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Padel : Sport, affaires et divertissement

Dina Darwich , Lundi, 30 janvier 2023

Depuis son apparition en Egypte il y a quelques années, le padel, un sport dérivé du tennis, du squash et du badminton, continue son expansion. Plus qu’une activité physique, c’est un moyen, pour les jeunes, de créer de petits projets et de se lancer dans le monde du business.

Padel : Sport, affaires et divertissement
On compte aujourd’hui environ 8 000 joueurs de padel en Egypte.

« C’est le sport des jeunes, et c’est aussi un business fructueux et prometteur ». C’est ainsi que s’exprime Ahmed Al-Khouly, étudiant à la faculté de pharmacie de l’Université allemande. Ce jeune homme de 21 ans possède actuellement six terrains de padel-tennis dont quatre au quartier d’Al-Tagammoe Al-Khamès et deux nouveaux tout récemment inaugurés à Cheikh Zayed, à la ville du 6 Octobre. « Nous sommes cinq associés, mes deux frères, deux amis et moi-même. Nous nous occupons tous de la gestion de ce projet », explique Al-Khouly. Et d’ajouter : « Quand mon frère a terminé ses études en pharmacie, il a rejoint une entreprise pharmaceutique. Outre ce travail routinier, il désirait exercer une autre activité professionnelle lui permettant à la fois d’augmenter ses revenus et de se distraire, autrement dit : joindre l’utile à l’agréable. Et comme on avait l’habitude de pratiquer le padel dans les stations balnéaires, on a décidé de lancer notre projet au Caire, et ce, après avoir effectué une étude de faisabilité. En d’autres termes, chercher les quartiers où investir et trouver les clients potentiels », raconte le jeune homme dont le projet ne cesse de se développer et de s’agrandir.

Une bonne ambiance règne sur le terrain de padel. La chanson « Guib Gol » (marque un but) de Afroto anime le court. Des jeunes, filles et garçons, d’âges différents pénètrent sur le terrain, alors que d’autres sont déjà installés sur des poufs pour suivre la compétition. « Ici, on passe un moment agréable. Le padel est l’un des rares sports que l’on peut pratiquer entre filles et garçons. Durant de longues années, les terrains de sport étaient souvent occupés par les garçons, principalement pour jouer au football. Aujourd’hui, le padel nous donne la possibilité de jouer ensemble », explique Nour Keraidy, 21 ans, étudiante en 4e année à la faculté d’ingénierie. Et d’ajouter : « Pour nous, c’est une sortie, l’occasion de se retrouver dans une ambiance décontractée et conviviale. Au lieu de s’attabler à la terrasse d’un café pour fumer une chicha, les jeunes peuvent passer leur temps à faire quelque chose qui leur plaît et qui sert en même temps à maintenir leur organisme en bonne santé. Il s’agit là d’un bouleversement dans la manière de se divertir ou d’organiser une sortie entre amis ».


De nombreux jeunes en font un divertissement, mais aussi un projet fructueux.

Du Mexique à l’Egypte en passant par l’Europe

Selon le site aft padel, ce sport est, en fait, à la croisée du tennis et du squash. Ludique et convivial, le padel est accessible à tous : joueurs ou anciens joueurs de tennis, débutants en sports de raquettes, sportifs motivés par la performance, juniors, seniors, entreprises, etc. Le terrain est clos, fermé par des vitrages surmontés de grillages en fond de court et de grillages sur les côtés. Un filet sépare les joueurs de chaque équipe comme pour le tennis. Et d’après le site Padel Rennais, ce sport est né au Mexique, avec Enrique Corcuera, qui a fait d’une contrainte spatiale un atout pour créer un nouveau sport. Désirant construire un court de tennis mais n’ayant pas assez de place dans sa propriété, il a décidé de bâtir de hauts murs autour d’un petit terrain de tennis et d’imaginer des règles différentes. Afin de mieux adapter la discipline au court, il a également décidé de créer une raquette non cordée, pleine et percée de petits trous : le padel est né ! Il semblerait que le nom donné à ce nouveau sport « le padel » vienne de sa signification : petit objet rond en bois. Les Hispaniques auraient traduit paddle en padel. Dans les années 1970, le padel a pris son envol en Espagne, après la visite du prince Alfonso de Hohenlohe-Langenburg à Acapulco. Ce dernier, séduit par le jeu, a fait construire des terrains à Marbella. L’Espagne a succombé au charme de ce sport et la construction d’autres terrains s’est multipliée.

En Egypte, le padel a vu le jour en 2014, mais ce sport n’était pas encore très connu et ce n’est qu’en 2020 qu’il devient en vogue, surtout après l’installation des terrains de padel à Hurghada, à la Côte-Nord, à Gouna, à Alexandrie et dans les différents quartiers du Caire. Dans une interview publiée au quotidien Al-Masry Al-Youm, l’ingénieur Ahmed Al-Ghatouri, président de la Fédération égyptienne de padel — en construction —, a déclaré qu’outre les avantages de ce sport, il est beaucoup moins cher que le tennis, et on peut jouer en tant que débutant ou joueur professionnel. « On compte aujourd’hui environ 8 000 joueurs de padel en Egypte, de différents niveaux. Nous cherchons à promouvoir le padel en organisant de nombreux tournois locaux et internationaux pour suivre les traces du squash. Nous avons également pris de nombreuses initiatives pour faire de l’Egypte la destination du padel dans la région, et cette année, 8 tournois internationaux ont été programmés en Egypte, devenant ainsi le quatrième grand pays au monde à accueillir des tournois internationaux, ce qui est une grande réussite », a-t-il déclaré au cours de l’interview.

