En prenant la décision, le 17 juillet, de lancer une offensive terrestre contre la bande de Gaza, Israël a fait le choix de l’escalade militaire. La décision est intervenue à la suite du refus du
Hamas, qui contrôle la bande de Gaza depuis 2007, de l’initiative égyptienne pour un cessez-le-feu.
Ce rejet a donné à Tel-Aviv le prétexte et la couverture politique pour mener son agression contre la bande de Gaza, avec son cortège lugubre de morts et de blessés parmi les Palestiniens. Les maîtres islamistes de Gaza avaient rejeté la proposition égyptienne de l’arrêt des hostilités parce qu’ils voulaient plus. Le Hamas ne se contente plus désormais d’un simple cessez-le-feu, mais veut notamment la fin du blocus hermétique imposé par Israël depuis 2007 et l’ouverture du poste frontalier égyptien de Rafah. Ce blocus a transformé la bande de Gaza, où s’entassent quelque 1,7 million de Palestiniens, en une sorte de grande prison à ciel ouvert, et a accentué la misère de la population.
Israël a saisi l’occasion pour affaiblir militairement le Hamas, à travers l’élimination de la menace de roquettes lancées par ce dernier sur le sud et le centre du territoire israélien. Israël hésitait au départ à lancer une opération terrestre, de peur de ternir davantage son image sur la scène internationale, puisque son agression allait fatalement provoquer des pertes humaines importantes parmi les civils palestiniens, notamment les enfants et les femmes, ce qui est d’ailleurs aujourd’hui le cas. Le premier ministre, Benyamin Netanyahu, craignait également les pertes humaines dans les rangs de son armée, corollaire de toute attaque terrestre contre des zones urbaines densément peuplées, ce qui risquerait de faire retourner l’opinion publique israélienne contre le gouvernement si l’invasion s’installe dans la durée.
Par son offensive, Israël cherche d’abord à détruite le réseau de tunnels souterrains construit à la frontière entre la bande de Gaza et Israël par le bras armé du Hamas, les brigades Ezzeddine Al-Qassam. Ce réseau interconnecté permet aux militants du Hamas de mener des opérations à l’intérieur d’Israël et de déplacer les lanceurs de roquettes jusque dans son territoire. L’attaque vise aussi les dirigeants militaires du Hamas. L’objectif ultime de Tel-Aviv est de parvenir à imposer une période de calme via l’affaiblissement militaire du Hamas. Celui-ci a développé, au fil des années, une force de frappe qui va croissant à travers la fabrication de roquettes dont la portée est de plus en plus étendue. Certes, ces roquettes ont une précision approximative, mais elles causent suffisamment de panique et de perturbation chez la population israélienne, notamment au sud, que le gouvernement israélien se sent humilié de ne pas pouvoir les arrêter.
La récente expérience des agressions terrestres israéliennes contre la bande de Gaza incite toutefois à la modération dans le jugement de ses résultats. Le Hamas a toujours su résister aux invasions israéliennes les plus agressives et a réussi, avec des fortunes diverses, à maintenir sa popularité. La dernière grande invasion militaire israélienne de l’enclave, en janvier 2009, s’est soldée par la réduction des capacités militaires du « Mouvement de la résistance islamique ». Mais celui-ci a depuis repris ses forces et développé une force militaire bien plus sophistiquée, avec la fabrication locale de milliers de roquettes et tout un système de casemates et de tunnels souterrains.
L’agression actuelle a toutes les chances d’aboutir au même résultat: un affaiblissement militaire temporaire du Hamas. Un palliatif qui s’attaque aux symptômes du problème, mais ignore ses racines: l’absence d’un véritable processus de négociation qui donne espoir aux Palestiniens— et aux Israéliens— de pouvoir aboutir un jour à une paix durable.
Le gouvernement Netanyahu cherche, par son offensive au prix lourd, un calme temporaire, plus ou moins long, alors que le Hamas, par son attitude de défi et son refus du cessez-le-feu proposé par Le Caire, cherche à briser le statu quo et à sortir gagnant de la confrontation asymétrique avec Israël. Une issue serait peut-être dans l’implication de l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas dans la recherche d’un règlement. La participation de celle-ci, qui a signé en avril dernier un accord de réconciliation avec le Hamas dans la gestion du terminal de Rafah, avec l’éventuel concours d’observateurs européens, pourrait représenter un compromis acceptable par toutes les parties concernées, permettant de désenclaver la bande de Gaza.
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