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D-CAF, à la croisée des arts

Yasser Moheb, Lundi, 27 mars 2017

Le nouveau programme cinéma et littérature du Festival d'art contemporain D-CAF mêle ces deux disciplines majeures, et ouvre ainsi un nouvel horizon de création de l’image et de l’écriture. Focus sur deux oeuvres originales.

D-CAF, à la croisée des arts
Incendies.

Créer des liens entre la littérature et le cinéma, telle est la vocation du nouveau programme « Cinéma et littérature » de cette sixième édition du Festival D-CAF, créé en 2012.

Le festival propose pour la première fois une programmation de films librement adaptée d’oeuvres littéraires. Au programme : des projections, des animations, des échanges avec des professionnels du cinéma et de la littérature et un programme spécialement dédié au jeune public. Cinéastes, scénaristes, écrivains et autres professionnels seront présents, afin que petits et grands puissent partager leurs expériences et exposer leurs idées sur les rapports entre l’image et l’écrit.

Les Marginaux
C’est à travers le thème des Marginaux que le festival nous invite cette année à redécouvrir une sélection de films projetés lors des différentes éditions du Festival de Cannes et ayant tous un lien avec une oeuvre littéraire. Parmi les films de la programmation, on trouve le film canadien Incendies, réalisé par Denis Villeneuve, projeté au cinéma Zawya. Adapté de la pièce éponyme du Québécois d’origine libanaise Wajdi Mouawad, Incendies, le film est à l’image de l’oeuvre qui l’inspire, âpre, fort, suscitant tour à tour fascination et horreur. Il s’agit de l’histoire de deux jeunes, Jeanne et Simon Marwan, qui reçoivent deux enveloppes après la mort de leur mère, lors de la lecture du testament. Ils doivent remettre la première lettre à leur père, qu’ils avaient toujours cru mort. Quant à la seconde, elle est destinée à un frère dont ils n’avaient jamais entendu parler. Jeanne décide alors de partir pour le pays de ses origines à la découverte de son histoire familiale. Son jumeau, Simon, se montre plus prudent et ne veut rien savoir de plus sur sa mère, qui s’est toujours montrée froide avec lui. Cependant, par amour pour sa soeur, il accepte finalement de la suivre dans ce voyage. Au cours de leur périple, les deux jeunes gens vont découvrir un passé familial dont ils ne suspectaient pas l’existence. Le pays en question n’est jamais clairement nommé, pour mieux brouiller les pistes et tenir en haleine le spectateur. Mais on devine qu’il s’agit du Liban, de la Syrie ou de la Palestine.

De prime abord, Incendies a l’aspect d’une histoire de famille, mais le film bascule rapidement vers la tragédie, mêlant histoire, conflit politique, questions sociales et religieuses. Toutefois, le réalisateur préfère le style symbolique de l’oeuvre de Mouawad, en faisant de son héroïne une figure tragique moderne, victime de conflits religieux dans un pays qu’elle ne connaît que très peu. Le passé et le présent se mélangent pour créer un puzzle que les deux jeunes protagonistes essayent de résoudre. Les questions d’identité et de mort, la confrontation entre les générations en quête d’un compromis ou d’une certaine réconciliation, un montage palpitant et une narration romanesque caractérisent l’oeuvre du cinéaste québécois et de l’oeuvre d’origine.

Monsieur Lazhar
Outre les polars et les drames sociaux, une belle oeuvre, toujours canadienne, Monsieur Lazhar, de Philippe Falardeau, est également présentée. Le film est une adaptation de la pièce Bashir Lazhar, d’Evelyne de la Chenelière, qui comporte deux thèmes principaux : Le système scolaire canadien et l’intégration d’un immigré d’origine arabe dans une société occidentale. A la suite du suicide d’une enseignante de primaire, Monsieur Bachir Lazhar, immigré algérien habitant Montréal, est engagé pour reprendre la classe. Entre ses problèmes d’intégration, sa conception à l’ancienne de l’éducation et les différentes pensées qui pèsent sur ses élèves, tout ne va pas de soi.

En adaptant cette pièce littéraire, Falardeau tente de présenter un sujet déjà discuté sur le grand écran mais d’une façon plus personnelle cette fois, d’après sa propre vision. Le monde de l’enfance face au traumatisme de la mort est ici étudié minutieusement. L’exercice est bien difficile, mais avec Mohamad Fellag, dans le rôle de l’observateur, le réalisateur réussit à ajouter une pointe de douceur dans ce drame qui aurait pu en manquer. Par rapport à la situation difficile où il se trouve, l’attitude et le contact de notre professeur avec les élèves sont exemplaires. Le film repose sur de multiples échanges entre adultes et enfants, et parfois même entre enfants. Le jeu est juste et l’angle intéressant.

Ce nouveau programme du D-CAF ouvre de nouvelles perspectives et nous fait voyager dans deux univers fascinants. Des ateliers et des séances festives sont également organisés tout au long du festival. Des événements de qualité à ne pas manquer.

Pour programme détaillé, voire calendrier

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