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L’artiste des bonnes causes

Mercredi, 10 février 2021

Le comédien engagé Ezzat Al-Alayli vient de s’éteindre à l’âge de 87 ans, nous léguant 160 oeuvres aussi riches que variées.

L’artiste des bonnes causes
(Photo : AFP)

Brun, les traits fins, le visage incroyablement expressif, Ezzat Al-Alayli avait le charme qu’il fallait pour réus­sir. Doublé d’une vaste culture, ce charme lui a permis de crever l’écran depuis son premier rôle au cinéma, dans le film Ressala Mine Imräa Maghoula (message d’une femme inconnue), en 1962.

A partir de cette date, il a joué dans 160 oeuvres drama­tiques, entre films, feuilletons et spectacles. Diplômé de l’Institut des arts théâtraux en 1960, il prépare d’abord quelques émissions de télévi­sion pour gagner sa vie et aider les siens. Ensuite, il tourne des films qui ont mar­qué l’histoire du cinéma égyp­tien.

Il fut l’un des principaux héros de La Terre de Chahine, 1969, d’après l’oeuvre de Abdel-Rahman Al-Charqawi relatant le conflit entre les paysans et les propriétaires terriens dans l’Egypte rurale de 1930. On le retrouve plu­sieurs années plus tard, en 1991, cette fois-ci dans le rôle d’un vieux paysan, à travers le film Al-Mowaténe Masri (le citoyen Masri) de Salah Abou-Seif, une autre adaptation lit­téraire qui tente de trouver des réponses collectives à l’op­pression. De nouveau, il était question de la lutte entre les pauvres paysans et les riches propriétaires terriens.

Cette lutte de classe et l’écart entre les diverses caté­gories sociales ont toujours constitué l’un de ses thèmes favoris. On le retrouve égale­ment dans Ahl Al-Qemma (les gens au sommet, 1981) de Ali Badrakhan, sur les change­ments sociaux survenus au lendemain de l’ouverture éco­nomique sous Sadate, et dans Al-Saqqa Mate (le livreur d’eau est mort), produit en 1977, plus proche d’un conte philosophique sur la vie et la mort.

Des choix de taille

En effet, né au Caire dans le quartier populaire de Bab Al-Chaeriya, le 15 septembre 1934, dans une famille de la classe moyenne, il a vécu plus tard rue Berkette Al-Fil, située entre le quartier populaire de Sayéda Zeinab et celui plus aristocratique d’Al-Hélmiya Al-Gadida. Le futur comédien ne manquait pas de souligner les écarts sociaux, en fin observateur. De quoi influen­cer sans doute ses choix ulté­rieurs.

Engagé, il a souvent joué dans les films de Youssef Chahine tels Alexandrie Pourquoi ? (1978), et surtout Le Choix (1971). A travers l’histoire du meurtre de l’écri­vain Sayed, ce film présente une réflexion profonde sur l’Egypte après la défaite de 1967 et les paradoxes de la classe intellectuelle. Le scéna­rio étant signé par Naguib Mahfouz, ce dernier s’entrete­nait régulièrement, pendant 15 mois, avec Chahine et Al-Alayli, afin de préparer ce chef-d’oeuvre où Al-Alayli a partagé la vedette avec Soad Hosni.

Epris de théâtre dès sa tendre enfance lorsque son père l’emmenait voir des spec­tacles à la fameuse rue Emadeddine, il a joué dans quelques pièces à succès telles que Tamr Henna (fleurs de henné) et Ahlane Ya Bakawate (salut les beys).

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