Al-Ahram Hebdo : L’Egypte accueille en novembre la Conférence des Nations-Unies sur le climat (COP27). Quel soutien la Banque Européenne d’Investissement (BEI) peut-elle apporter pour assurer la réussite de cette rencontre internationale ?
Gelsomina Vigliotti: La BEI est engagée à offrir tous les aspects d’aide pour garantir la réussite des réunions. Ce point a fait l’objet de discussions et de coordination continue avec le gouvernement égyptien. Au cours de ma visite effectuée en Egypte, mes rencontres focalisaient sur cet aspect. Il existe actuellement une clarté au niveau de la vision et des objectifs de la prochaine édition de la conférence, censée mettre à exécution la stratégie de l’adaptation climatique approuvée lors de la conférence de Glasgow. Cette stratégie consiste à appliquer les engagements internationaux pour la protection de l’environnement et à l’adaptation climatique.
— L’Egypte est l’un des pays ayant été affectés par la crise du coronavirus et par la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Comment voyez-vous les moyens de sortir de cette crise ?
— La crise économique égyptienne n’est pas une crise particulière, mais plutôt générale au large du monde entier, depuis la hausse des prix des denrées, entre autres. Le plus important pour l’Egypte est de continuer les efforts dans le sens d’accroître les investissements, les offres d’emploi et le soutien au secteur privé. Afin de consolider le développement durable, il est question d’assurer l’expansion des projets verts, le soutien aux Petites et Moyennes Entreprises (PME) qui servent de base à la création d’emploi. La BEI porte un grand intérêt au soutien à ce dernier secteur en Egypte et à son financement qui a atteint 1,8 milliard d’euros. Nous portons un intérêt grandissant à l’entrepreneuriat, que ce soit à travers les banques ou les fonds spécialisés. Notre intérêt porte également sur le secteur des transports et de recyclage, ainsi que le traitement des eaux du drainage sanitaire. Récemment, la banque a approuvé un nouveau financement à hauteur de 1,1 milliard d’euros à l’adresse des projets de métro et de tramways à Alexandrie et au Caire. L’année dernière, la banque a alloué à l’Egypte plus d’un milliard d’euros en soutien au secteur privé, aux télécommunications et au transport.
— Le monde est passé ces dernières années par une série de crises économiques, dont les impacts sont toujours ressentis. Quelles mesures à prendre pour un rétablissement et une relance économiques ?
— Le monde a été témoin d’un nombre de crises imprévisibles depuis le début de la pandémie du Covid-19 et ce qui s’est ensuivi de perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales des produits et des denrées, une vague inflationniste qui a envahi le monde jusqu’à la guerre entre l’Ukraine et la Russie. Toutes ces crises ont laissé leurs impacts socioéconomiques. Les plus éminents étant les prix des aliments et de l’énergie, la perturbation des approvisionnements de commerce, de denrées et de produits. Tout cela a entraîné une crise inflationniste qui frappe dans le coeur actuellement un nombre de pays et qui requiert un traitement délicat de la part des gouvernements et des Banques Centrales dans le but d’un rétablissement et afin d’arrêter les flambées des prix des produits de base et pour rétablir la stabilité. Effectivement, un nombre de gouvernements ont joué un rôle important au niveau de ces crises, surtout celle du Covid-19, via une panoplie de stimulus et de programmes de protection sociale à l’égard des défavorisés et des chômeurs. La plupart des gouvernements oeuvrent actuellement à recouvrer les taux de croissance ayant précédé la crise et à donner une impulsion aux différents secteurs économiques pour poursuivre le travail et la production.
— Quel rôle les Banques Centrales peuvent-elles jouer pour sortir de la crise, à la lumière de l’existence de deux écoles, celle des Etats-Unis favorisant la hausse des taux d’intérêt et celle européenne privilégiant la retenue ?
— Les décisions de hausse des taux d’intérêt prennent en considération plusieurs facteurs différents. Il n’existe pas une prescription fixe. La réussite de la décision revient aux raisons et aux données de l’inflation dans chaque pays. Pour les Etats-Unis, l’inflation revient essentiellement à la hausse des prix en raison de l’augmentation de la demande. Raison pour laquelle, la hausse des taux d’intérêt était essentielle afin d’absorber les liquidités et réduire la demande. Pour l’Europe, c’est différent. L’inflation tient à la baisse de l’offre à cause de la crise des chaînes d’approvisionnement qui a découlé des perturbations provoquées par la guerre entre la Russie et l’Ukraine et ses séquelles, de la hausse des prix du brut jusqu’aux produits alimentaires. Dans tous les cas, les décisions de politiques monétaires ne sont pas aisées parce que celles consistant à stimuler la croissance contredisent celles désirant contrer l’inflation.
— Quel est le défi majeur que le monde doit relever après ces crises successives ?
— Il y en a plusieurs. Mais le plus important est la hausse des cours de l’énergie qui est le moteur de la croissance et l’élément commun dans toutes les activités économiques quotidiennes. Aujourd’hui, les gouvernements cherchent de nouvelles sources d’énergie alternatives au gaz russe, parmi lesquelles figurent les énergies renouvelables soutenues et financées par la BEI.

— Que pensez-vous de la décision de certains pays européens de recourir à des sources d’énergie traditionnelles, comme le charbon à la place du gaz russe ?
— J’affirme que toutes les activités de la BEI sont conformes à l’environnement, raison pour laquelle nous l’appelons la Banque du climat. La banque n’est plus concernée par les projets des carburants fossiles depuis fin 2021, mais nous portons un grand intérêt aux nouvelles sources d’énergie et aux énergies renouvelables, et nous travaillons de près avec le Commission européenne en vue de consolider un mécanisme équitable de transition vers les énergies propres.
— Existe-t-il une contradiction entre la hausse de la croissance et de la production et la protection de l’environnement?
— Il n’y a aucune contradiction. L’investissement dans l’énergie nouvelle et propre ouvre des domaines de travail et de croissance. La préservation de l’environnement et du climat réduit les coûts des dégâts pouvant résulter du non-respect de ces deux secteurs. En outre, la technologie moderne dans le domaine des énergies renouvelables est moins coûteuse. Le plus important est de trouver un marché ouvert pouvant profiter de toutes ces alternatives et leur capacité à répondre aux besoins des populations.
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