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Les puzzles, un jeu, un passe-temps, une passion

Hanaa Al-Mekkawi , Mercredi, 12 octobre 2022

Jouer au puzzle, ce n’est pas seulement se divertir. C’est en tout cas ce que pensent les fans de ce jeu qui ont créé une communauté sur les réseaux sociaux et ont organisé leur première compétition en Egypte, la troisième au Moyen-Orient. Focus.

Les puzzles, un jeu, un passe-temps, une passion
Les puzzles fabriqués localement se distinguent par les éléments de la culture égyptienne. (Photo : Ahmad Refaat)

Plus de deux heures et demie se sont écoulées dans l’attente, quand soudain les cris provenant de l’une des candidates se font entendre, annonçant que l’image de son puzzle est reconstituée. Un quart d’heure plus tard, une autre concurrente dit avoir fini d’assembler les pièces de son puzzle. Puis une troisième. Ce sont les trois premiers gagnants du Concours égyptien de puzzle qui se tient pour la première fois en Egypte. 120 participants des deux sexes, d’âges variés et venant de différents gouvernorats, se sont rencontrés dans une salle au Stade du Caire pour participer au jeu concours puzzles. Au début, chaque concurrent prend place à une table, avec une boîte fermée et bien enveloppée placée devant lui. Puis, tous les participants ouvrent les boîtes au même moment, pour dévoiler l’image, le masque de Toutankhamon, la même pour tous. Les parents des candidats et leurs amis attendent tranquillement, assis dans les gradins.

«  Nous sommes des férus de puzzles », se présente Waël Al-Sayed, en parlant de la communauté qui rassemble tous ceux qui sont passionnés par ce jeu. Fan de puzzles, il a fondé, avec une amie, Puzzle Station, une plateforme sur les réseaux sociaux qui représente ce groupe. Tout a commencé quand la pandémie de Covid-19 est apparue et nous a cloués à la maison. Le jeune homme a passé alors beaucoup de temps à jouer aux puzzles, son jeu préféré depuis sa plus tendre enfance. A l’époque, Waël avait du mal à trouver des puzzles, qui avaient presque disparu des rayons de magasins de jouets. Samar, l’une de ses amies, qui se plaignait elle aussi de ne pas en trouver, lui a proposé d’importer des puzzles pour eux et pour leur entourage.


Les fans rêvent de fonder une union égyptienne pour le puzzle. (Photo : Ahmad Refaat)

Loisir et activité cérébrale

A travers cette expérience, ils ont découvert que les fans de puzzles sont nombreux. Alors pourquoi ne pas se rassembler et constituer une communauté afin de partager leur passion, leurs expériences et leurs informations ? Et de là, une page sur Facebook et un site ont été créés. « Il ne s’agit pas seulement de vendre des puzzles, mais c’est toute une communauté de personnes intéressées par ce jeu plein de créativité », dit Samar Atef. Elle ajoute que ce groupe, qui rassemble actuellement près de 13 000 personnes, est prêt à échanger des expériences et informations dans ce domaine et le faire passer d’un simple jeu à un passe-temps plus séduisant et plaisant.

Sur la page et le site, poursuit Samar, on a la possibilité de répondre à des questions en ce qui concerne le monde de ce jeu. Nous passons également en revue les réalisations, nous nous distrayons et nous nous encourageons mutuellement. Cette femme considère le puzzle comme un élément bien présent dans sa vie, et ce, depuis son enfance. Lorsqu’elle est stressée, fâchée ou qu’elle cherche à se distraire, elle joue au puzzle. « C’est ma passion qui est devenue mon travail », dit Samar. Elle explique que son associé, Waël, et elle ont trouvé que le meilleur slogan pour leur communauté est « Mind spa », ou spa pour le cerveau. Car, selon elle, plusieurs études confirment que ce jeu est recommandé pour les gens de tous les âges, surtout les personnes âgées et les enfants atteints de ADHD (trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité), car il aide à la concentration, baisse le stress et empêche la détérioration des cellules du cerveau.


Chaque joueur a sa propre technique. (Photo : Ahmad Refaat)

Compétition et exposition

Tic-tac, le temps passe, les chronomètres dans les mains des organisateurs et sur les tables des candidats sont en train de compter le temps qui passe et le stress commence à se faire sentir. Sourcils froncés, quelques joueurs se mettent debout, relèvent leurs manches et font bouger les pièces partout sur leur table. Ce grand concours est le premier du genre qui se déroule sur terrain, deux autres ont été organisés lors des années précédentes, mais en ligne et avec moins de participants.

