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Ukraine : Quand la Chine se pose en faiseur de paix

Maha Salem , (avec Agences) , Jeudi, 02 mars 2023

Alors que la guerre en Ukraine entre dans sa deuxième année et que rien n’annonce qu’elle sera tranchée militairement, la Chine propose un plan de paix. Mais les Occidentaux se montrent sceptiques.

Ukraine : Quand la Chine se pose en faiseur de paix

Depuis le début du conflit, la Chine reste très discrète, soutenant du bout des lèvres la Russie sans pour autant vouloir s’impliquer d’une manière ou d’une autre ou prendre une position claire. Un an après le début de la guerre, Pékin se pose en faiseur de paix, appelant, dans un document en 12 points rendu public vendredi 24 février, Russes et Ukrainiens à tenir des pourparlers de paix. « Toutes les parties doivent soutenir la Russie et l’Ukraine pour travailler dans la même direction et reprendre le dialogue direct aussi vite que possible en vue d’une solution pacifique », a estimé le ministère chinois des Affaires étrangères.

En première réaction, le président américain, Joe Biden, a indiqué ne voir dans ce plan rien qui puisse bénéficier à qui que ce soit d’autre que la Russie. Quant à l’Union Européenne (UE), elle a globalement accueilli cette intervention diplomatique chinoise avec scepticisme. Du côté des belligérants, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s’est dit prêt à travailler avec Pékin et a annoncé son intention de rencontrer son homologue, Xi Jinping. Et la Russie a dit apprécier les efforts chinois, tout en insistant sur la nécessité de reconnaître l’annexion russe de quatre régions ukrainiennes revendiquées par Moscou.

En effet, cette guerre constitue un dossier délicat pour Pékin, en raison de ses forts liens diplomatiques et économiques avec Moscou, consolidés par l’intérêt commun de faire contrepoids à Washington. Partenaire stratégique de Moscou, la Chine s’était abstenue jeudi 23 février lors du vote d’une résolution par l’Assemblée générale de l’Onu exigeant un retrait immédiat des troupes russes. Samedi 25 février, elle entravait un communiqué commun du G20 Finances réuni en Inde.

Intitulé « Position de la Chine sur le règlement politique de la crise ukrainienne », le document a été publié sur le site du ministère à l’occasion du premier anniversaire du déclenchement de la guerre en Ukraine le 24 février 2022. La Chine cherche depuis quelques semaines à jouer un rôle de médiateur dans ce conflit et promettait depuis plusieurs jours de publier sa position en vue de trouver une solution politique. Dans le document, Pékin s’oppose clairement à tout recours à l’arme nucléaire alors que le président russe, Vladimir Poutine, a brandi cette menace.

Parmi les 12 points, la Chine exhorte les deux pays à se conformer strictement au droit humanitaire international et à éviter d’attaquer des civils ou des bâtiments civils. L’arme nucléaire ne doit pas être utilisée et il ne faut pas se livrer à une guerre nucléaire. Selon le document, la Chine appelle à respecter la souveraineté des Etats, Ukraine comprise, tout en exhortant les Européens à prendre en compte les préoccupations de Moscou en matière de sécurité.

Protéger ses propres intérêts

Mais pourquoi la Chine propose-t-elle maintenant ce plan ? « Intervenir comme médiateur a pour but de protéger ses intérêts », répond Dr Mona Soliman, politologue, expliquant que « la poursuite de la guerre nuit à l’économie et au commerce à travers le monde. En même temps, une victoire de l’Ukraine risque de donner lieu à un scénario identique à Taïwan. Et une victoire de la Russie fera d’elle une vraie puissance influente dans les pays d’Asie centrale et l’est de l’Europe, c’est-à-dire une vraie concurrente à la Chine et menacera ses intérêts commerciaux dans cette région ». Pour la politologue, seules la Turquie et la Chine peuvent faire office de médiateur.

Depuis le début de la guerre, la pression occidentale s’accroît sur Pékin, qui n’a jamais appuyé ni critiqué publiquement l’offensive russe, tout en exprimant plusieurs fois son soutien à Moscou face aux sanctions occidentales. Des sanctions qui viennent d’être augmentées. Mais qui, pour l’heure, ne semblent pas suffisantes pour dissuader Moscou. « Toutes ces sanctions ne sont pas suffisantes pour stopper la guerre. Au contraire, au vu de la donne actuelle, le conflit risque de se prolonger durant des années, plongeant le monde entier dans une crise sans précédent dans plusieurs domaines », conclut Soliman.

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