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Les 1000 de l'Hebdo : chronique d’un hebdomadaire

Hanaa Al-Mekkawi, Mardi, 19 novembre 2013

Al-Ahram Hebdo fête cette semaine son millième numéro. Depuis sa création en 1994, et grâce à un remarquable effort, il a relevé tous les défis et a réussi à se hisser parmi les journaux les plus respectés de la sphère francophone. Retour sur un parcours exceptionnel.

Chronique d’un hebdomadaire

Au coeur du Caire, dans l’une des rues les plus animées, se trouve la plus grande institution journalistique en Egypte, Al-Ahram. C’est sur la terrasse aménagée en locaux que l’Hebdo, qui fête aujourd’hui son millième numéro, a vu le jour. Les souvenirs des débuts d’un journal et des journalistes qui entamaient pour la plupart leur vie professionnelle ne manquent pas.

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Dr Esmat Abdel-Méguid, ex-ministre des Affaires étrangères, lors d'une visite à l'Hebdo.

« C’était un vrai défi pour nous, car il n’y avait pas de journalistes qualifiés qui maîtrisaient la langue française. Il y avait certes des gens qui parlaient parfaitement le français, mais ils n’ont pas été formés en journalisme. Le choix était difficile : parier sur l’enthousiasme des jeunes pour les initier au journalisme », relate Mohamed Salmawy, ex-rédacteur en chef de l’Hebdo, son fondateur et son père spirituel. Aujourd’hui, Salmawy peut prétendre qu’il a gagné le pari. Al-Ahram Hebdo, né il y a 20 ans, a pu former de véritables professionnels, sollicités par d’autres journaux pour profiter de leur bonne expérience.

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L'Hebdo, un lieu de passage obligé pour les artistes.

Aujourd’hui, on peut considérer l’Hebdo qui paraît tous les mercredis comme un hebdomadaire d’informations générales. Il traite de l’actualité politique, économique, sociale, culturelle, artistique, touristique et sportive de l’Egypte. Il permet au lecteur francophone de connaître le point de vue égyptien sur l’actualité arabe, africaine et internationale.

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L'Hebdo, un lieu de passage obligé pour les artistes.

A l’époque, il n’y avait pas d’Internet, et la presse égyptienne se limitait aux journaux publics qui ne transmettaient que le point de vue officiel et ceux de l’opposition. La présence d’Al-Ahram sur le marché a permis la naissance d’une presse d’opinions permettant des points de vue divers et opposés. Ce qui a conféré à ce journal une certaine crédibilité, car il tient à transmettre des informations précises, et c’est au lecteur de former son point de vue. Comme les journaux en langues étrangères se comptaient sur les doigts d’une main, Al-Ahram Hebdo a voulu présenter une version en langue française avec un concept différent et qui allait combler un vide qui faisait défaut. « L’objectif du journal était de présenter aux étrangers la vraie image de l’Egypte ici comme ailleurs. Mais ce qui s’est passé c’est que 70 % du lectorat actuel de l’Hebdo sont des Egyptiens. Cela est dû à la crédibilité du journal qui jouissait d’une marge de liberté un peu plus importante que d’autres journaux, alors les lecteurs y ont mis toute leur confiance, car ils avaient besoin d’une source d’informations plus sûre et plus crédible », dit Salmawy.

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L'Hebdo, un lieu de passage obligé pour les artistes.

Tout a commencé en 1993 par une annonce publiée dans le quotidien Al-Ahram, disant que le conseil d’administration de l’institu­tion avait signé un accord avec l’ambassa­deur de France pour la création d’un hebdo­madaire francophone en Egypte.

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L'Hebdo, un lieu de passage obligé pour les artistes.

C’est le centre de formation et de perfec­tion des journalistes, le CFPJ, dépendant de l’ambassade de France, qui s’est chargé au début de la formation des journalistes.

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Après une augmentation inattendue, merci M le rédacteur en chef.

L’aventure avait commencé et il fallait initier l’équipe jeune au journalisme et à travailler sur un ordinateur, car on voulait faire de l’Hebdo le premier journal informa­tisé en Egypte. Ainsi, en préparant les numé­ros 0 (expérimentaux), les journalistes apprenaient en même temps à saisir leurs articles sur l’ordinateur.

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Soheir, Doaa, Yolande, Maha, Chérine, Névine et Najat au Desk avec Bruno Ronfard.

