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ESCALES : Se reconstruire après un traumatisme

Samar Al-Gamal , Samar Al-Gamal , Mardi, 11 janvier 2022

Deuil, maladie, accident, séparation … Des experiences traumatisantes qui peuvent bouleverser la vie. Rebondir est pourtant possible grâce à un processus qui s’apprend.

Se reconstruire après un traumatisme

«C’était comme un cyclone dans ma tête. Mon souffle s’est arrêté, mon coeur battait la chamade et une chaleur brûlante me montait vers la gorge et le visage. Et puis, un froid a engourdi le bout de mes doigts et de mes pieds », raconte-t-elle dans ses mémoires. « Apprendre que mon mari avait une relation extraconjugale, c’était d’abord un coup de fusil, puis de la confusion, puis de la tristesse. La colère est venue plus tard, après le divorce ».

Qui est-elle ? Peu importe. Divorce, trahison, échec, décès d’un être cher, accident, licenciement, enfance problématique, on est tous passé par une épreuve difficile à une certaine période de notre vie. Le choc, suivi d’une lente descente aux enfers, est identique, à quelques différences près. Perte du sommeil, perte ou gain de poids, isolement, symptômes psychosomatiques : perte d’énergie ou problème de dos, douleur au ventre ou à la tête. Vacillation, des hauts, un peu, et des bas, beaucoup. Et soudain, un rebond.

La nature humaine est construite sur la capacité à se guérir automatiquement sans nécessité de grande intervention tout comme une blessure ou une infection, une forme de défense naturelle, une résilience innée. C’est cette capacité insoupçonnée à rebondir après un traumatisme quel qu’il soit : physique ou psychologique. Il y a des divergences, certes, un même événement ne provoque pas le même impact chez tout le monde. Le processus, les traits de personnalité, l’histoire personnelle, l’entourage psychoaffectif, ladite immunologie psychique entrent en jeu. Chacun a son propre cheminement de résilience. Mais il y a aussi de l’acquis dans cette résilience. Plus la blessure est profonde, plus une intervention ciblée est requise : une psychiatrie, un sociologue, un coach ou simplement un ami qui peut nous guider à surmonter ce traumatisme.

Mais c’est quoi un traumatisme ? Physiquement, un traumatisme correspond à toute blessure physique qu’une personne subit, que ce soit voulu ou non, et qui résulte d’un choc, d’un coup, d’une pression. Psychologiquement, c’est une expérience pénible ou désagréable, qui ne colle pas à sa vision du monde, qui entraîne des effets émotionnels ou mentaux généralement pendant une longue période. Cela implique la création de souvenirs émotionnels sur l’événement pénible qui sont stockés dans des structures profondes dans le cerveau. Le trauma est l’événement en lui-même et le traumatisme ce qui en découle. Les plus résilients le dépassent progressivement et reprennent une vie normale. D’autres ne s’en remettent pas facilement et restent relégués dans la première phase du choc ; de l’effroi et avec une culpabilité de l’autre ou de soi-même et revivent intensément, contre leur propre volonté, l’expérience traumatique. Dans les cas extrêmes, et si la réaction, qui doit durer au maximum quelques mois, est prolongée et devient chronique, la victime ne peut que consulter un psychiatre, qui probablement va prescrire des médicaments. Il s’agit ici d’une névrose traumatique.

Neuf étapes

Les spécialistes définissent 9 étapes par lesquelles passe la personne. Le choc, le déni, la colère, le marchandage, la tristesse, la résignation, l’acceptation puis enfin la reconstruction ou la renaissance. C’est un processus biologique, affectif et psychique. Les experts comptent, dans ce processus, sur l’activation de l’appréciation de la vie chez les victimes. C’est cette dynamique de vie interne qui aide. Il s’agit ensuite de ressortir les émotions, toutes, les plus intenses, les faire ressortir de la bouteille. Laisser parler, cela peut prendre un certain temps, car le plus souvent, la victime est emprisonnée dans le « pourquoi ? ».

Un moyen très utile pour surmonter cette phase est d’établir une nouvelle routine qui pousse la personne surtout à bouger à s’engager avec la vie. Du sport, par exemple. L’idée est de réparer le système nerveux en créant de nouvelles voies neurales et l’adrénaline créée libère les endorphines qui aident à réparer le système nerveux en concentrant sur les sensations physiques au lieu de retomber dans les émotions avant de passer au « quoi ». Qu’est-ce que je peux apprendre de cet évènement, quelle leçon ?

