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ESCALES : Osons dire « non » !

Samar Al-Gamal, Mardi, 26 octobre 2021

Derrière le « oui » se cache souvent un « non » que nous n’avons pas le courage de formuler. Pourtant, l’affirmation de soi passe avant tout par ce « non » si difficile.

 Osons dire « non »

« Pourquoi ai-je accepté alors que je n’en avais pas envie ? ». La question n’est pas inaccoutumée. Combien de fois disons-nous « oui » alors que nous voulons dire « non » ? Combien de fois acquiesçons-nous, et regrettons-nous plus tard de l’avoir fait, en se sentant coincés, contraints à consacrer un temps à quelque chose qui nous déplaît ou qui semble sans aucun intérêt? Combien de fois utilise-t-on ce « oui » de mauvaise qualité?

Pour certains, refuser est facile, mais pour beaucoup d’autres, « non », c’est l’un des mots les plus pénibles, surtout avec les plus proches. Une question d’habitude peut-être. On l’apprend depuis notre plus jeune âge. Encore enfant, les émotions sont exprimées librement, mais le petit veut être accepté, aimé par ses parents. Vite, il apprend que la vie sera plus simple s’il fait simplement ce qu’on lui demande. Le « oui » est porteur d’approbation et d’amour. Du coup, ce comportement commence à être pressenti comme normal, et une fois adulte, on ne se demande même plus pourquoi on le dit.

Le problème est que chaque fois qu’une démarche est prise sur cette voie, la personne s’éloigne de plus en plus d’elle-même, notent les psychologues. Derrière chaque « oui de mauvaise qualité » se cache un « non » à soi-même. Nous ne sommes pas uniquement irrités envers la personne qui nous a demandé, mais nous nous abandonnons.

Et ce conflit interne est le plus souvent destructeur, d’autant plus que nous nous attendons à ce que l’autre personne sache intuitivement, comprenne, apprécie vraiment et apprécie ce que nous faisons pour elle. En conséquence, nous pouvons nous attendre à quelque chose en échange. Une faveur. Après tout, quand nous faisons l’effort d’accepter le souhait de quelqu’un, pourquoi ne voudrait-il pas rendre le geste? Ce qui donne lieu à un sentiment de déception, simplement parce que l’autre n’est pas au courant de ce conflit interne. Et ce sentiment est au fond né de notre propre attitude et incapacité à exprimer honnêtement ce que l’on pense ou ressent, et non pas à cause d’autrui.

Creuser dans l’inconscient

 Osons dire « non »

Savoir pourquoi on accepte quand, au contraire, on veut refuser permet de rendre de « bonne qualité » notre acquiescement comme notre refus. Or, il y a d’innombrables raisons pour lesquelles nous acceptons ce qui est inacceptable. Certaines sont faciles à déchiffrer et figurent sur la surface, d’autres sont plus refoulées dans notre subconscient.

Tout d’abord, pour savoir dire non à quelque chose, il faut savoir pourquoi on veut dire oui. Selon les spécialistes, le désir de plaire est le plus grand motif. L’Etre humain est souvent à la recherche de l’approbation sociale. Un aval extérieur qui nourrit inconsciemment l’obligation de dire oui. C’est une dynamique assez subtile, car la plupart d’entre nous ne croit pas que nous soyons si contrôlés en voulant être aimés. Sous ce conditionnement plus au moins automatique figure aussi la peur d’offenser, la peur de décevoir, la culpabilité, la peur d’être jugé ou taxé d’égoïsme, le devoir, la crainte de déclencher une crise ou un conflit, ou encore la peur de rater quelque chose dit le « syndrome fomo » ou l’anxiété de ratage.

Pour qu’un « non » intervienne, il faut d’abord identifier, reconnaître, puis faire la paix avec ses peurs et ses désirs. Une prise de conscience est ainsi la première étape. La démarche suivante sera de détecter chaque situation où l’on cherche à adopter un comportement agréable vis-à-vis d’autrui. Chercher le pourquoi derrière le « oui », mais entrer en guerre avec soi-même. C’est un processus qui prend du temps. Une fois le cycle brisé, les sentiers nerveux commencent à se briser et se forge la voie pour de nouvelles habitudes. C’est uniquement quand le motif derrière le comportement émerge au niveau de la conscience, que le « oui » peut être remis en question: « Pourquoi je veux dire oui? Qu’est-ce que je veux vraiment ? ».

Dans son livre Essentialism : The Disciplined Pursuit of Less (faire moins, mais mieux! L’art d’être réellement efficace), Greg McKeown suggère de classer les demandes sur une échelle de 1 à 100. Si l’invitation ou la demande est inférieure à 90, déplacez-la vers 0 et refusez poliment. « Si quelque chose est juste ou presque assez bon, alors la réponse devrait être non », écrit-il. Cela vous permet de filtrer les oui, afin d’avoir un objectif clair derrière chaque décision. Une fois que la réponse est là, il ne reste plus qu’à passer à l’acte: dire non et s’y tenir. Lorsque nous savons clairement ce que nous accepterons et n’accepterons pas, nous nous rapprochons de notre « Soi » authentique. Dire non, c’est apprendre à se dire oui à soi-même.

Dire « non », ça s’apprend ! Voici quelques astuces :

1 Pour commencer, prenez du recul en disant: « Je ne suis pas encore sûr, puis-je vous répondre plus tard ? ». Prenez le temps de répondre.

2 Commencez à travailler sur vos phrases de refus, comme : « Je préfère vous dire non maintenant plutôt que de vous décevoir plus tard » ou « Je suis désolé, j’ai d’autres choses à faire ». Réfléchissez par avance à ce que vous voulez dire.

3 Pratiquez seul chez vous.

4 Commencez par dire non aux petites choses, avant de passer aux plus grandes propositions.

5 Choisissez au début un autre moyen que le face-à-face pour commencer: lettre, mail, coup de fil

6 Soyez honnête, ferme, mais avec grâce.

Sachez que …

  • Vous ne devez rien à personne. Vous n’êtes pas responsable de la réaction de quelqu’un d’autre.
  • Vous êtes responsable de la création de vos limites et frontières saines. Les frontières se construisent, elles ne se créent pas naturellement.
  • Si vous voulez changer une situation, changez vous-même d’abord.

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