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La Constitution de la trêve

Lundi, 25 novembre 2013

Le comité chargé de la rédaction de la Constitution avait commencé ses travaux alors qu’un esprit d’optimisme régnait parmi le peuple égyptien. Cet optimisme était basé sur une conviction que le comité représentait la volonté du peuple qui aspire à l’instauration d’un Etat national pour tous les Egyptiens. Un Etat basé sur une nouvelle plateforme représentée dans la nouvelle Constitution serait un nouveau contrat social entre les différentes factions de la société. Un contrat qui sauvegarde les droits des citoyens et non pas un contrat social avec un courant ou une faction déterminée qui aspire à s’octroyer le pouvoir pendant des décennies comme cela s’est passé avec la Constitution de 2012 : tel était l’esprit de la Constitution.

Mais avec le temps et l’avancement des travaux du comité, des questions importantes sont apparues et peuvent influencer la fondation du nouvel Etat et la réalisation du rêve pour lequel les Egyptiens ont lutté pendant 3 années : c’est-à-dire fonder un Etat moderne et civil pour tous.

La rédaction de la Constitution de 2012 s’est faite à travers un courant qui se donnait le droit de représenter et d’exécuter la volonté divine. Celui-ci a, depuis le premier jour, relancé le conflit sur l’identité de l’Etat en ayant recours à des moyens directs ou cachés à travers des termes introduits dans plusieurs articles. Cette pensée, qui est dans sa teneur une pensée fasciste, basée sur une légitimité de discrimination religieuse, permet au courant islamiste d’imposer une supériorité sur la société et, par conséquent, de détruire l’Etat dans sa forme moderne.

Mais l’Egypte et son gouvernement transitoire sont aujourd’hui retombés dans une nouvelle erreur. Le comité chargé de la rédaction de la Constitution, et avant lui le gouvernement, font erreur en passant un accord avec le fascisme. Ces organisations doivent être considérées comme les adeptes d’une pensée fasciste qu’il faut anéantir, comme le fait la communauté internationale. Or, il n’y a pas de volonté réelle d’anéantir le fascisme. Le peuple a même été surpris de la présence de ce fascisme dans la nouvelle Egypte.

La Constitution de la trêve

C’est ainsi qu’a commencé le conflit entre les courants de tendance civile et les autres de tendance religieuse autour de l’identité de l’Etat. Par exemple, le courant religieux a insisté sur le fait que les termes « l’Egypte est un Etat civil » ne soient pas mentionnés en tant que description de l’Etat dans la Constitution en insistant sur le fait de dire que « l’Egypte est un Etat constitutionnel » afin de pouvoir changer l’identité de l’Etat ultérieurement. Le courant religieux voulait accéder au pouvoir et transformer l’Etat en Etat religieux en ayant recours au moyen constitutionnel et non pas révolutionnaire, et par conséquent, changer la forme des institutions et des lois de façon à pouvoir s’emparer du pouvoir.

Le plus étrange est le comportement du courant civil face aux ambitions du courant religieux. Au lieu de lever l’emblème de la nation et des demandes de la révolution du 30 juin, il a levé l’emblème des intérêts politiques. C’est ainsi que le courant civil a commencé à adopter des procédures opposées, non pas pour aboutir à une Constitution qui exprime les rêves des Egyptiens, mais pour se garantir le monopole du pouvoir par l’intermédiaire de procédures électorales prochaines, en particulier les élections parlementaires, et cela dans le but de faire face au courant religieux et de reporter le conflit aux élections ultérieures.

C’est alors que l’idée de la rédaction de la Constitution, que le monde entier connaît en tant que contrat social entre la liberté et le pouvoir, s’est transformée en contrat politique entre les courants civils et les courants religieux. Par conséquent, si les partis politiques civils remportent les prochaines élections, en contrepartie, ils permettront au courant religieux d’être présent avec ses idées politiques fascistes. C’est le fait d’être représenté dans le comité par le parti Al-Nour qui permettra au courant islamiste d’imiter les Frères musulmans et de légitimer l’existence d’organisations religieuses comme la Salafiya djihadiya (groupe salafiste djihadiste).

Les discussions qui se déroulent dans les séances de rédaction des articles ont commencé à influencer la rue égyptienne. Un oui au référendum sur la Constitution est loin d’être évident. Les articles qui ont été rédigés ne répondent pas aux ambitions de la majorité des partisans de la révolution de juin, et ne réalisent pas le rêve des courants et des organisations fascistes dans leur prétendu droit à dominer l’humanité. La nouvelle Constitution ne concerne que le troisième courant dirigé par le Front du salut qui voit en ce texte un contrat politique apte à imposer une trêve avec les deux autres courants. Et par conséquent, à reporter le conflit à plus tard, conflit qui explosera peut-être lors des élections suivantes où le loup du fascisme se transformera en agneau pour s’accaparer le Parlement et les différents pouvoirs afin de servir ses idées et ses convictions.

Personne n’a réussi à tirer les leçons de janvier et de juin, car ceux qui ont fait deux révolutions pour leur liberté sont prêts à continuer. Mais l’Etat égyptien ne pourra plus supporter de nouveau conflit ou de Constitution de trêve .

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