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A la recherche de l’innovation

Manar Attiya , Mercredi, 14 septembre 2022

Importante plateforme d’entrepreneurs sociaux, l’organisation Ashoka se définit comme un réseau d’acteurs pour le changement. Un concours vient d’être organisé pour sélectionner une nouvelle génération d’entrepreneurs. Focus.

A la recherche de l’innovation
La dernière promotion sélectionnée par l’organisation Ashoka Egypte.

Dina Yousri n’est qu’un exemple parmi tant d’autres qui répond aux critères imposés de l’ONG Ashoka. Agée de 29 ans, elle a lancé son site Web gratuit, en juin 2021, intitulé «  Gounela ». Un site spécialisé dans la confection des jupes. Dina a tout de suite reçu des courriers électroniques et en quelques mois, elle a dépassé le cap d’un million de clients en Egypte et dans différents pays arabes. Cette jeune fille assidue a prouvé son talent, sa créativité et sa détermination dès le début de sa carrière. Diplômée en physio-biologie, ce qui n’a aucun rapport avec son métier, Dina est devenue une couturière et une tailleuse hors-pair et même animatrice couture. Mais, avant de se lancer, elle a visité des blogs et lu des articles qui parlaient de techniques de base de la couture. Elle a regardé des vidéos sur YouTube et a beaucoup appris en autodidacte.

Sa passion pour la couture explique comment elle en est venue à confectionner ses vêtements. « Je ne porte que des vêtements faits main. C’est bel et bien l’envie de porter des pièces uniques et originales qui me pousse à coudre mes robes, mes jupes et mes pantalons. Il ne faut pas non plus nier l’argument économique. Aujourd’hui, le prêt-à-porter coûte trop cher. Lorsque je vois une pièce du commerce qui me plaît, je me dis souvent que pour ce prix-là, je peux aussi bien m’en coudre deux », dit Dina avec fierté. Actuellement pour Dina, coudre est devenu un métier et un art de vivre. Mais avant d’entamer le pas, elle s’est d’abord posé la question: « Pourquoi ne pas créer mon activité de couture? Et je me suis lancée dans l’aventure ». Aujourd’hui, Dina exporte ses vêtements faits main vers le Koweït et l’Angleterre.

Cinq critères de choix

En fait, Dina est l’une des entrepreneuses sociales faisant partie de la dernière promotion sélectionnée par l’organisation Ashoka, le plus grand réseau mondial d’entrepreneurs sociaux qui a organisé récemment une conférence, ainsi qu’un concours pour sélectionner une nouvelle génération d’entrepreneurs. L’objectif d’Ashoka : chercher à identifier des entrepreneurs qui ne se définissent pas eux-mêmes comme entrepreneurs mais qui ont déjà une idée à haut potentiel. L’accès est extrêmement sélectif. A la suite d’une série d’interviews, l’ONG a élu 20 Fellows (collaborateurs) parmi les 500 candidats, jeunes filles et jeunes hommes, dont l’âge varie entre 18 et 40 ans. C’est une nouvelle génération d’entrepreneurs qui pourraient contribuer à la création d’un monde meilleur à la fibre sociale aiguisée.

Possédant un réseau de contacts en Egypte et ailleurs, avec le ministère des Affaires sociales, le ministère de la Jeunesse et du Sport, celui de l’Education, l’Onu, cette ONG tente de soutenir les entrepreneurs sociaux. En général, les projets sont financés par des hommes d’affaires ou par d’autres organisations concernées basées au Koweït ou en Arabie saoudite. Les frais des projets 2022 sont à la charge de l’association saoudienne « Al Walid pour l’Humanité ». Ashoka parraine ses « Fellows » venus de tous les gouvernorats d’Egypte.

« Je suis fier de compter parmi les membres de l’organisation à la suite d’un parcours initié depuis un an déjà. Je souhaite remercier tous les responsables et l’équipe d’Ashoka qui ont cru en mon idée et m’ont soutenu dans mes moments difficiles. Aujourd’hui, une nouvelle phase commence avec comme mots d’ordre: plus d’innovations et plus d’impact ! », s’exprime un jeune entrepreneur lors de la dernière conférence qui a été organisée la semaine dernière par Ashoka.


Encourager le sport dans les écoles contribue à mettre fin au décrochage scolaire.