Un sport pour tous

L’aire de jeu de padel mesure 20 mx10 m, les parois mesurent 4 m de haut sur les fonds du court et 3 m sur les côtés du terrain. On peut pratiquer ce sport en famille, comme l’explique Karim Mohamed, ingénieur de 24 ans qui a encouragé ses deux parents quinquagénaires à se lancer sur le gazon. « Il s’agit d’un sport intergénérationnel, facile à apprendre et à jouer. Rien de mieux que de s’amuser en famille. Le padel renforce la socialisation. On peut tisser des liens personnels avec un ou une partenaire et deux adversaires et faire connaissance avec de nouvelles personnes qui partagent la même passion, à savoir le padel. La communication entre les deux partenaires est indispensable », avance-t-il.

Aujourd’hui, ce jeu, qui suscite un fort engouement, a permis de créer une vraie communauté de passionnés de ce sport. « Sur Facebook, il existe une page intitulée Padel Finder qui indique les endroits dans différents quartiers où on peut pratiquer le padel, ainsi que les noms des joueurs avec qui on veut disputer un match suivant les niveaux (A, B ou C) », explique Marc Samir, comptable de 28 ans.

Un business juteux aussi

En fait, l’intérêt pour le sport et le business est une caractéristique qui s’est récemment généralisée auprès des jeunes, surtout après la pandémie de coronavirus. Le padel est l’un des sports à la croissance la plus rapide au monde, ce qui a encouragé beaucoup de jeunes à investir dans ce domaine. Le revenu annuel pour un stade est estimé à 360 000 L.E.

Après avoir terminé ses études d’ingénierie civile en Angleterre, Omar Al-Bokl, qui a regagné le pays, a décidé de se servir de la période du service militaire qui a duré une année pour lancer son nouveau projet. « Je suis un ex-joueur de squash, j’ai voulu profiter de la période de Covid-19 durant laquelle il fallait respecter la distanciation sociale. Et donc, au lieu de rester enfermé à la maison, la seule activité possible était ce sport. J’avais économisé une somme de mon travail à l’université dans le domaine du real estate (immobilier) et j’ai pu convaincre mon père et l’un de mes amis à entrer en partenariat avec moi avec un taux respectivement de 20 % et de 40 %. Et moi, j’ai payé le reste de la somme. Etant donné que j’ai de bonnes relations avec les membres de l’administration de l’école où j’ai fait mes études, j’ai pu donc y construire mon premier court de padel. Aujourd’hui, je possède 8 terrains », raconte Omar Al-Bokl, en disant qu’il s’agit d’un jeu en vogue, mais que les profits réalisés varient selon les saisons (été-hiver) car le climat est un facteur déterminant dans ce jeu. Il faut aussi prendre en considération les grands événements sportifs, le Mondial par exemple, qui pourraient avoir un impact sur ce genre d’affaires.

Il est vrai que la somme réalisée par jour pour un seul terrain peut atteindre les 1 000 L.E., cependant les risques existent. « Bien qu’il s’agisse d’un projet que les jeunes peuvent gérer, ce n’est pas si simple au niveau du financement et de l’expertise », explique Ahmed Al-Khouly qui, actuellement, entre en partenariat avec les propriétaires de terrains en échange d’un bénéfice, bien que ce soit lui qui construit les aires de jeu. « Il faut une somme entre 40 000 et 50 000 L.E. pour couler la dalle de béton, et ce, sans compter le coût des vitres, des filets, des raquettes, des balles, de la main-d’oeuvre, etc. Au début, je faisais appel à des sociétés pour construire les terrains de padel de A à Z. Mais j’ai fini par acquérir une petite expérience, ce qui me permet de réduire le coût de l’installation. Je confie la construction du terrain à un entrepreneur à qui je donne toutes les dimensions de l’aire de jeu, ensuite je m’adresse à un grossiste de verre pour ramener le type de vitrage dont j’ai besoin et ainsi de suite. Bref, j’achète les matériaux à la source », avance Al-Khouly qui, autrefois, louait le terrain à 300 L.E. l’heure, alors qu’aujourd’hui, le prix peut atteindre les 360 L.E., surtout après la dégringolade de la livre égyptienne face au dollar. « Les prix des raquettes et des balles, par exemple, qui sont importées ont subi une hausse. Celles-ci doivent être remplacées tous les six mois », ajoute-t-il.

Et ce n’est pas tout. Ce business a créé un marché qui gravite autour du jeu. A noter qu’un court de padel peut créer 8 emplois, selon Al-Bokl, en ajoutant qu’il faut également prendre en considération que certains investisseurs ont commencé, à leur tour, à fabriquer les tenues de sport nécessaires à ce jeu sans compter ceux qui importent les raquettes, les balles et les équipements des terrains. « Il s’agit d’un business fructueux, puisque l’Egypte est le numéro un en squash et actuellement, on est qualifié pour la Coupe du monde, ce qui va tailler une place au padel en Egypte », déclare Al-Bokl.

Mais une question s’impose : Est-ce qu’un jour on pourrait trouver des terrains de padel dans les quartiers populaires ? « Je ne pense pas. Ce n’est pas un sport populaire, mais plutôt un jeu proche du tennis. L’objectif de ce sport est d’offrir aux joueurs un moment de détente loin des tensions des gradins d’un stade de football, comme c’est le cas parfois », conclut Al-Khouly.

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