
Le groupe Zebda, lancé en 1995, chante la Palestine.
« Une vie de moins » est une chanson qui raconte la courte vie d’un Palestinien qui a poussé ses premiers cris dans la bande de Gaza et qui y a rendu l’âme. « Je suis né dans un pays qui n’existe pas. Je suis né sur une terre qui n’est plus à moi. Une terre occupée, une terre piétinée. Une terre autonome sur le papier. Je suis né sous les youyous et les cris de joie, je suis né après bien d’autres dans le camp trop étroit ».
Ecrite en 2012 par Jean-Pierre Filiu, la chanson a été censurée avant même d’être « sortie ». Ayant passé trois ans dans les tiroirs censeurs du Paysage Audiovisuel Français (PAF), ses interprètes, chanteurs toulousains d’origine maghrébine ont décidé de la rechanter coûte que coûte en 2015 … ailleurs que sur Youtube !
Effectivement, il y a environ trois ans, les utilisateurs des réseaux sociaux ont failli crier victoire, parce que Zebda, leur groupe fétiche, a chanté pour les Gazaouis, suite à une guerre sans merci orchestrée par les troupes du Tsahal. Seulement voilà, le Crif (Comité représentatif de la communauté juive et la culture hébraïque de France) a réagi dans l’immédiat en avançant que les paroles de la chanson déformeraient la réalité, l’histoire et la géographie d’Israël.
Suite à leur appel, la chanson a d’emblée été interdite de diffusion. Même la radio Beur FM, porte-parole des communautés arabes et musulmanes de France et RFI Orient — Afrique du Nord n’en ont diffusé que quelques extraits, « à titre informatif », pour évidemment ne pas s’attirer les foudres du PAF.
Aussi, pendant leurs concerts présentés dans les salles françaises et lors des festivals européens, Majid Cherfi et ses compères, membres du groupe Zebda, ne pouvaient-ils pas braver l’interdiction de chanter Une Vie de moins, par crainte d’un scénario macabre.
Des surprises en 2015
« Nous nous contentons du franc succès que notre chanson a rencontré sur la Toile, durant ces trois dernières années. Nous nous réjouissons également de la publicité indirecte que la Droite française nous a, involontairement, dédiée. Mille merci au Crif », lance le chanteur Majid Cherfi, avant d’ajouter : « Nous envisageons de la chanter ailleurs. Dans les pays du Maghreb ou en Palestine par exemple, au risque de ne pas nous reproduire en France. Même si au fond de chaque membre d’entre nous, l’envie de rester sur la scène est la plus forte. Nous réservons bien des surprises à notre public arabe en 2015 ».
S’étant offert une trêve d’activités musicales pendant huit ans environ, jusqu’en 2011, « pour des raisons personnelles », selon Majid, le groupe toulousain a repris du service ces derniers temps et a brandi l’étendard de la liberté d’expression artistique.
En 2014, Majid, Mouss et les autres sont de retour sur les bancs des lycéens et universitaires avec l’album Comme des Cherokees. Les chansons de cet album n’incluent pas la chanson « incriminée », mais renouent avec l’habitude du groupe qui consiste à tourner à la rigolade certaines habitudes maghrébines, comme le téléphone arabe, les amitiés tissées avec tout le voisinage, les « inchallah » qui remplacent les virgules dans la quasi-totalité des conversations des Maghrébins et on en passe …
C’est d’ailleurs grâce à leur humour désopilant qu’ils sont ce qu’ils sont aujourd’hui, malgré une semi-décennie d’absence. A titre d’exemple, s’ils s’appellent Zebda (beurre en arabe), c’est parce qu’ils ont « découvert » qu’il s’agit de l’ingrédient phare qui existe dans tous les plats maghrébins. Mais ce n’est pas le seul « clin d’oeil » qu’ils ont fait à leur pays d’origine et public maghrébin. Leur chanson Ouallaladisme, qui a cartonné lors du début des années 2000, en est un autre. Une chanson dont le titre parle de lui-même et que les francophones comprennent bien …
Rappelons que le groupe a été révélé aux grands publics francophones en 1995 grâce à son premier album Le Bruit et l’odeur, suivi d’une deuxième sortie en 1998 intitulée Essence ordinaire. En 1999, leur chanson Tomber la chemise reçoit plusieurs dizaines de distinctions et reste en tête du Top 50 français pendant deux ans. Son histoire : un jeune Maghrébin raconte la vie des cités, avec ses hauts et ses bas, non sans humour. L’humour, avec eux on est toujours bien servi .
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