
Les rencontres de Rimini sont aujourd'hui à leur 40e édition.
Le meeting de Rimini, ce rendez-vous annuel qu’accueille l’Italie, encourage l’amitié entre les peuples et le dialogue entre les différentes religions. L’ambiance ressemble un peu au forum de Davos, sauf que là, il ne s’agit pas d’économie, mais plutôt de coexistence. La 40e édition de cet événement a eu lieu il y a environ deux semaines avec près d’un million de participants, dont des intellectuels et des activistes venus du monde entier pour promouvoir « l’acceptation de l’Autre ». Parmi les organisateurs du meeting figure l’ONG catholique Communion et libération, qui encourage l’ouverture de la société italienne aux autres religions et cultures. Le flux migratoire a notamment suscité le besoin de renforcer les ponts avec la culture islamique. La présence parmi les organisateurs du meeting du professeur Waël Farouq, qui enseigne à l’Université catholique de Milan, a encouragé la présence arabe et islamique à cet événement, et la participation d’institutions, comme la Bibliothèque d’Alexandrie, à son organisation. L’islamologue français Olivier Roy, professeur à l’Institut universitaire européen de Florence, a été parmi les invités distingués de cette dernière édition et a participé à un débat animé par le chercheur égyptien Waël Farouq. Roy avait publié des ouvrages et des articles sur la laïcisation et l’islam, dont L’Islam mondialisé et L’Echec de l’islam politique, et est connu pour sa vision de l’islam radical, différente de celle de beaucoup d’autres islamologues. Olivier Roy évoque aussi dans ses écrits les excès de la laïcité qui provoquent une résistance islamiste.
Le retour du religieux
Au meeting de Rimini, il était difficile de trouver une place dans la conférence-débat ayant pour invités Olivier Roy et Mohamad Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale. Tout le monde s’attendait à un duel intellectuel, mais Olivier Roy a réitéré ses idées déjà avancées dans ses ouvrages, dont certains ont été traduits en arabe, comme La Sainte ignorance, publié en 2013 aux éditions Al-Saqi.
Au cours de la conférence, il a abordé la question du « retour du religieux », non pas comme l’expression d’identités culturelles, mais comme conséquence de la mondialisation et d’une crise culturelle. Roy considère que l’alliance du politique et du religieux est dangereuse à tous les niveaux. Il souligne que la religion est une pratique individuelle alors que la politique concerne tout un peuple. D’après lui, la religion prospère sous la laïcité. La religion, comme on l’a souligné durant le meeting de Rimini, reste l’un des piliers de l’identité dans les sociétés occidentales, en raison de la présence d’immigrants pratiquants qui s’installent dans ces sociétés avec des idées et des valeurs inspirées de la religion. Quant aux sociétés arabo-islamiques, la question qu’elles se posent c’est si l’islam est la cause de leur régression ou si, inversement, la laïcité est le secret du développement de l’Occident. Tandis que les intellectuels occidentaux produisent un « nouveau christianisme » en phase avec leur esprit critique, les sociétés arabes restent préoccupées par un lourd héritage qui entrave leur mouvement. Les courants religieux conservateurs veillent à la protection de leurs intérêts, et l’islam politique tue dans l’oeuf toute tentative de réforme. L’oppression politique, par ailleurs, paralyse les efforts individuels de laïcisation. Cela dit, tout le monde s’accorde à reconnaître le danger que représente Daech et son djihadisme mondialisé.
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