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Hossam Aboul-Bokhari, Fondateur du Courant islamiste général : « J’appelle tous les Egyptiens à se dresser contre les tentatives de reconstruire cet appareil sanguinaire »

Osman Fekri, Mardi, 14 mai 2013

Fondateur du « Courant islamiste général », faction salafiste opposée au régime, Hossam Aboul-Bokhari est l’organisateur de la manifestation la semaine dernière devant les bâtiments de la sécurité nationale. Il met en garde contre un retour des pratiques oppressives des années Moubarak. Interview.

Hossam Aboul-Bokhari
Hossam Aboul-Bokhari

Al-ahram hebdo : Commençons par l’actualité. Comment interprétez-vous les récentes déclarations du ministre de la Défense, Abdel-Fattah Al-Sissi, dans lesquelles il a exclu la possibilité d’un coup militaire et a appelé les diverses factions politiques à trouver une forme d’entente ?

Hossam Aboul-Bokhari : Ces déclarations coïncident avec la nouvelle réalité égyptienne à laquelle l’armée a décidé de s’adapter. On peut considérer ces déclarations de deux manières : elles peuvent signifier un respect des règles de la démocratie qui exigent que l’armée soit loyale au président civil et qu’elle reconnaisse sa tutelle. Mais elles peuvent aussi s’interpréter autrement, non comme un refus de la part de l’armée de s’ingérer dans la vie politique mais plutôt comme une allusion à son implication effective. En fait, personne ne peut nier que l’armée est un acteur politique indirect. C’est l’héritage des 60 dernières années, et c’est aussi l’image et la conception que se font les Egyptiens de l’armée. Une idée qu’il faut changer si on veut créer un Etat civil et démocratique.

Mais votre discours ne ressemble pas à celui de beaucoup d’autres leaders salafistes qui n’hésitent pas à multiplier les accusations, et aux commentaires injurieux à l’intention de l’armée …

— Je suis contre ce genre de discours irresponsable, c’est l’antithèse du langage politique. Je suis pour le fait que l’armée soit soumise à une tutelle civile, mais je suis aussi pour le respect de notre armée et de toutes les autres institutions de l’Etat.

— La sécurité nationale est une autre institution à laquelle vous ne semblez pas vouer un grand respect. Vous êtes l’organisateur principal de la manifestation salafiste qui a eu lieu la semaine dernière devant son QG au Caire, des manifestations qui se sont terminées dans la violence …

— La Sécurité d’Etat, aujourd’hui rebaptisée « sécurité nationale », fait de son mieux pour réorganiser ses rangs et récupérer son pouvoir et son rôle. C’était le message lorsqu’elle a envoyé aux symboles des courants islamistes des invitations « pour faire connaissance ». J’ai pensé répondre à l’invitation mais autrement, à travers une visite collective, d’où l’idée d’organiser une manifestation devant son siège. C’était supposé être une manifestation pacifique, mais il se peut que des éléments infiltrés aient commis des actes de violence. Nous le dénonçons, tout en appelant les médias à être plus judicieux. Ceux qui s’inquiètent pour quelques pierres lancées contre un bâtiment doivent se rappeler les atrocités que cet appareil a commises tout au long des années Moubarak. Combien d’hommes, de femmes et d’enfants ont été torturés et tués dans ce complexe qu’on appelait, et à juste titre, le Guantanamo égyptien. J’appelle tous les Egyptiens à se dresser contre les tentatives de reconstruire cet appareil sanguinaire.

— Au niveau des relations étrangères qui prennent un cours un peu différent par rapport au passé, les craintes d’un prosélytisme chiite suite au rapprochement avec l’Iran sont-elles fondées selon vous ?

—prosélytisme chiite en Egypte et dans la région n’est pas une illusion, c’est un fait documenté. L’Egypte est un pays central dans ce projet. L’accession au pouvoir du président Morsi a ravivé les ambitions impériales des Iraniens du fait des vieilles relations qu’ils entretiennent avec les Frères musulmans via le Hamas. Il faut faire face au prosélytisme chiite par tous les moyens politiques, économiques et culturels tout en prenant garde de ne pas être utilisés comme fer de lance contre l’Iran pour le compte des pays du Golfe.

— Et finalement la question classique : quelle solution imaginez-vous à l’état de polarisation politique que vit l’Egypte aujourd’hui ?

— Je n’ai pas de solution magique, la situation est claire : l’ancien régime fait tout pour récupérer le pouvoir, ses hommes sont dans toutes les institutions. Le régime et l’opposition patriotique doivent se rapprocher et s’aider à neutraliser ces foyers et empêcher le retour du régime corrompu et dictatorial de Moubarak.

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