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Mawlana et Zayni Barakat : danser sur les airs du passé et du présent

May Sélim, Lundi, 09 décembre 2013

Le chorégraphe et metteur en scène Monadel Antar puise dans la littérature et l’Histoire et aborde à travers la danse contemporaine la déception au nom de la religion. Il donne Mawlana d’après le roman d’Ibrahim Eissa et Le Rêve des veilleurs d’après l’histoire de Zayni Barakat.

Mawlana
Un duo en répétition. (Photo : Bassam Al-Zoghby)

Mawlana d’après l’oeuvre d’Ibrahim Eissa et Le Rêve des veilleurs d’après l’histoire de Zayni Barakat constituent les deux nouvelles créations présentées par la compagnie de danse-théâtre en une seule soirée. Ces deux nouvelles versions choré­graphiques signées par Monadel Antar rapprochent le présent du passé et décrivent comment les hommes du pouvoir peuvent manipuler le peuple au nom de la religion.

Dans Mawlana écrit en 2012, Eissa évoque la mode des prédicateurs stars des chaînes de télévision. Il retrace l’histoire du cheikh Hatem Al-Chénnawi qui trompe son public au nom de Dieu et qui se permet de tout faire pour son intérêt. Quant à Zayni Barakat, il s’agit de l’histoire d’un ministre qui prétend être pieux et qui utilise tous les moyens pour imposer son pouvoir, voire son despo­tisme en Egypte pendant la période mamelouke. « Mawlana m’a beaucoup touché par son langage et son aspect psycho­logique. Le conflit interne que vit le personnage principal m’a incité à le présenter sur scène », explique Monadel Antar, directeur de la compagnie de danse-théâtre.

Dans Le Rêve des veilleurs, il s’inspire non seulement du roman his­torique de Gamal Al-Ghitani qui date de 1971, mais aussi de l’ouvrage de l’historien Ibn Iyas Badai alzouhour fi wakaie aldouhour. Entre le présent et le passé, la déception au nom de la religion s’avère être une technique adoptée par les hommes du pouvoir. « Je ne joue pas de la politique », pré­cise Antar. Pourtant, les scènes proposées dans les deux chorégraphies font allusion au contexte de fourberie et de prétention de notre quotidien.

L’espace scénique dans les deux chorégraphies garde sa sobriété. Seuls la disposition des danseurs, le mouvement de leurs corps, leur entrée et sortie sur scène et le jeu d’éclairage conçu par Amr Al-Achraf proposent une scénographie variée.

Antar a recours à des chansons arabes et des mélodies orientales dans la plupart des scènes. Il opte pour des musiques et des paroles bien significatives. Les danseurs dansent sur des airs soufis, des chansons populaires évoquant l’art de la tradition orale de la sira (la geste) et du mawal, le single algérien en succès Zina de la troupe Babylone ou encore la voix attrayante de Dina Al-Wadidi. La musique à l’image de la danse évoque aussi un air arabe bien particulier.

La confrontation, élément crucial

Dans ses propres versions chorégraphiques, Antar mise sur le jeu de confrontation. Dans Mawlana, le cheikh Hatem Al-Chénnawi est interprété par deux protagonistes : un comé­dien qui récite de temps en temps des discours du roman et un danseur qui exprime par son corps son état d’âme, l’un et son double. Les deux danseurs incarnent le conflit interne du person­nage. Ils dansent ensemble et adoptent le même mouvement mais finissent par présenter deux aspects différents du person­nage principal.

De même, dans Le Rêve des veilleurs, Antar oppose Zayni Barakat à son adversaire, le grand chef des veilleurs et le policier Chéhab Bin Rady. La danse évoque la rivalité entre les deux.

Dans la plupart des scènes, les danses en duo témoignent de l’originalité de la chorégraphie. Antar met en scène des danses harmonieuses, complexes et belles. Il mise sur le potentiel et la compétence de ses danseurs. Ainsi il nous surprend en mettant dans Mawlana deux femmes en conflit, la scène du double, ou encore en opposant les positions du cheikh Hatem à la pureté du soufisme du cheikh Mokhtar.

Dans Le Rêve des veilleurs, les duos ne se limitent pas à la confrontation des deux adversaires. Ils traduisent diffé­rentes scènes d’amour, de sensualité et de tentation fémi­nine. Une des scènes importantes est celle de la femme pauvre qui s’oppose au régime. Sur scène, la danse s’ef­fectue sur les airs de hip-hop et de break. « C’est l’opposi­tion selon le modèle américain », explique Antar. Une scène qui dérange subtilement.

Deux spectacles en deux actes font danser les histoires du passé et du présent.

Mawlana et Le Rêve des veilleurs les 11 et 12 décembre, à 19h au théâtre Al-Gomhouriya, rue Al-Gomhouriya, Abdine. Tél. : 2390 7707. Les 5 et 6 janvier à 19h au théâtre Sayed Darwich, Opéra d’Alexandrie, Manchiya.

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