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Le voile si je veux

Manar Attiya, Lundi, 13 mai 2013

Pour faire cesser les intimidations contre les jeunes non voilées, 11 mouvements féministes et plusieurs ONG ont lancé au sein des etblissemts scolaires une campagne intitulée « La violence contre les filles dans les écoles publiques et privées ».

Le voile si je veux
Le ministère de l'Education ferme ses portes devant les manifestants. (Photo : Yasser Al-Ghoul)

La campagne a été lancée la semaine dernière sur Facebook. Ghadir Ghandine, diplômée de lettres, section anglaise, en a eu l’idée après avoir reçu un message intitulé Sawret al-banate (la révolution des filles), racontant l’histoire de Bassante Abou-Zeid, une élève de 16 ans qui a été rudoyée par la directrice de son établissement tout simplement parce qu’elle ne portait pas le voile (voir portrait).

Bassante n’est pas la seule à avoir subi un tel sort. « 16 filles de l’école Al-Ormane à Agouza, 4 dans l’établissement scolaire Al-Gamaa Al-Islamiya pour filles à Zeitoun et 2 à l’école Al-Farouq Al-Islamiya, située à Héliopolis. D’autres cas ont été également enregistrés à Louqsor, Minya, Kafr Al-Cheikh et Charqiya. Il n’y a pas de chiffres précis mais la violence contre les élèves, surtout celles qui ne portent pas le voile, est en recrudescence. Le drame est que la plupart des établissements scolaires veulent imposer le port du voile sur l’uniforme de l’école. Et, toutes celles qui ne le portent pas sont soumises à des formes d’humiliation ou de violence, inacceptables de nos jours », confie Ghadir Ghandine, tout en ajoutant que toutes les personnes ayant visité la page Facebook ont voulu participer au sit-in. En parcourant cette page qui compte 57 785 visiteurs, la photo d’une enseignante apparaît, tentant de couper de force les belles tresses d’une jeune fille.

Conscients de la gravité du problème, 11 mouvements féministes, plusieurs ONG et des victimes de violence se sont rassemblés devant le ministère de l’Education pour exprimer leur colère face à de tels châtiments dans les écoles, car toute sanction, qu’elle soit physique ou morale, est destructrice pour l’enfant. Les objectifs-clés de la campagne sont de convaincre le ministère de l’Education d’interdire toute forme de violence envers les filles dans les établissements scolaires.

Le voile si je veux
(Photo : Yasser Al-Ghoul)

« Nous travaillons sur Internet et en même temps dans la rue. Nous avons l’intention de lancer plusieurs campagnes de sensibilisation et avons besoin d’un soutien plus ferme de la part du ministère qui doit mettre en place des comités de surveillance dans les établissements scolaires, pour sanctionner tout enseignant ou directeur qui soumet les élèves à des châtiments inhumains. Il faudrait installer dans les écoles des caméras qui permettront de dévoiler de tels châtiments », conclut Yara Sallam, directrice du programme de défense des droits des femmes à l’ONG Nazra.

Bassante, rudoyée par la directrice

Bassante, rudoyée par la directrice
Bassante et sa mère participent au sit-in du ministère. (Photo : Yasser Al-Ghoul)

La scène a lieu dans l’école publique Al-Ormane, dans le quartier de Agouza, au Caire. La directrice de l’école décide de couper les cheveux et les ongles à Bassante Abou-Zeid, une adolescente de 16 ans, parce qu’elle ne portait pas le voile, puis la gifle devant toutes ses camarades. Ensuite, la directrice a contraint les autres élèves à la frapper ; elle l’a entraînée dans les toilettes et lui a versé le contenu d’une poubelle sur la tête. « Sous ma douleur, Bassante s’est écroulée par terre et a perdu connaissance. La directrice nous a interdit de l’aider. Elle n’arrêtait pas de la traiter de petite chienne », raconte son amie Amira. « Mes camarades de classe ont été forcées de me frapper car la directrice les a menacées de baisser leurs notes de l’année », dit Bassante. Sa mère lance, révoltée : « C’est scandaleux qu’une adolescente de 16 ans, en 2e année secondaire, une élève studieuse, calme et de nature obéissante, soit soumise à un tel châtiment. Qu’elle soit voilée ou pas, ma fille est libre de faire ce qu’elle veut ».

Quand Bassante reprend connaissance dans les toilettes, elle a du mal à se relever et à marcher. Pourtant, elle rejoint sa classe. Sous le choc, elle reste muette et ne verse pas une seule larme. Elle saigne de l’oreille et la douleur lui est insupportable. Traumatisée, elle n’ose en parler à sa prof de peur d’être frappée de nouveau. Bassante terminera ses cours sans recevoir de soins dans l’établissement scolaire.

En rentrant chez elle, elle raconte ce qui lui est arrivé à ses parents. Furieuse, la mère décide d’aller voir la directrice qui ne formule pas d’excuses, ce qui multiplie la colère.

« On a déposé une plainte contre cette directrice. L’une au commissariat de Agouza pour insultes et maltraitance. Une deuxième au bureau de la direction de l’éducation et l’enseignement à Guiza et une troisième au Parquet général pour le même motif. Nous avons raconté en détail tout ce qui s’est passé. Nous ne comprenons pas cette recrudescence de violence en milieu scolaire. Le ministère ne fait rien pour que cela cesse. Il faut sanctionner sévèrement le personnel éducatif qui enfreint la loi. Ma fille a besoin de voir un psychologue tellement elle est choquée. Cela ne va pas être facile pour elle de revenir dans cette école si cette directrice est toujours là », conclut le père.

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