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Abdelhalim Khaddam : La solution est de procurer à la révolution des armes sophistiquées

Osman Fékri, Mercredi, 04 décembre 2013

L’ancien vice-président syrien, aujourd’hui dissident, Abdelhalim Khaddam, prévoit l’échec de la conférence Genève-2 et s’oppose à toute solution qui maintienne le régime de Bachar Al-Assad en place.

Abdelhalim Khaddam
Abdelhalim Khaddam

Al-ahram hebdo : De prime abord, que pensez-vous de la conférence de paix internationale Genève-2 et de la participation de l’opposition syrienne ?

Abdelhalim Khaddam : Je crois que la conférence n’aura pas lieu en raison des désaccords persistants entre les différentes factions de l’opposition. Personnellement, j’appelle l’opposition syrienne à boycotter la conférence, vu les conséquences dangereuses que sa présence pourrait engendrer. L’opposition syrienne est hétérogène. Elle est loin d’être unie ou prête à une telle conférence. Outre cela, la majorité des Syriens à l’intérieur comme à l’étranger n’accepteront pas qu’une même table de négociations les réunisse avec le régime de Bachar Al-Assad, qui a souillé ses mains du sang de centaines de milliers de Syriens. Le régime d’Al-Assad est directement responsable de la destruction du pays, de la fuite et de l’incarcération de milliers de Syriens. Il est donc inacceptable d’entamer des négociations avec lui, parce que cela impliquerait sa reconnaissance. Et c’est justement sur cela qu’il mise en acceptant de participer à Genève-2. En d’autres termes, le régime n’est pas prêt à faire des concessions ou à reculer d’un pouce du statu quo actuel. Même s’il en fait, elles seront superficielles et sans aucun sens, ni fondements. Au contraire, elles ne lui conféreront que davantage de légitimité. Chose que nous ne pouvons guère accepter.

— Comment évaluez-vous la position des grandes puissances, notamment les Etats-Unis, vis-à-vis de la crise syrienne ?

— J’accuse les grandes puissances, aussi bien la Russie que les Etats-Unis, de complicité en faveur de la pérennité du régime d’Al-Assad. Vraisemblablement, Moscou et Washington ont consenti à organiser Genève-2 afin de parvenir à une solution via les négociations. Cela dit, en s’abstenant de parler de la destitution d’Al-Assad, les deux grandes puissances ignorent les objectifs du peuple syrien qui aspire au démantèlement du régime et à la liberté. Bachar Al-Assad a utilisé l’arme chimique contre les siens. Nous voyons à titre quotidien des avions bombarder les citoyens désarmés. Avec qui doit-on négocier ? Et pourquoi les négociations devraient-elles être nécessairement accompagnées de concessions et de reconnaissance de Bachar ?

La solution est de procurer à la révolution des armes sophistiquées
Photo:(Reuters)

— Mais certaines factions de l’opposition ont accepté de participer, avec le régime, à Genève-2 …

— La participation de n’importe quelle partie sous le label de l’opposition aura des conséquences graves et risque de compliquer davantage la situation. Ces factions doivent savoir que leur présence à Genève ne pourrait satisfaire le peuple syrien parce que les parrains de cette conférence ont opté pour maintenir le régime, voire pour lui conférer une légitimité et davantage de temps. Les Syriens, civils et milices armées, ne fermeront pas les yeux sur ce jeu international. Si une solution politique est envisagée à Genève-2 sur les principes de Genève-1, l’opposition syrienne doit négocier dans un esprit uni. Sinon, la conférence sera vouée à l’échec.

— Si Genève-2 n’est pas une solution, que peut donc faire la communauté internationale ?

— J’appelle la communauté internationale à donner une aide militaire aux Syriens. La solution est de procurer à la révolution des armes sophistiquées, tant que les combattants sont les milices du Hezbollah, les forces iraniennes et les Russes. Dans un tel contexte, la militarisation de la révolution s’avère une condition sine qua non pour renverser le régime syrien. L’armée régulière syrienne est plus que jamais épuisée et en manque de moyens. La militarisation de l’armée syrienne libre lui permettra d’imposer son contrôle sur la terre surtout que la violence s’amplifie de jour en jour.

— Cela signifie-t-il que l’implication du Hezbollah et d’autres parties conduit au prolongement du conflit ?

— Le rôle du Hezbollah ne change rien sur le terrain. Je crois qu’il payera cher le prix de son implication qui est une conspiration non seulement contre le peuple syrien, mais aussi contre le Liban. Le Hezbollah ne pourra jamais vaincre le peuple syrien tenace, malgré la carence des aides militaires et le joug de la machine de guerre russo-iranienne.

— L’accord entre Téhéran et les Six sur le nucléaire s’inscrit-il dans une perspective de rapprochement avec l’Iran, et quel impact aura-t-il sur la crise syrienne ?

— Cet accord ne changera rien dans l’équation. Téhéran continuera à soutenir le régime de Damas et les rencontres tenues à Genève entre les Iraniens et les Six n’ont pas du tout abordé le dossier syrien .

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