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Gamal Bayoumi : Ces rencontres sont une grande occasion pour découvrir les potentiels et les opportunités en Afrique

Ola Hamdi, Mardi, 03 septembre 2019

L’ambassadeur Gamal Bayoumi, secrétaire général de l’Union des investisseurs arabes et ancien ministre adjoint des Affaires étrangères, revient sur les nouveautés de la TICAD VII et les avantages qu’apporte le modèle de coopération tripartite Egypte-Japon-Afrique.

Gamal Bayoumi

Al-Ahram Hebdo : En quoi se distingue la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD) des autres forums internationaux du même genre et comment ces rencontres profitent-elles au continent noir ?

Gamal Bayoumi : Ce genre de rencontres multilatérales — sino-arabes, sino-africaines, arabo-européennes — est d’une grande importance puisqu’elles permettent de renouer un dialogue de haut niveau entre les dirigeants africains et leurs partenaires internationaux dans le domaine du développement. Ces rencontres offrent aussi une grande occasion pour découvrir le potentiel du marché et les opportunités d’investissements dans les pays africains. La TICAD est l’un des plus anciens forums du genre, initié au début des années 1990. Pourtant, la présence japonaise n’est pas assez forte comme celle chinoise ou américaine dans le continent.

— Est-ce que le Japon a pu présenter, cette fois-ci, une nouvelle vision pour le développement de l’Afrique ?

— La TICAD VII a révélé que la vision japonaise envers la conception des aides pour le continent africain a beaucoup évolué. Elle mise davantage sur les affaires plutôt que sur les aides dans ses relations avec l’Afrique. Le Japon accorde une grande attention à l’Afrique, notamment après l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange africain qui offre un marché unique avec plus de 1,3 milliard de consommateurs. En outre, la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis, ainsi que les droits de douane imposés par Washington sur les importations du Japon, de l’Inde, de la Chine et à l’Europe elle-même versent dans l’intérêt de l’Afrique. Ce qui pousse les puissances économiques à commencer à commercialiser leurs produits sur des marchés non traditionnels, comme ceux de l’Afrique et du monde arabe. Il est nécessaire donc d’en bénéficier. Il y a aussi un geste d’ouverture de la part du Japon. Car il est connu que les Japonais n’aiment pas acheter des produits non japonais. La grande nouveauté de la TICAD VII vient également de la participation considérable du secteur privé nippon qui cherche de nouveaux marchés en Afrique.

— Un mémorandum de coopération tripartite entre l’Egypte, le Japon et l’Afrique a été signé en marge de la TICAD VII, quelle est son importance ?

— A mon avis, la coopération technique tripartite entre l’Egypte et le Japon à travers l’Agence égyptienne pour le partenariat pour le développement et l’Agence japonaise pour la coopération internationale (JICA) est d’une importance significative. La coopération Japon-Afrique ne cesse de s’épanouir ces dernières années. Cette coopération met en évidence la vision égyptienne selon laquelle l’Afrique a besoin d’investissements importants que l’Egypte et les pays africains ne peuvent fournir seuls. Ce qui est important ce n’est pas seulement la signature de l’accord par le Japon, mais aussi l’exemple qu’il donne aux autres pays ayant un excédent financier pour les inciter à sceller ce genre de partenariat avec l’Afrique. J’espère que le Fonds arabe pour le développement, ainsi que la Banque européenne d’investissement, et les bailleurs de fonds en Chine, en Inde, aux Etats-Unis et d’autres se rendent compte des avantages et des bénéfices qu’apporte le modèle de coopération égypto-japonais-africain.

— Les relations égypto-japonaises, vieilles de plus de 150 ans, ont connu une évolution à tous les niveaux, qu’en est-il ?

— La coopération égypto-japonaise s’intensifie d’année en année. Les compagnies japonaises investissent dans de nombreux secteurs en Egypte tels que l’éducation, la santé, l’électricité, l’énergie, le GEM (Grand Musée), mais il reste beaucoup d’autres domaines pour renforcer davantage la coopération entre les deux pays. Les échanges commerciaux entre l’Egypte et le Japon sont évalués à 1,26 milliard de dollars l’an dernier alors que les investissements ont atteint plus de 800 millions de dollars. Nous devons oeuvrer à augmenter ces chiffres.

— Et quels sont les profits tirés par la participation de l’Egypte à ce sommet ?

— Ils sont nombreux. Premièrement, sur le plan moral, elle transmet un message au monde que l’Egypte est un pays sûr dont le président fait la navette entre l’Europe et l’Asie, pour présenter au G7 et la TICAD VII la vision égyptienne sur la sécurité et le développement pour le continent noir. Autre avantage, celui d’attirer plus d’investissements étrangers en Afrique. A cet égard, les responsables japonais eux-mêmes ont salué les mesures prises par l’Egypte pour augmenter et attirer les investissements directs étrangers. De même, en marge du sommet, le président Sissi a tenu des discussions approfondies avec le premier ministre japonais, Shinzo Abe, pour renforcer la coopération bilatérale dans divers domaines, notamment l’éducation, l’enseignement supérieur, la culture, la technologie, l’énergie et les transports. Quant au niveau des relations afro-égyptiennes, les pays africains sont aujourd’hui plus confiants que la présidence égyptienne de l’Union Africaine (UA) offre un modèle d’action dynamique et distingué. Celui-ci commence également à porter ses fruits et cela non seulement pendant la présidence égyptienne de l’UA, mais également pour les années à venir.

— Quels sont donc les défis auxquels est confronté le développement économique de l’Afrique ?

— Bien que l’économie africaine ait enregistré une croissance remarquable ces dernières années et 7 des 10 économies dont la croissance est la plus rapide se trouvent en Afrique, le continent souffre encore d’un certain nombre de problèmes structuraux tels que la défaillance des infrastructures et des transports ainsi que le manque de banques, la corruption et la bureaucratie. La croissance africaine est confrontée aussi au défi de la dette. Le montant des fonds dépensé qui sort du continent pour rembourser ses dettes est beaucoup plus grand que celui qui y entre sous forme d’investissements. L’Afrique a encore besoin de plus d’efforts et d’une action commune pour surmonter ces défis et parvenir au développement durable tant souhaité.

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