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Réinventer le classique

Névine Lameï, Lundi, 21 octobre 2019

L’ensemble français Matheus se produit pour la première fois en Egypte. Proposant une rencontre entre la musique égyptienne et la musique baroque méditerranéenne, il collabore avec trois musiciens égyptiens, qui ont effectué une résidence artistique dans la ville de Brest, en Bretagne.

Réinventer le classique
Une musique bien vivante, par l’ensemble Matheus, dirigé par Jean-Christophe Spinosi.

Rouge Méditerranée est le titre d’une soirée durant laquelle se rencontrent la musique égyptienne et la musique baroque méditerranéenne. Le programme de la soirée est conçu par le chef d’orchestre et violoniste français Jean-Christophe Spinosi, qui effectue une tournée en Egypte avec l’ensemble Matheus, les 27, 28 et 29 octobre. Il s’agit d’un ensemble de taille variable basé au Quartz (une salle de spectacle), dans la ville de Brest, en Bretagne, qui, depuis sa création par Spinosi en 1991, s’est illustré dans de nombreux répertoires, notamment le baroque, avec un dynamisme et une ferveur sans faille, qui font son originalité. Il est d’ailleurs réputé pour sa virtuosité à alterner entre les genres et à les mêler.

Selon les termes d’Hélène Moulinat-Kergoat, l’administratrice de l’ensemble Matheus, cette rencontre est un peu « à l’image du pont que le Canal de Suez a permis d’ériger entre les cultures et les traditions de la Méditerranée et de la mer Rouge ». Pour ce faire, Spinosi a choisi de révéler, à travers la soirée Rouge Méditerranée, les sources communes de la musique égyptienne et de la musique baroque méditerranéenne d’Italie, de Chypre ou de Corse. Il présente des arrangements créés spécialement pour la tournée égyptienne et qui font dialoguer deux mondes, deux cultures.

Commençant par Claudio Monterverdi et ses contemporains (fin du XVIe-début du XVIIe siècle), Spinosi et son ensemble invitent le public à voyager au coeur de l’esprit baroque méditerranéen, cheminant jusqu’à Antonio Vivaldi et les compositeurs de la 1re moitié du XVIIIe siècle. Au programme de la soirée : Extraits du Couronnement de Poppée et Extraits des Vêpres et Lamento Della Ninfa de Claudio Monteverdi ainsi que Nisi Dominus/Cum Dederit et des extraits des 4 saisons d’Antonio Vivaldi. La musique traditionnelle égyptienne se joint ensuite à la musique instrumentale de l’ère baroque méditerranéenne avec son contrepoint et son harmonie. De quoi enrichir progressivement l’expressivité de la musique jouée par l’ensemble Matheus. Ainsi des oeuvres de Sayed Darwich (Chéd Al-Hizam) et de Riyad Al-Sonbati (Longua Riyad) sont interprétées par trois musiciens égyptiens qui ont effectué une résidence artistique d’une semaine, durant laquelle ils ont travaillé avec leurs homologues français au Quartz à Brest.

Les musiciens égyptiens sont John Samy Nassif, joueur de nay (flûte orientale), Adel Shams El-Din, percussionniste, disciple de Fathi Guened, et Mohamed Abozekry, jeune compositeur, luthiste et fondateur de la troupe Karkadé, qui affectionne particulièrement les mélanges de styles musicaux. Il faut mentionner également que le programme de la soirée comprend des morceaux variés de la Méditerranée comme To Yasemi, chanson traditionnelle chypriote, et Lama Badda Yatassana (Mouachah arabo-andalous). Un programme nimbé de parfums orientaux donc, qui ne laissera personne indifférent, d’autant plus que le parcours musical de l’ensemble Matheus, sous la direction de Jean-Christophe Spinosi, promet toutes sortes d’originalité.

Succès retentissant

Spinosi est considéré comme un chef d’orchestre « fougueux, impétueux, baroqueux, moderne … doté d’une pulsation rythmique et d’une exaltation physique hors norme ». Il aime décloisonner les traditions de la musique classique et baroque pour dévoiler toute sa modernité et la rendre plus accessible à de nouveaux publics. C’est le combat qu’il mène avec Matheus, en suivant une démarche artistique audacieuse, animé par un désir constant d’innovation et de recherche.

Doté d’une géométrie variable allant de la « formation de chambre » à l’orchestre symphonique, Matheus s’applique à mélanger les différents genres musicaux, interprétant les répertoires du XVIIe au XXIe siècle sur des instruments de l’époque (baroque, classique, romantique et moderne). En 2005, son enregistrement de l’opéra Orlando Furioso a fait sensation, remportant sur son passage de grandes récompenses internationales. En résidence au Théâtre du Châtelet, Matheus interprète chaque année une production d’opéra. Ses passages dans la capitale française sont également marqués par des productions à l’Opéra national de Paris ainsi qu’au Théâtre des Champs-Elysées.

Fier de ses origines bretonnes, l’ensemble ne quitte pas pour autant sa région natale, en particulier Brest, où il effectue de nombreuses tournées. Matheus a participé au festival des musiques actuelles « Les Vieilles Charrues » en juillet 2012, avec un spectacle intitulé Barock’n’roll. Et en 2018, il a collaboré avec la mezzo-soprano suédoise Malena Ernman, mais aussi avec la mezzo-soprano italienne Cecilia Bartoli; leur disque a été récompensé d’un diapason d’or. En février 2020, Matheus jouera au Théâtre des Champs-Elysées, l’oratorio Juditha Triumphans de Vivaldi. Il s’agit d’une nouvelle saison prometteuse, riche d’une programmation dense et éclectique. Une manière de confirmer que la musique classique est toujours vivante et universelle.

Le 27 octobre, à l’Opéra du Caire. Le 28 octobre au palais Manial. Le 29 octobre au théâtre Sayed Darwich à Alexandrie. A 20h.

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