En fait, les membres sont choisis en fonction de cinq critères principaux pour faire le bon choix: idées novatrices, talents de créativité, influence sociale, fibre éthique, et surtout qualités entrepreneuriales (ténacité et persévérance). Un comité est chargé d’évaluer si ces candidats répondent aux cinq critères. « Notre rôle est de jeter la lumière sur ces personnes, présenter leurs expériences humaines afin qu’elles deviennent un exemple à suivre pour chaque jeune », explique Dr Imane Beibars, directrice régionale de l’organisation Ashoka Moyen-Orient.

« Favoriser et encourager la pratique du sport au sein des écoles publiques va, sans doute, contribuer à mettre fin au décrochage scolaire et faire baisser le taux d’absentéisme ». C’est l’idée du Fellow 2022 de Mohamad Mahmoud Al-Aqqad qui espère fonder une petite académie sportive pour le bien des élèves sous le nom de « l’Académie des futures stars ». Al-Aqqad a réussi à appliquer cet exemple à l’intérieur de 5 écoles dans quelques quartiers défavorisés. « Par le truchement de l’équipe d’Ashoka, j’aurais l’opportunité de contacter les responsables au sein du ministère de la Jeunesse et du Sport, le ministère de l’Enseignement supérieur, ainsi que le ministère de l’Education pour effectuer ce système au sein de toutes les écoles égyptiennes », dit-il.

Trois prix

En fait, le jour où Imane Beibars a créé Ashoka Arab World en 2003, elle était convaincue que le Moyen-Orient regorgeait de personnes dynamiques qui s’efforcent de lancer de nouveaux projets ayant un impact fort et durable. Depuis, les responsables de l’antenne d’Egypte encouragent les futurs entrepreneurs sociaux à identifier les problèmes de société et préciser les causes sous-jacentes pour élaborer les solutions adéquates. « Nos jeunes sont l’avenir de notre région et nous avons besoin de plus de jeunes, acteurs du changement, pour assurer un meilleur avenir », souligne Dr Randa Hakim, responsable des projets des jeunes au sein du bureau d’Egypte.

Ashoka applique en fait la même stratégie de Bill Drayton, fondateur de l’ONG aux Etats-Unis au début des années 1980. Actuel président d’Ashoka et travaillant dans le monde des affaires, Bill Drayton a conçu l’entrepreneuriat comme un élément central du développement et du changement social. Vu le succès sans précédent, aujourd’hui, Ashoka soutient 3 500 entrepreneurs sociaux dans 92 pays dans les quatre coins du monde.

Au cours des quatre dernières années, la montée des entrepreneurs sociaux a connu un boom en Egypte par le biais de différentes initiatives d’Ashoka. Depuis plus de 20 ans, cette ONG identifie, soutient, met en réseau et fait connaître des entrepreneurs sociaux innovants : des individus qui apportent des solutions radicalement nouvelles aux enjeux sociétaux, que ce soit dans le domaine de l’éducation, de la santé, de l’environnement, de la lutte contre l’exclusion, du développement économique, etc.

Walid Ibrahim (Fellow Ashoka 2016) a réussi à monter un projet qui a du sens pour lui et pour les autres. C’est un groupe associatif surnommé Malameih Sinawiya (aspect sinawi) fondé à Bir Al-Abd, au Nord-Sinaï. Aspect sinawi essaie de développer des modèles inspirés du riche patrimoine égyptien. La mission de l’association est d’identifier et de développer les compétences professionnelles des femmes du Sinaï, demandeuses d’emploi. Car celles qui habitent dans cette région se démarquent par leurs compétences en broderie, du fait qu’elles cousaient et brodaient des vêtements avec des fils en coton dont la couleur principale est le vert et le jaune. Une vaste sélection de produits artisanaux locaux, confectionnés par 100 femmes du Sinaï, éblouit les clientes, surtout les touristes. Sacs ou tapis tissés à la main, abayas ou costumes traditionnels, tissus d’ameublement brodés, foulards ou châles sinawis, masques brodés, accessoires, etc. De belles opportunités qui s’annoncent pour celles qui voudraient s’engager dans cette nouvelle forme d’entrepreneuriat indirect qui change le monde. « Ces femmes et jeunes filles travaillent chez elles pour ne pas transgresser les moeurs et les traditions de leurs tribus, tout en s’occupant de la maison et de leurs enfants », note Walid Ibrahim.

Après 6 mois d’apprentissage, un concours est programmé par Ashoka en vue de sélectionner les trois projets les plus importants. Les gagnants seront récompensés. Le premier prix équivaut à 50000 dollars, le deuxième à 20000 dollars et le troisième à 10000 dollars. « Chaque Fellow Ashoka 2022 déploie des efforts consentis en vue de remporter un des trois prix », conclut Dr Imane Beibars.

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