Les lignes du masque du jeune pharaon commencent à paraître sous les doigts des participants. « Cette reconstitution compte parmi les plus difficiles », dit Karim, 15 ans, qui participe aussi et avec d’autres comme organisateur pour l’événement. 500 pièces pour reproduire une image dont la majorité du dessin est de la même couleur et avec des détails qui se ressemblent. Devant une table qui expose plusieurs puzzles à vendre, Karim pointe du doigt certains puzzles qui se distinguent par leurs grandes dimensions et avec la même couleur comme la mer, le ciel, la montagne, ou tous ensemble, pour donner des exemples de puzzles difficiles à reconstituer, en ajoutant aussi le nombre de pièces et leurs tailles. Ceux pleins de détails sont considérés aussi difficiles. « Le puzzle permet de faire exercer ses capacités cognitives tout comme d’autres sports physiques », dit Karim, fier de voir enfin un vrai tournoi de puzzles. « Et pourquoi pas ? Car ce jeu n’est pas moindre que les jeux électroniques pour lesquels on organise des compétitions à travers le monde ».

En attendant que les joueurs progressent, une exposition tenue attire les personnes qui souhaitent savoir davantage sur ce jeu et en acheter. Salma, 18 ans, est en train de choisir une image de puzzle qui lui plaît, car après l’avoir reconstituée, elle compte l’accrocher dans sa chambre comme elle a l’habitude de le faire. « Après avoir constaté que les murs de ma chambre sont presque tous couverts de multiples réalisations, j’ai décidé de vendre quelques-uns de mes puzzles. C’est à travers la communauté que j’ai appris que cela pouvait se faire », dit Salma, qui a acquis beaucoup de connaissances grâce à ce groupe. Là, les passionnés du puzzle peuvent apprendre comment le mettre dans un cadre, car il existe plusieurs moyens de le faire. Comment les transporter à l’aide d’une planche en plastique, ou même voyager et sortir avec son puzzle grâce à un matelas gonflable qui se plie et se range dans une boîte cylindrique facile à porter. On peut aussi exposer ses puzzles encadrés pour les vendre.

Un des coins les plus distingués est celui où sont exposées les multiples réalisations faites par des Egyptiens. Des personnages folkloriques, des tableaux de peintres célèbres, des scènes de cinéma et d’autres encore. « Nos puzzles représentent les éléments les plus célèbres de la culture égyptienne, et c’est ça qui les distingue et leur ajoute de la valeur », dit Moustapha Fathi, fondateur de la première entreprise égyptienne de fabrication de puzzles. Il est fier que le puzzle utilisé dans le premier tournoi en Egypte soit fabriqué localement et avec une image ancienne qui est le masque du roi Toutankhamon.


Les fondateurs de « Puzzle Station » et les trois gagnants. (Photo : Ahmad Refaat)

Selon Racha Ibrahim, représentante dans une compagnie de start-up, du point de vue business, tout ce qui concerne le puzzle garantit des projets prometteurs. Racha regrette qu’on importe de grandes quantités de boîtes de puzzle, mais qu’on n’en fabrique pas suffisamment ici. « On a des usines de carton et des gens qui ont des idées, mais qui ne savent pas comment se connecter ni comment se lancer dans ce genre de projet, et c’est notre rôle prochainement de faire changer la situation », dit Racha, en affirmant que cela a déjà commencé et que même si la compétition est difficile avec les jeux importés, du point de vue qualité, la situation ira en s’améliorant.

Concentration et patience

Plus le temps passe, plus les couleurs et les détails du masque royal commencent à paraître. On constate bien la différence entre les techniques utilisées par les joueurs. Il y en a ceux qui ont commencé par trier les pièces par couleurs, d’autres par rassembler toutes les pièces du masque au milieu pour laisser ceux des rebords à la fin et d’autres, au contraire, ont reconstitué d’abord les bordures. « La pratique est très importante dans ce jeu et fait la différence du point de vue des compétences du joueur », dit Imane, 31 ans, professeur à l’université, la gagnante. Férue de puzzles, elle raconte que quand elle était étudiante, elle en jouait pour pouvoir se concentrer sur ses études. Et quand elle a un problème à résoudre, elle joue pour mieux réfléchir.

Sans aucun regret, Amal accepte d’être la deuxième gagnante après avoir été classée deux fois la première aux tournois qui se sont déroulés précédemment en ligne. « La compétition est agréable et va nous encourager à faire de notre mieux les prochaines fois ». Amal, professeur de mathématiques, affirme qu’elle a appris la patience grâce à ce jeu qu’elle pratique depuis son enfance et qu’elle est capable de reconstituer une image comptant 6000 pièces. Elle a sa page personnelle et son blog où elle partage avec les autres sa passion et ses réalisations. Une fois que les gagnants ont reçu leurs prix, une autre compétition a commencé pour les enfants de 4 à 16 ans, avec plusieurs images, selon les âges. « Cette fois, il s’agit d’une expérience pratique pour laquelle on a suivi tous les critères des tournois de puzzles qui se déroulent dans le monde, et le prochain pas sera de fonder une union égyptienne pour le puzzle afin de pouvoir participer aux tournois internationaux », conclut avec assurance Waël.

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