Jeudi, 25 avril 2024
Al-Ahram Hebdo > Mode de vie >

Je ne suis pas extraterrestre, mais je ne suis pas foot !

Hanaa Al-Mekkawi , Mercredi, 07 décembre 2022

La Coupe du monde attire des millions de fans. Mais il y a aussi ceux qui n’aiment pas le foot et se sentent agacés par ce Mondial sur lequel se portent toutes les attentions. Focus.

Je ne suis pas extraterrestre, mais je ne suis pas foot !

La Coupe du monde, un événement universel suivi par des millions de fans à travers la planète. Un enthousiasme général qui règne dans différentes villes du monde, et pas seulement au Qatar, où se tient la compétition. Ici aussi, même si l’équipe nationale ne participe pas à la compétition, les discussions vont bon train. Nombre d’Egyptiens, peuple féru de foot, arrangent leur emploi du temps pour regarder les matchs, emplissent les cafés, soutiennent telle ou telle équipe, pronostiquent, s’emballent …

Et pourtant, il y a aussi ceux qui ne s’y intéressent pas du tout. Ou pire, ceux qui détestent le foot et pour lesquels le Mondial est un vrai cauchemar. «  Je n’ai jamais compris où est le plaisir de regarder 22 millionnaires en train de courir après un ballon! Tandis que des hommes qui se battent pour vaincre une pandémie qui menace l’humanité, ou des enseignants qui élèvent les futures générations, ne sont pas bien payés ni même mieux considérés que ces joueurs », s’exprime Ahmad Nagui, ingénieur de 44 ans, démontrant sa haine pour le foot. Un point de vue qui n’est pas du tout apprécié par son entourage, comme il le dit, parce que pour tout le monde, ces joueurs méritent chaque sou qu’ils gagnent et toutes les facilités qu’on leur accorde uniquement pour continuer à faire ce qu’ils font. « Parfois, je rencontre des gens absolument démunis attablés dans des cafés, prêts à payer un café ou thé juste pour suivre un match. Parfois, ils déboursent le peu d’argent qui leur reste au café. Pour eux, le foot est une échappatoire, ça les rend heureux. Et cela prouve que le foot sert avant tout de lavage de cerveau. On l’utilise pour détourner les peuples de leurs problèmes et c’est pareil partout dans le monde. Au lieu de penser aux choses sérieuses, on s’intéresse aux nouvelles du foot, ses victoires, ses défaites et ses scandales », s’insurge Galal Sobhi, un avocat de 32 ans, tout en ajoutant qu’il suit seulement les matchs de sélection égyptienne. Là, explique-t-il, il soutient son pays et non pas le jeu.

Des virages qui dérangent

Le jeune homme reprend les paroles de l’écrivain anglais Rudyard Kipling qui a dit que le foot était le nouvel opium du peuple et que seules « les âmes perdues peuvent jouir de la vue d’idiots passer un ballon entre leurs jambes ». En effet, mêler la politique au foot est la cause qui a poussé certaines personnes à détester ce sport, le plus populaire au monde. C’est le cas de Karim Réfaat. Durant toute sa vie, il attendait les matchs de son équipe préférée et suivait ses nouvelles. Il supportait, criait, s’énervait et aussi insultait comme tout le monde. Mais deux incidents graves, comme il les décrit, l’ont obligé à tourner le dos au foot. Le premier, c’est lors du match entre l’Egypte et l’Algérie qui avait eu lieu en 2009 et a été suivi par des actes de violence. La relation entre les deux peuples est restée tendue pendant longtemps et personne n’a oublié. Un autre événement qui a affecté Karim, c’est le drame qui s’est déroulé en 2012 au stade de Port-Saïd, lors d’un match entre deux équipes majeures. 73 personnes ont perdu la vie suite à des violences.

« Lorsque le jeu n’est plus sport, plaisir visuel et compétition loyale, mais problèmes et des querelles constantes, le football est déformé ». C’est là l’un des avis publiés sur une page Facebook intitulée « Non au football ». Le slogan de la page est non à l’exploitation, non au fanatisme, non à tous les désagréments du football. Ahmed Adel, spécialiste de la technologie et fondateur de la page, explique que le but est de rassembler tous ceux qui partagent avec lui la haine du football pour trouver un espace où s’exprimer librement, car ils ne sont pas les bienvenus dans les autres pages. Son aversion au foot a commencé très tôt, lorsque Adel, encore enfant, était privé des dessins animés pour que son père puisse voir les matchs. Plus tard, à l’école, à l’université puis au boulot, n’importe quel événement était négligé pour un match de foot. Du coup, Adel a choisi de pratiquer d’autres disciplines, jamais du foot. « Je voulais prouver à tout le monde que le sport, ce n’est pas uniquement le foot. Mais sans résultat. A présent, je suis convaincu que le foot n’est pas du sport », dit Adel.

L’occasion de profiter d’autre chose

Ce dernier, qui possède une compagnie privée, ne peut comprendre comment les employés peuvent quitter leur travail tôt ou même s’absenter et mentir juste pour un match. Adel en a assez, car pas seulement au boulot, mais chez ses parents, avec ses amis, on ne parle que de foot et on doit suivre le match ou on se bagarre pour donner son avis, puisque tous les amateurs de foot se prennent pour des experts. Et même chez lui à la maison, la situation est horrible: « Ma femme est fan de foot et les enfants que je n’ai pas pu sauver de ce virus ont suivi son exemple. Je n’y ai pas réussi car je suis comme un oiseau qui chante seul hors de la bulle dans une société et un monde qui considèrent le foot comme une chose sacrée ». Adel préfère quitter la maison lors des grands matchs, d’abord pour ne pas rester enfermé seul dans une chambre et aussi pour ne pas voir sa femme crier et insulter.

Adel, comme tous ceux qui détestent le foot, et sont considérés par l’autre camp comme des extraterrestres, ne sont, en fait, pas fâchés, ils essayent de profiter de leur temps, mais à leur manière. « Moi aussi, j’adapte mon calendrier et mes horaires pour faire mes courses en profitant de la fluidité de la circulation », dit Ahmad Nagui. Les moyens de transport sont vides, les salles de sauna et de gym aussi, et d’autres options se présentent devant eux pour passer le temps. « Le fait d’utiliser la Coupe du monde pour soutenir l’homosexualité et installer des idées sociales m’a fait camper sur mes positions et conserver mon opinion initiale selon laquelle le football est utilisé pour contrôler les esprits, et donc je suis parti en vacances à Alexandrie, car la réservation d’un billet de train était plus facile », conclut Karim.

Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique