Jeudi, 28 mars 2024
Al-Ahram Hebdo > Au quotidien >

Privées de ressources à cause de leur nom

Dina Darwich , Lundi, 19 novembre 2012

Depuis la révolution, les institutions jadis parrainées par la famille Moubarak ont perdu toute forme de soutien. Elles tentent aujourd'hui de survivre comme elles peuvent.

privée1
Un groupe d'enfants font cercle autour d'une maquette du cours du Nil. (Photos : Mohamad Moustapha)

L’hôpital Suzanne Moubarak à Al-Tagammoe Al-Khamès, la bibliothèque Suzanne Moubarak pour l’enfant, l’école primaire Moubarak ... Autant d’institutions culturelles ou éducatives qui portent le nom de l’ancien chef de l’Etat ou de son épouse.

Depuis la révolution du 25 janvier, ces institutions ont perdu, à cause de leurs noms, toute forme de soutien. Elles sont placées sur la liste noire. Le Musée de l’enfant pour la civilisation et la créativité (voir encadré) fait partie de ces institutions. Le musée, dont l’objectif est d’encourager la créativité des enfants, était parrainé par l’ex-première dame.
Le musée est, avec trois autres projets de développement, géré par l’ONG Misr Al-Guédida. Mais depuis quelques mois, il fait face à de nombreux défis. « Depuis le déclenchement de la révolution, la plupart des médias s’abstiennent de couvrir nos activités. Ils nous boycottent. Pourtant, c’est un grand projet national. Les médias pourraient jouer un rôle important en invitant les familles à venir visiter ce musée. En présentant le projet, ils pourraient éclairer l’opinion publique sur le rôle de cette ONG qui doit poursuivre son travail malgré tout, même après le départ de Suzanne Moubarak. Malheureusement, les gens ont tendance à tout mélanger », explique Heba Kheireddine, responsable des relations publiques au musée. Selon elle, cette négligence est due au fait que le musée était parrainé par l’ex-première dame d’Egypte, Suzanne Moubarak.

Fin des donations
Le Musée de l’enfant pour la civilisation et la créativité dépend essentiellement des donations financières. Ces donations étaient fournies avant la révolution par des personnalités proches de l’ancien régime. Mais depuis la révolution, plus rien : le musée n’a pas reçu un seul centime.
« Nous dépendons seulement des revenus du musée, c’est-à-dire des billets d’entrée. Mais cette somme ne suffit pas à couvrir nos besoins. Nous avons par exemple des travaux d’entretien à effectuer et cela coûte cher. Nous essayons à présent de signer des partenariats avec des institutions internationales comme l’Unesco, afin d’avoir un appui financier », explique une responsable du musée.
Le billet d’entrée coûte 15 L.E. Mais certaines catégories ne payent pas, comme les orphelins et les handicapés. Les élèves des écoles publiques ont aussi droit à une réduction de 50 %. De plus, le musée organise des journées gratuites pour les enfants des bidonvilles. L’ONG Misr Al-Guédida tente tant bien que mal de maintenir ces activités, afin que le musée ne faille pas à son rôle culturel et social.
« Ce musée a besoin d’une stratégie pour assurer son entretien et afin qu’il puisse être modernisé et qu’il arrive à suivre les derniers progrès technologiques, ce qui permettrait d’attirer un plus grand nombre d’enfants », affirme Ossama Abdel-Waris, le directeur. Une stratégie, mais laquelle ? En effet, comment augmenter les recettes sans imposer de fardeau supplémentaire aux familles ? Le seul moyen est de trouver des sponsors mais ce n’est pas facile.

Garder l’esprit du musée
Les responsables du musée ont refusé catégoriquement l’installation de kiosques de fast-food, qui pourraient rapporter de l’argent car ces mets ne sont pas diététiques. « Nous cherchons des moyens de financement qui sont en accord avec nos principes et notre philosophie, comme la tenue de symposiums ou de concerts. Outre l’Unesco, nous tentons aussi de signer des accords de partenariat avec des organisations mondiales comme l’Union européenne, l’AFRICOM (Organisation africaine des musées) ou l’ICOM (Organisation internationale des musées), ce qui permettrait d’obtenir un financement. Notre objectif est de travailler d’égal à égal et non pas en tant qu’acquéreur de dons et de fonds », avance Abdel-Waris.
Fatma Moustapha, vice-directrice du musée, partage cet avis mais elle met l’accent sur le problème des moyens. « Nous avons besoin de ressources. Nous sommes un lieu qui respecte l’environnement. Tous les outils et matériaux utilisés par les enfants pour construire et colorier sont sans danger pour la santé. Ces outils sont, en outre, nettoyés de manière régulière : le musée accueille en effet jusqu’à 1 600 personnes par jour », dit-elle. Or, cette maintenance nécessite d’importantes sommes d’argent.
Le musée emploie 150 personnes dans différents départements, qui risquent de se retrouver au chômage si le musée ferme ses portes. La situation du Musée de l’enfant pour la civilisation et la créativité pousse à réfléchir et à se demander si tous les projets parrainés par l’ex-président ou son épouse subiront le même sort. Certaines institutions qui datent d’avant même l’arrivée de Moubarak ont des problèmes similaires, car parrainés par un membre de la famille de Moubarak. C’est le cas par exemple du Croissant-Rouge.
Le musée est aujourd’hui menacé de fermeture faute de moyens. La solution pourrait être une campagne médiatique pour inciter la population à aider cette institution.


Musée de l’enfant pour la civilisation et la créativité.
Adresse : 34, rue Abou-Bakr Al-Seddiq, Héliopolis.
Tél. : 00202- 2639 9915 - 264 2246
Fax : 00202- 2632 6126
E-mail : [email protected] : www.facebook.com/civilizationcreativity
Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique