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Ruines du crépuscule

Traduction de Suzanne El Lackany, Mardi, 27 août 2013

L'amour comme ultime salut. C'est la devise de la poétesse Magda Saadeddine, qui part sur les traces du soufi Al-Chérazi et avoue être touchée par un feu imperceptible. Ces quelques vers sont tirés de son recueil de poèmes Toloul al-ghassaq.

litterature
Peintures de Hosn Charq, 1999 et 2000

Notre destin commun était l’éloignement des demeures.

Je vis dans l’impatient désir de nous retrouver

Je porte en moi une certaine tristesse

Pour un temps révolu dans mon coeur.

Mes demeures ne sont plus qu’une empreinte

Que les nuits ont éparpillée

Les vents un jour l’ont emportée

Entre ce coucher du soleil et ce crépuscule làbas

Pour que je vive une si longue nuit

La lune va-t-elle apparaître ?

J’avais tant d’espoirs un jour

Qui ne sont plus que des ruines maintenant

Regrettant ces nuits-là.

Aujourd’hui, je suis encore vivante

Et demain, un souvenir fera naître des larmes

dans les yeux

Et une nostalgie s’en ira arpenter plusieurs

pays.

temps passé,

Pourrais-tu revenir un jour accompagné des

demeures ?

Tu les as tant aimées ?

Reviendras-tu en apportant ces ombres

Qui habitaient mon coeur avec ses passions ?

Ceci est notre voyage dans le temps éphémère,

Et c’est là où se trouvent mes rêves que j’ai

disséminés un jour autour de la lune.

litter.
Peintures de Hosn Charq, 1999 et 2000

chamelier de la caravane,

Je ne sais que choisir dans le temps qui passe

Arrête-toi devant ma demeure

Lance un salut

Fais couler des larmes

Sur les ruines où j’ai répandu mon coeur.

Mes jours les voilà

Mes jours sont passés

Entre les larmes de tant d’yeux qui pleurent.

temps passé,

Vas-tu revenir dans la maison du bien-aimé ?

Et dans ces demeures où souffle le vent du sud

entre les murs

Et le recueillement à l’intérieur des parois ?

Ce sont mes jours passés que je pleure.

C’était un coeur amoureux

Qui est parti avec ces nuits.

Ce sont des jours disparus

En laissant des aspirations au coeur.

Tout est perdu

Entre ce coucher du soleil et le crépuscule de

là-bas.

Je retrouve un temps lointain quelque part

Où ma mère tant aimée et mon père apparaissent.

Ils avaient dans le coeur une place à part

Et un coin dans l’âme.

Les jours nous ont séparés et ils sont loin des

yeux.

Ce fut un départ au coucher du soleil

Je pleure la perte de ce coeur et de cette source

qui jaillissait

J’aspire à retrouver ces nuits

Et ce visage amène et chaleureux

Et le chagrin des mots

Mon désir est ardent.

J’habite encore ces jours

Pourtant les ruines et les souvenirs viennent

m’assaillir.

Ces jours n’étaient qu’un mirage

Ces demeures n’étaient que des formes tracées

Je ne suis qu’un spectre flottant dans le temps

Il s’absentera un jour et partira.

Ce sont des jours vécus entre le coeur et la

source qui jaillissait

Je leur ai donné un abri entre les paupières

Car ces yeux cherchaient la paix de l’âme.

Ce sont des jours qui n’existent plus

Ce sont des nuits qui ont pleuré

La lune perdue qui habitait un jour ma demeure

Et un soleil évanescent à l’horizon

Dans l’amour du lieu habité.

C’est un temps passé

Il y a si longtemps.

Où sont mes dessins ?

Où se trouve désormais ce lieu ?

Et ces demeures ?

Un jour ce fut le départ,

Au crépuscule, la nuit allait tomber.

Ce temps est passé

L’aimé est si loin

Et moi, ai-je habité ce temps avec mon coeur

Et des tendres regards ?

Là-bas, il y avait un jour ma maison et ma

demeure.

Papillons rêveurs et havres des passions

Zéphyrs des amours

Je suis une exploratrice. Dans mon parcours,

je suis pleine d’amour. Me voici devenue lune

et soleil. Je pars. Je voyage, pour voir l’amour

et la passion dans ces pays où ils sont faits de

lumière.

Je voyagerai et j’explorerai ces demeures par

amour pour ceux qui les habitent.

Je voyage à travers un itinéraire de lumière.

J’avance dans un périple d’amour et de

passion.

Par amour, par passion, pouvons-nous faire

nos prières, que Dieu écoutera, car nous nous

consumons d’amour ?

Je voyage, à travers ma quête je cherche la

source de la passion après la soif des jours

et des années, comme un papillon qui brûle

d’amour et qui s’élève vers la lumière.

La lumière est le refuge de ceux qui savent et

elle est connaissance de ceux qui ont trouvé la

voie. Chemin d’amour et de passion.

Je porte les passions vers les demeures

d’amour.

Je dissémine des poèmes et des dessins

représentant l’amour et la passion.

Dans mon voyage, l’amour m’a vaincue.

Je passe autour des demeures de l’aimé, puis

je pars et disparais au loin.

L’amour sublime me porte au-dessus des rives

et des villes, des rivages et des fleuves, pour

que j’entende la flûte de la magie et la huppe

parmi les feuilles des arbres. L’être appartient

au Maître. L’amour appartient au Créateur.

Je passe par les demeures à travers un rêve

flottant. J’ai été vaincue par l’amour.

Je voyage, entre extase et consomption,

Je propage mes vers dans le temps du départ

Vagabondant, prise d’amour et de passion,

possédée par les émois du coeur.

Je vais d’ici de là comme les étoiles avec les

arbres

Et la nuit avec la lune, par amour envers le

Créateur de l’amour.

Je suis indécise parmi chaque demeure,

rêveuse quand il s’agit d’amour,

Mes pérégrinations me feront aboutir à ma

destination,

La passion m’a consumée, l’ardeur m’a

envahie par l’éclat de la lumière. Je suis

semblable aux cierges qui brûlent avec

ferveur. J’entends la flûte magique me faire

une confidence sur l’amour. L’amour qui

mène à Dieu. Et j’entends aussi le murmure

des feuilles, puis la chute de la pluie.

Nos yeux pleurent sur les spectres et les ombres

fugaces. Chez nous, la pluie est tombée et nos

fleuves sont en crue. Nous savons alors que

nous avons aimé et créé pour vivre et pour que

vive l’existence d’un temps avançant dans les

terres lointaines, pour arriver jusqu’au maître

des apparitions, le créateur des ombres.

Zéphyr de la passion et de l’amour

Dans le coeur

C’est le souffle et le murmure du vent

Le temps me fait passer comme passent les

nuages

Je ne suis plus qu’un souvenir, tandis que la

passion noie mon coeur d’amour, dans un

tourbillon de la passion entre crépuscule et

coucher du soleil.

Je répands notre histoire au-dessus des sables

Pour que la lune dans la nuit l’apprenne

Et les étoiles

Et les arbres.

La brise de la magie me demande : Tu es

amoureuse ?

L’amour me laisse perplexe comme une lune

L’amour m’entraîne autour des globes célestes,

pareil au tournoiement des arbres et des étoiles.

Et le soleil

Et la lune.

Le couchant attire chaque élément après tant

d’amour qui nous comble et l’épanchement des

passions. Que j’aime ! Que j’adore !

Magda Saadeddine

Née en 1952 dans le gouveronrat Ménoufiya, elle est à la fois peintre, critique artistique et poète. Avec un doctorat en philosophie de la critique artistique obtenu en 1990, elle est professeur assistant à l’Académie des beaux-arts. Elle a publié nombre d’essais et d’études dans le domaine artistique comme Nehad Bahgat et Les Murmures de la folie en 1997 aux éditions Alef, un essai sur le peintre Mahmoud Saïd en 1994, un autre sur la gravure sur cuir en 1992. Son premier recueil de poèmes est intitulé Toloul al-ghassaq en 2008, dont le poète Farouq Choucha a célébré l’écriture soufie.

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