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Amira Shawky : Si on exploite comme il faut ses richesses, l’Afrique deviendra bien riche

Sabah Sabet , Mardi, 08 février 2022

Trois questions à Dr Amira Shawky, professeure de ressources naturelles à la faculté des études supérieures africaines de l’Université du Caire, sur les opportunités et les défis de l’énergie renouvelable en Afrique.

Amira Shawky

Al-Ahram Hebdo : Tout d’abord, quelles sont les sources d’énergie renouvelable en Afrique et comment les exploiter de manière optimale ?

Dr Amira Shawky : L’Afrique possède de nombreuses ressources renouvelables qui peuvent fournir de l’énergie hydroélectrique, éolienne ou solaire. Le continent possède par exemple un fort taux d’ensoleillement. L’Afrique renferme la 3e grande surface désertique du monde, comme par exemple le désert du Kalahari, avec plus de 300 jours d’ensoleillement par an. Cette région à elle seule peut produire de l’énergie solaire capable de couvrir pas seulement les besoins de l’Afrique, mais aussi d’autres régions du monde. Pourtant, jusqu’à maintenant, cette ressource n’est pas suffisamment exploitée alors que de tels projets pourraient soutenir le développement économique au continent. En Afrique, il existe aussi à peu près 17 fleuves à travers lesquels on peut produire de l’énergie hydroélectrique. Selon les chiffres, l’Afrique peut produire 10 térawatts d’énergie solaire, 350 gigawatts d’énergie hydroélectrique et 110 gigawatts d’énergie éolienne. Si on exploite comme il faut ses richesses, l’Afrique deviendra bien riche.

— Mais pourquoi donc ces richesses ne sont-elles pas exploitées ?

— Le manque de financement et d’investissements dans les domaines de l’énergie renouvelable est le premier défi. Face aux domaines nouveaux, les investisseurs sont souvent un peu réticents, d’autant plus avec la situation sécuritaire instable et la menace terroriste qui pèsent sur certains pays africains. Le manque d’expérience et de technologies modernes qui coûtent cher présente un autre défi de taille. En outre, il y en a certains pays qui ne veulent pas s’engager dans l’énergie renouvelable et préfèrent la laisser comme un stock stratégique. Je pense aussi qu’il y a de l’injustice en ce qui concerne l’offre des facilités financières de donateurs internationaux. Il y a une contradiction entre la demande des pays puissants de réduire les émissions nuisibles et le manque d’aides allouées aux pays africains pour les soutenir dans la transition énergétique, notant que si on exploite bien ces ressources naturelles, le continent sera l’une des régions les plus riches du monde. Or, l’ironie est que malgré toutes ces richesses, le continent n’arrive même pas à répondre à ses besoins en électricité.

— Des pas sérieux ont tout de même été réalisés …

— Oui, bien sûr, surtout au cours de la dernière décennie. Certains pays ont entrepris des démarches, d’autres sont devenus des pionniers en la matière. Selon les dernières statistiques des instances concernées, le recours aux énergies propres en Afrique augmente dans un contexte de baisse spectaculaire du coût des technologies des énergies renouvelables, avec des investissements du secteur privé dans certains pays comme le Maroc, le Kenya, le Sénégal et la Zambie. Ces derniers ont permis d’obtenir des tarifs parmi les meilleurs du monde pour le solaire photovoltaïque. En outre, cinq pays africains (Cameroun, Guinée, Kenya, Mozambique et Tunisie) ont présenté des projets d’investissement ambitieux sur le renouvelable lors du Marché de l’Energie en Afrique (MEA), qui réunissait mi-décembre gouvernements, secteur privé et partenaires au développement. Le Mozambique, par exemple, a fait des prouesses en la matière. Et l’Egypte a réussi à réaliser d’importants progrès dans ce domaine, mais aussi à transférer son expertise à certains pays avec des projets d’énergie solaire dans 4 pays africains (Ouganda, RDC, Erythrée et Djibouti), avec un don présenté par l’Initiative égyptienne du développement des pays du bassin du Nil.

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