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Né avec la révolution

Névine Lameï, Lundi, 01 juillet 2013

Le jeune chanteur-luthiste Khater Dawa apporte son soutien à toute révolution « humaine ». Sa musique originale est inspirée de l’héritage musical d’Alep et est issue des tragédies de son pays.

Khater Dawa
Le jeune chanteur-luthiste Khater Dawa. (Photo: Amr Gamal)

C’est en 2008 qu’il quitte la Syrie, destination Abu-Dhabi. Et c’est au Caire qu’il réside depuis 2010, pour étudier à la Maison du luth arabe. On l’appelle l’artiste « né avec la révolution ». Son répertoire compte plus d’une dizaine de chansons composées notamment pour la révolution syrienne. Il s’agit du jeune chanteur-luthiste syrien Khater Dawa, 24 ans. « Avec le déclenchement des révolutions tunisienne et égyptienne, j’ai réalisé que les peuples arabes étaient déterminés à faire chuter la dictature. J’ai même prévu que le Printemps arabe s’étendrait jusqu’en Syrie. Un sentiment que je communiquais d’Egypte avec mes amis syriens à travers Facebook et Twitter », déclare Dawa, dont la musique satisfait le goût d’un jeune public contemporain, sans jamais négliger le patrimoine culturel arabe et l’héritage musical d’Alep. Ceci est clair dans des chansons comme Al-Horr qal Souria (le libre a dit Syrie), Al-Chaab yourid (le peuple veut), Ya Cham hal al-nasr (ô Syrie-Liban, la victoire est proche), Mén al-haram lel Cham (des pyramides au Syrie-Liban). Des chansons qu’il transmet sur Youtube, à ses confrères syriens en Syrie, mais aussi à travers des concerts live, organisés dans les espaces publics et les centres culturels d’Egypte. Khater Dawa chante pour des Syriens et des Egyptiens qui partagent les mêmes préoccupations arabes. Titulaire cette année d’une bourse fournie par Al-Mawred Al-Saqafi (ressources culturelles), il vient de donner son plus récent concert au théâtre Guéneina au parc d’Al-Azhar.

D’ailleurs, Dawa devrait y annoncer le lancement de son nouvel album Nahw toloue al-chams (vers le lever du soleil). Un album mêlant héritage musical d’Alep et chants montagnards, aux rythmes modernes d’instruments occidentaux, incrustés de reggae et de bossanova. Cependant, Dawa a préféré reporter le lancement de son album, vu les conditions actuelles en Egypte. Ce chanteur est présent dans toutes les marches de protestation en solidarité avec tout être humain en quête de liberté. « J’aurai bien aimé apporter ma solidarité avec le peuple syrien dans mon pays, mais comment le faire avec la cruauté des combats en Syrie. N’avez-vous pas entendu parler de l’activiste syrien, le martyr Ghayath Mattar à qui on a arraché la gorge ! D’ailleurs, j’ai quitté la Syrie en 2008, avant même la révolution, pour échapper à l’armée syrienne, une armée très loin du patriotisme. Comme je suis né à Mesiaf, une toute petite ville syrienne envahie par les soldats conscrits du régime de Bachar Al-Assad, je connais de près la nature de cette armée. Ceci, depuis l’intifada à Qamechli de la communauté kurde de Syrie, en 2004 », déclare Dawa qui croit à la résistance.

L’Egypte l’inspire

En Egypte, pendant la révolution du 25 janvier, Dawa a admiré le chant de ses confrères égyptiens qui chantent au sein des troupes de musique indépendantes : Hazem Chahine, Mohamad Mohsen et Rami Essam. « J’ai admiré leur enthousiasme et leur courage de chanter sur la place Tahrir devant des milliers d’Egyptiens. Ce sont des voix révolutionnaires qui avaient plus ou moins la liberté de critiquer le régime. Mais en Syrie, si on fait la moindre critique à l’égard du régime on est tout de suite condamné », affirme Dawa.

Après le déclenchement de la révolution syrienne en mars 2011, Dawa demande à travers Internet à son ami le compositeur-parolier syrien Bahr Ghazi, de lui composer une chanson qui décrit les bombardements en Syrie. D’où Ya Souria ya baladi (ô Syrie ma patrie). Une chanson suivie de Ya Souria la toussaguélina ghiab (ô Syrie ne nous considère pas absents) et Al-Watan ganna (la patrie est un paradis) pour prendre part au documentaire Kharitat al-khof (carte de la peur), sur la révolution syrienne, réalisé par la jeune réalisatrice égyptienne Maha Chahba. Un documentaire produit et diffusé sur la chaîne satellitaire Al-Jazeera Documentary et sur des chaînes d’opposition syriennes.

Dawa Khater est un artiste enchanteur qui puise son inspiration dans l’amour qu’il porte à son pays. Une qualité qui le rapproche du célèbre luthiste iraqien Nassir Chamma. C’est avec lui que Dawa a participé au festival Tlemcen, capitale de la culture, en Algérie, 2011. « C’est à la Maison du luth arabe à Abu-Dhabi que j’ai rencontré Nassir Chamma. Je lui ai présenté une chanson de l’héritage musical d’Alep. Il m’a conseillé de suivre des études académiques à la Maison du luth arabe au Caire », déclare Dawa, qui devrait cette année couronner ses études à la Maison du luth au Caire. Néanmoins, son souci par rapport à la révolution syrienne et les chansons qu’il a préparées pour la Syrie ont retardé l’obtention de son diplôme. « Mon esprit est dispersé entre ma famille en Syrie et mon pays », exprime Dawa, les larmes aux yeux.

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