Les Etats-unis ont commencé le redéploiement de leurs troupes dans la région du Golfe. Le président Joe Biden a demandé au Département de la défense de retirer des forces et des armes américaines de la zone, selon le Wall Street Journal. Le Pentagone, qui met au point des plans de réduction de la présence militaire américaine au Moyen-Orient, a déjà déplacé au moins trois batteries de systèmes de missiles antiaériens Patriot, dont l’une a été déployée dans la base aérienne du Prince Sultan en Arabie saoudite, a rapporté le journal américain daté du 1er avril. D’autres réductions militaires prévues comprennent un porte-avions, probablement le USS Dwight D. Eisenhower à propulsion nucléaire et des drones de surveillance qui seront déplacés vers d’autres régions prioritaires, notamment l’Asie-Pacifique et l’Europe, pour faire face à la Chine et à la Russie que les responsables américains considèrent comme les principaux rivaux des Etats-Unis sur la scène internationale. A la fin de 2020, il y avait 50 000 soldats américains stationnés au Moyen-Orient, contre environ 90 000 au début de l’année, lorsque la tension entre l’ancien président Donald Trump et l’Iran était à son paroxysme.
La réduction du personnel militaire américain concerne plusieurs pays de la région, en tête desquels l’Iraq où sont stationnés quelque 3 000 soldats. Au terme du cycle de pourparlers stratégiques entre Washington et Bagdad, le 7 avril, les deux pays ont annoncé qu’ils se sont entendus sur la transformation de la mission des forces américaines en formation et conseil, ce qui permettrait le redéploiement des forces de combat restées en Iraq. Un comité technique mixte sera formé pour décider des mécanismes et des délais du redéploiement. La même logique préside au redéploiement américain en Arabie saoudite. Des responsables américains ont révélé à Wall Street Journal que le Pentagone allait prendre des mesures afin de transférer une plus grande part de la responsabilité de protection du territoire du Royaume à Riyad. La possibilité d’une formation supplémentaire des militaires saoudiens et de leur fournir de nouvelles armes est à l’étude. Un courant puissant dans l’Administration Biden estime que les forces américaines qui ont été déployées temporairement en Arabie saoudite au cours des deux dernières années devraient être retirées. En retour, les défenses aérienne et antimissile du Royaume devraient être renforcées et améliorées.
La décision du président américain de retirer toutes les forces américaines d’Afghanistan, évaluées à 3 500, avant le 11 septembre, devrait également se traduire par une baisse des troupes américaines déployées dans le Golfe. L’une des missions de ces dernières était de soutenir les opérations militaires américaines en Afghanistan. Idem pour la fin des opérations militaires des Etats-Unis en Iraq qui devrait entraîner une baisse de leurs effectifs stationnés au Koweït, aux Emirats arabes unis et au Qatar.
Le désengagement relatif de l’armée américaine de la région du Golfe et du Moyen-Orient en général répond à une promesse de campagne de Biden. Mais en réalité, cette tendance existe depuis la présidence de Barack Obama (2009-2016), confirmée par son successeur Donald Trump (2017-2020) qui avait annoncé son intention de réduire la présence militaire américaine au Moyen-Orient à l’automne 2020. Outre la rivalité avec la Chine et la Russie pour la suprématie mondiale qui a pris le dessus sur les autres priorités de la politique étrangère américaine, Washington considère que l’importance stratégique de la région du Golfe a diminué, principalement en raison de l’augmentation constante de la production pétrolière américaine et de la diversification, qui va croissant, du marché mondial de l’énergie, notamment avec le développement des énergies renouvelables et vertes. Par conséquent, il croit que les intérêts américains peuvent être protégés à moindre coût et avec moins de risques et de ressources militaires. En plus, le locataire de la Maison Blanche estime que limiter l’exposition des forces militaires américaines dans le Golfe réduirait le risque de leur implication dans des conflits internes, comme c’était le cas en Iraq.
Malgré le déclin relatif de l’importance de la région du Golfe pour les Etats-Unis, ceux-ci continuent à y maintenir des intérêts qui justifient la poursuite d’une présence — quoique réduite — de forces américaines : le possible conflit avec l’Iran en raison de son programme nucléaire et de sa politique régionale, la nécessité de garder la stabilité du marché énergétique mondial et la lutte contre l’islamisme radical. Tant que persistent ces motifs, les Etats-Unis auront besoin de garder une présence militaire et un accès aux bases de la région.
Et c’est la taille de cette présence militaire qui fait débat aujourd’hui à Washington. L’Administration Biden s’emploie à la déterminer en fonction d’un calcul des intérêts américains dans la région, des menaces pesant sur ces intérêts et d’une évaluation des avantages, des coûts, des risques et des implications de chaque choix. Pour le moment, une unanimité se dégage sur deux questions. La première est que la fin prévue des opérations militaires américaines en Afghanistan et en Iraq impose une réduction importante des forces qui stationnent actuellement dans le Golfe. La seconde est que la baisse de cette présence militaire pourrait être compensée par des déploiements de forces par rotation en cas de menace aux intérêts fondamentaux des Etats-Unis.
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