Tirer le bien du mal

C’est ce qu’on appelle les effets positifs du traumatisme. L’épanouissement qui suit un traumatisme. « La croissance posttraumatique », pour utiliser le terme créé dans les années 1990 par les psychologues Richard Tedeschi et Lawrence Calhoun pour décrire les cas de personnes ayant subi une profonde transformation suite à divers traumatismes ou circonstances éprouvantes. Les études ont montré que 70 % de ces personnes présentaient un développement psychologique positif. « L’ouverture à de nouvelles opportunités, des relations sociales plus satisfaisantes, une vie spirituelle plus riche et une impression de transcendance doublée d’une sensation de force personnelle », écrivent-ils dans leur livre Wired to Create : Unravelling the Mysteries of the Creative Mind.

Ici, nous sommes dans le « comment ». Comment pourrai-je être une nouvelle version de moi-même ? Se fixer de nouveaux objectifs, redéfinir sa propre identité. Suite à un trauma, nos valeurs, nos perceptions traditionnelles et notre monde intérieur sont secoués, rendant le moi profond accessible. La douleur fend l’armure de la persona.

D’après les deux psychologues, « la façon dont le traumatisme ébranle notre perception du monde, nos croyances et nos identités est similaire à un tremblement de terre. Les structures les plus fondamentales de notre esprit et de notre foi s’écroulent face à la magnitude de l’impact (…) Plus la secousse est importante, plus il faut lâcher prise et abandonner les anciennes convictions afin de repartir sur de nouvelles bases ».

Beaucoup transforment leur drame en oeuvre créative : peinture, musique, poésie, sport ou en devenant une plateforme pour venir en aide à ceux qui traversent un épisode douloureux. Les psychologues ont démontré que l’on ressentait souvent davantage d’empathie et d’altruisme suite à une expérience traumatique, et une nouvelle envie d’agir dans l’intérêt collectif.

 

Pour s’en sortir …

Bouger

Faire de l’exercice pendant plus de 20 minutes, 3 jours par semaine. Gym, natation et danse sont très utiles.

Ne pas s’isoler

Faire un effort pour maintenir les relations et éviter de passer trop de temps seul.

Respecter les émotions

Se permettre de ressentir ce que l’on resent lorsqu’on le ressent et l’accepter.

Prendre soin de sa santé

Un corps sain augmente la résilience.

Etablir une routine. Manger, se réveiller et dormir aux mêmes heures.

Demander de l’aide

Si les sentiments perturbent le quotidien, se diriger ver un expert.

Sachez que …

Chacun a son propre parcours de résilience.

La tristesse, le deuil et la colère sont des réactions naturelles.

Pleurer est tout à fait normal.

Il faut du temps pour donner du sens à ce qui s’est passé.

Il n’est jamais trop tard pour surmonter un traumatisme.

Se reconstruire après un traumatisme

Psychiatre, psychologue, coach, qui, quand ?

Le psychiatre :

Est un médecin qui a fait une spécialisation en psychiatrie et il est le seul à pouvoir prescrire des médicaments psychotropes et peut traiter les troubles psychiatriques graves comme les troubles bipolaires, la schizophrénie, l’anorexie, etc.

Le psychologue :

A un diplôme universitaire en psychologie et n’a pas fait d’études de médecine. Il ne peut pas délivrer d’ordonnance médicale. Il est souvent formé à une forme de psychothérapie (psychanalyse, thérapies cognitivo-comportementales, systémie, etc.) et peut aider dans la thérapie de couple, la phobie, l’anxiété, la dépression et le manque de confiance en soi.

Le coach de vie :

Travaille avec des personnes qui n’ont pas de troubles psychiatriques et intervient pour le développement personnel et le bien-être. Il accompagne son client à reformuler et à atteindre des buts qu’il s’est fixés. Il s’appuie sur différentes approches et techniques pour guider ses clients vers une transformation. Le « psy » est essentiellement tourné vers le passé, mais le coach se concentre sur les blocages actuels à lever et les solutions concrètes de court terme.

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