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La boîte à merveilles musicales

Houda Belabd, Mardi, 13 août 2013

Née en Occident, la vague extravertie de « la fusion musicale » a réussi à emporter des millions de mélomanes maghrébins. Au Maroc, des festivals lui sont entièrement dédiés. Un mélange de styles et de rythmes musicaux provenant d’ici et d’ailleurs.

Maroc
Hoba Spirit sur scène.

Au festival Mawazine de Rabat comme au festival de Casablanca pour les musiques du monde, la fusion musicale se fait sentir et se propage. Appelé « la fusion » tout court, le phénomène consiste à mélanger plusieurs rythmes et styles musicaux dans une seule chanson. Non sans déplaire aux traditionalistes — étant fidèles à un seul style musical ou aux genres « purs » — elle est bien accueillie par une grande partie de la nouvelle génération. Ses fidèles la lient à l’ouverture vers l’autre, au brassage culturel et à l’envie de s’unir par le biais de la musique.

Cette alliance de rock, de groove et de pop qui fait parfois appel à des rythmes andalous ou gnawis gagne du terrain au Maroc, et ce, depuis le début des années 2000. Lancée en 2006 par l’entrepreneur Younes Boumehdi, Hit Radio se veut le porte-parole des amoureux de ce style musical. « La fusion est née de la volonté de plusieurs groupes musicaux marocains de donner naissance à une nouvelle tendance. Cependant, même si, à ses débuts, beaucoup de monde la prédestinait à disparaître en un claquement de doigts, tel un phénomène de mode, cela n’a pas vraiment été le cas. D’ailleurs, il suffit de voir l’engouement des adeptes des festivals marocains qui continuent d’envahir les concerts des chanteurs pro-fusion pour en déduire que la fusion possède un large public dans ce pays du monde », témoigne Myriam Saadi, critique d’art et spécialiste de la nouvelle scène musicale marocaine. Et ce n’est pas tout. Des groupes musicaux tels que Fnaïre, H-Kayne, Darga et Hoba Hoba Spirit ont même réussi à cartonner dans des festivals maghrébins, européens et euro-méditerranéens. Comme quoi, comme le disent si bien ces pionniers à part entière : « la fusion fait la force ».

Chouchouté par la nouvelle génération marocaine, le groupe Nhass s’adonne, lui aussi, à la Fusion Fashion. Devenu célèbre au lendemain de sa participation à l’émission X-Factor (Liban), le groupe n’a pas su rester insensible au métissage des assonances méditerranéennes. Pour Soufiane Lamhamdi, chanteur du groupe, « fusion rime si bien avec innovation ». Toujours selon lui : « Sans créativité, une oeuvre artistique est condamnée à être sans âme, ni saveur. La fusion des genres musicaux est, alors, venue apporter une touche juvénile et un air de renouveau à la chanson marocaine. Mais encore faudrait-il que cette fusion soit spontanée et bien ficelée. Qu’elle soit une pâle copie de quelque chose n’aurait, cependant, rien d’artistique ».

Le dernier album de cette formation musicale est un bel hymne à l’association des rythmes maroco-occidentaux. La raison en est que Nhass est conscient de la nécessité de s’ouvrir à plusieurs publics musicaux, dans l’optique de ratisser large.

Du chaâbi-groove

A l’instar de Nhass, Issam Kamal, chanteur principal du groupe Mazagan, a fait de la fusion son cheval de bataille dans le monde de la chanson. Pionnier du chaâbi-groove, le jeune homme a même collaboré au dernier album de Cheb Khaled, roi du raï, en chantant le duo Dima labass (ça va, toujours). Toutefois, il existe ceux pour qui fusion rimerait avec confusion ! Il s’agit à titre d’exemple des chanteuses jumelles Safaa et Hanaa. Révélées, elles aussi, grâce à l’émission libanaise The X-Factor, elles se sont juré fidélité à la chanson marocaine à l’état pur et simple. De ce fait, elles chantent, d’une seule voix, la chanson pop moderne, tout en respectant l’engouement des jeunes pour la fusion. « A mon avis, reprendre les anciens tubes marocains en leur offrant une nouvelle distribution permet d’apporter cette touche jeune recherchée par la fusion. Comme quoi, il existe différentes manières de renouveler la chanson marocaine », estime Safaa Raïs.

Ailleurs … plus de barrières

Certainement, la fusion n’est pas née au Maroc mais au pays de l’Oncle Sam. En effet, dans les fifties déjà, le Rock’n’Roll s’est emparé de tous les clubs de nuit aux Etats-Unis. Quelques décennies plus tard, le hip-hop est sorti des limbes dans ce pays du globe ouvrant la voie à une longue liste de mixage des genres musicaux. En Europe, pop, électro, rock, raï et gospel

se mélangent au gré des fantaisies des mélomanes, baissant ainsi les barrières ethno-musicales. Et puis, au niveau de l’Algérie et de la Tunisie, beaucoup d’artistes emboîtent ce modèle, au grand bonheur du dialogue artistique. Aujourd’hui, l’heure est à l’ouverture à tous les niveaux de la vie. La musique ne fait pas exception.

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