligée de réaliser les objectifs du millénaire
pour le développement connus sous le nom de WEHAB, abréviation
anglaise de 5 mots : eau, énergie, santé, agriculture et diversité
biologique.
— Dans le
contexte de ces changements, quelle sera votre ligne de conduite
pour la période à venir ?
— Avant de parler
de notre nouveau concept, un mot à dire : le CEDARE a traversé
une période très riche sous l’ancien directeur exécutif, Kamal
Sabet. Le centre sous sa direction avait organisé 84 ateliers
de travail, accordé 44 assistances techniques, élaboré 55
études dans les domaines de la recherche, de l’arpentage et
de l’évaluation environnementale. Le CEDARE avait par ailleurs
diffusé plus de 150 fiches techniques. On a aussi une bibliothèque
qui renferme plus de 4 500 documents environnementaux.
Ce que je veux
dire, c’est que moi je n’ai pas commencé de zéro, je suis
venue compléter le chemin que le Dr Sabet avait commencé,
mais avec ma propre vision. Alors, j’ai choisi comme concept
« L’environnement pour le développement ». Avec ce concept,
on prétend être au courant de tout ce qui se passe dans le
monde, avec un objectif qui est l’élimination des problèmes
de l’environnement à travers l’investissement du capital humain.
A mon avis, c’est l’investissement le plus important car ce
capital ne pourra jamais s’épuiser. Quand nous réussirons
à avoir des cadres humains bien formés qui sont capables d’assimiler
les nouveautés qui ont envahi le dictionnaire de notre vie,
ce sera déjà un succès.
— Quelles
sont vos priorités ?
— Nous avons
trois priorités : la première réside dans la gestion de l’eau,
la deuxième la propagation du savoir et l’utilisation des
technologies de communication et d’information, la troisième
dans la réalisation d’une harmonie entre le commerce, l’investissement
et l’environnement.
— Comment
justifiez-vous le choix de vos priorités ?
— Premièrement,
l’eau est la première source de vie dans le monde entier.
Dans notre monde arabe, plusieurs défis sont à relever dans
ce domaine. Nous vivons déjà en dessous du seuil de pauvreté
en eau (1 000 m3), d’ailleurs la part en eau par individu
est de 900 mètres cubes dans les pays arabes. De même, la
qualité de l’eau représente un vrai défi dans le monde arabe,
il y a en outre des problèmes qui menacent les eaux souterraines.
Ainsi, nous devons établir une stratégie et donner des assistances
techniques afin de sauver les ressources arabes en eau. A
cette priorité est liée la gestion des terres qui sont une
partie des ressources naturelles. Nous voulons contrer les
problèmes de la désertification, de la dégradation des terres.
Quant à notre deuxième priorité, qui est l’utilisation des
technologies de communication et d’information, l’Internet
a changé le monde, c’est une vraie révolution et nous devons
en profiter pour propager de plus en plus la sensibilisation
à l’environnement. Ici apparaît l’importance du E-Learning
de l’environnement, qui donne toutes les informations sur
ce domaine via le réseau, ce qui aide à éliminer les illettrés
de l’environnement. Nous avons choisi notre troisième et dernière
priorité, qui est celle d’essayer de régler les problèmes
du commerce, de l’investissement et de l’environnement car
les pays arabes doivent appliquer les principes de la production
la plus propre et respecter les normes de l’environnement
pour pouvoir être compétitifs sur le marché international.
Dans ce contexte, l’Iso 14 000 (relatif à l’environnement)
est donc un choix obligatoire.
— Votre objectif
stratégique est donc de promouvoir le travail environnemental
pour le développement. Comment pourriez-vous réaliser cet
objectif ?
— A mon avis,
il y a plusieurs façons. Par exemple, on pourra appliquer
le principe de la gestion complète des ressources hydrauliques
à travers laquelle nous pourrons réaliser les objectifs du
millénaire en matière de développement pour rendre plus importants
les avantages économiques, sociaux et environnementaux de
l’utilisation de l’eau. De même, on peut soutenir la prise
de la décision environnementale à travers l’analyse et la
diffusion des statistiques et des informations environnementales.
Nous pourrons également alimenter le principe de l’autoconformité
à l’environnement et approfondir le sentiment de responsabilité
sociale au sein des institutions afin d’améliorer l’exécution
environnementale et la considérer comme outil pour développer
la capacité de compétition de ces institutions sur les marchés
internationaux.
En fait, les
sociétés doivent faire un rapport qui couvre les côtés économique,
social et environnemental qu’on appelle « rapport de durabilité
». Ce qui est intéressant, c’est que je viens de recevoir
un rapport de ce genre de la société British Petroleum, située
au Caire.
— Pour réaliser
ces travaux, quels seront vos outils ?
— Premièrement,
le CEDARE va profiter des expériences de réussite. Partout
dans le monde, il y a des réussites que les gouvernements
ou les ONG ont pu réaliser, mais leurs histoires sont peu
connues ; notre rôle sera de ressortir ces histoires des tiroirs
pour les mettre en relief afin que les autres puissent en
profiter. Je suis même sur le point d’organiser un forum pour
les histoires de réussite dans le domaine de l’environnement
pour le développement.
De même, on devra
approfondir le partenariat avec la société civile, c’est-à-dire
avec les ONG, les institutions des travaux, les jeunes et
la femme. On a déjà contribué à la fondation de l’Association
des institutions des travaux pour sauvegarder l’environnement,
le partenariat hydraulique de la Méditerranée, le partenariat
hydraulique égyptien et dernièrement le conseil arabe de l’eau.
En fait, un de
nos outils les plus importants est celui du respect des conventions
et des accords internationaux relatifs à l’environnement.
Ces accords donnent la chance à la coopération internationale,
au transfert des technologies propres et à l’amélioration
des capacités dans les pays en voie de développement.
— Avez-vous
donc un plan ou une stratégie bien précise ?
— Bien sûr, on
vient de mettre les dernières touches à notre stratégie dont
on commencera l’exécution en 2005 et qui prendra fin en 2010.
— Quels sont
les principaux traits de cette stratégie ?
— Notre stratégie
consiste à concrétiser nos objectifs et nos trois priorités
à travers des projets qu’on exécutera avec nos partenaires.
Nous avons en
fait partagé les projets en trois parties : les projets en
cours, dont 8 dans le domaine de l’eau, 9 dans le domaine
de la technologie de l’information et un sprojet dans le domaine
du commerce, de l’investissement et de l’environnement. Notre
second type de projets sont ceux en préparation qui sont au
nombre de 3 dans le domaine de l’eau, 4 dans le domaine de
l’information et un dans le domaine du commerce et de l’environnement.
Quant aux projets que nous sommes en train d’étudier, 12 couvrent
le domaine de l’eau, 7 sont relatifs aux technologies de l’information
contre 7 projets concernant le commerce et l’environnement.
— Quels sont
vos rêves ?
— Je suis très
optimiste et j’ai espoir que demain sera meilleur. Je rêve
que les efforts que la communauté internationale déploient
aboutissent à l’amélioration des conditions de vie et réparent
les fautes des années de pollution et de négligence.