Si à sa naissance il était comme une étoile brillante dans le ciel de la presse, l’Hebdo est en train de traverser une période difficile, à l’image du pays qui est en pleine gestation. Il a commencé au départ par 44 pages pour se rétrécir à 32, et parfois 24, à cause de problèmes financiers. La scission sociale qui a eu lieu après la révolution du 25 janvier, et qui s’est amplifiée après le 30 juin, a marqué aussi l’équipe de l’Hebdo. Soutenant l’armée, ou sympathisant avec les Frères musulmans, les deux tendances se côtoient. Les débats houleux qui surgis­sent pour exprimer tel ou tel point de vue se déroulent différemment. On peut passer des heures dans des discussions tendues, puis on éclate de rire, on s’embrasse et on entame le prochain numéro, qui sera comme toujours, objectif, professionnel, non partisan : le numéro 1001.

Vivre une journée à l'Hebdo

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Les jumelles du service traduction, Racha et Rim engageant M. Salmawy.
C’est à 10h qu’Al-Ahram Hebdo s’anime. D’après les visages présents dans la salle de rédaction, on devine qui a un deadline ce jour-là : chaque rubrique a un jour précis pour remettre ses articles. Le deadline, c’est le mot-clé qui fait fonctionner tout le système à l’Hebdo.

La journée commence dans le calme. Les journalistes, les yeux braqués sur les écrans des ordinateurs, tapent leurs articles.

C’est entre 11h et midi que les membres du desk arrivent, et là le rythme s’accélère. Le desk exige qu’on envoie les articles et les journalistes tentent de négocier pour avoir un petit quart d’heure ou une demi-heure de plus pour achever leur travail. Dès que les articles sont prêts, le chef de service remet le plan des pages au desk. Vers 13h, l’Hebdo se transforme en une ruche d’abeilles : dans la salle de rédaction ou celles des chefs de service se tiennent les réunions hebdomadaires. Les membres du desk cherchent d’une salle à l’autre les journalistes, afin de discuter de leurs articles : angle, structure et informations précises, tout passe au peigne fin avant que l’article ne prenne un OK. Sinon, c’est le CDS, qui signifie que le chef de service doit revoir l’article. Si c’est un mardi, toute l’équipe du journal est présente, car c’est la journée de réunion de rédaction. C’est à 14h et demie précise que le rédacteur en chef, les chefs de service et le chef du desk se réunissent pour fixer le programme de la semaine suivante.

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L'esprit d'équipe, pas seulement à l'Hebdo mais aussi sur le terrain.

Et c’est également ce jour-là que l’on décide de la Une et de la dernière mise au point rédactionnelle et photographique du journal.

Gamal, le responsable de la cafétéria, et les plantons arrivent les premiers à l’Hebdo, et à aucun moment, ils ne disparaîtront du cadre. Ils sont là à fournir des documents, des clés USB, servent des boissons. Bref, ils sont là pour faciliter la vie à toute l’équipe.

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En 2004, l'Hebdo fête ses dix ans d'existence.

En début d’après-midi, la salle des archives connaît un va-et-vient incessant : Haïssam et Karam, les soldats inconnus, sont dépassés par le boulot. Ici, on récupère les photos, des archives, sur le Net, ou à travers des agences de presse ou celles envoyées par Email. C’est aussi dans ce bureau que l’on remplit les demandes de congé, les autorisations pour la sortie des véhicules et la mobilisation des photographes pour le travail du lendemain. La photocopieuse se trouve également dans cette pièce exiguë où sont rangés les registres qui renferment tous les anciens numéros. Et ce n’est pas tout, car c’est dans cette salle que les journalistes parcourent la pile de journaux du jour. Chaque journaliste doit attendre son tour. Une fois les articles sortis du desk, c’est à la correction de faire le reste du travail. Cette tâche terminée, les journalistes se dirigent vers la maquette pour superviser la mise en page. Cela prend du temps avant d’avoir enfin une épreuve entre les mains qui doit revenir à la correction pour être corrigée de nouveau.

Vers 17h, le calme revient et le travail se termine deux heures après. Une journée de travail interrompue par des discussions entre collègues dans la grande salle ou en fumant une cigarette dans le hall. De temps en temps, on célèbre un anniversaire, une promotion ou un adieu dans une ambiance bon enfant et conviviale.

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